Sortons de notre état de minorité : pour un congrès à la hauteur des enjeux
« Qu’est-ce que les Lumières ? La sortie de l’homme de sa minorité dont il est lui-même responsable. Minorité, c’est-à-dire incapacité de se servir de son entendement (pouvoir de penser)» (Kant)
Exposé des motifs
Il y a 25 siècles, environ, Platon définissait le sophiste comme un homme habile, jouissant d’une connaissance encyclopédique et se faisant payer fort cher son enseignement, centré, en particulier, sur l’apprentissage de la rhétorique comme technique du discours. Platon (ou Socrate) n’aimait pas les sophistes et cherchait à définir et pratiquer la « droite philosophie » – celle qui s’éloigne de la rhétorique présentée comme une perversion du langage. Sans doute, tirerions-nous profit à méditer l’enseignement de Platon tant l’imposture, le mensonge et l’habileté en politique sont devenus notre lot quotidien. La confusion idéologique est partout et s’accompagne d’une crise profonde des formations politiques. Si la droite est un peu partout en Europe talonné par l’extrême-droite (pour simplifier), la gauche et les écologistes ne sont guère mieux lotis. En France, du PS à l’extrême-gauche en passant par le FDG, toutes ces formations sont engagées dans un processus de fragmentation ou de décomposition qui semble devoir se poursuivre. Idem pour les forces syndicales qui peinent à se faire entendre dans les entreprises comme dans les négociations collectives. Cette situation est préoccupante et devrait nécessiter, de toutes parts, un profond travail d’ajustement, de composition, de recomposition, qui ne soit pas un simple masque de plus posé sur d’autres masques. Comment revenir à une « politique droite » dans un paysage totalement dévasté par le cynisme ou l’opportunisme, l’appétit de pouvoir des uns et l’impuissance des autres ?
Si les congrès des partis politiques se succèdent les uns après les autres, force est de constater que rien de nouveau n’émerge. Aucune idée, aucun élan, aucune proposition novatrice… Le dernier congrès du PS est à cet égard révélateur. « Anesthésie générale » titrait Le Monde au lendemain du congrès de Poitiers. « Les socialistes ressortent de leur congrès comme avant d’y entrer. Dans le flou idéologique faute de l’avoir éclairci, et dans la désunion, entre ceux qui soutiennent sans faille le gouvernement, et ceux qui constatent sa faillite » selon Mediapart. « Un congrès pour rien » selon les socialistes affligés ou encore « un congrès pour la photo ». Rien d’étonnant, dans la mesure où le PS est devenu un astre mort, depuis longtemps engagé dans un processus de normalisation « idéologique » qui s’est accéléré depuis l’accession de François Hollande à la présidence.
Pour autant, EELV se porte-t-il mieux ? Effectif militant stagnant, situation financière difficile, usure des volontés, orientation stratégique illisible, dissidences de certains parlementaires ou conflit pour la présidence du groupe à l’AN, Cop n’ayant jamais fonctionné, conseil fédéral difficilement audible…Tout cela indique notre incapacité à faire de notre organisation un outil au service de nos idées et une réponse crédible à l’urgence sociale et environnementale.
Dans ces conditions, notre futur congrès prévu au second trimestre 2016 ne doit pas être un congrès pour rien. Cette étape est vitale pour l’avenir d’EELV et doit permettre de remettre notre mouvement sur les rails, définir une orientation politique claire, être à la hauteur de la situation politique, économique et sociale, européenne.
Pour cela, nous devons nous donner le temps d’une préparation sérieuse, documentée, partagée par les régions et l’ensemble de nos adhérents/coopérateurs. Ce travail préparatoire, en amont, du congrès est indispensable. Il portera, notamment, sur :
- L’évolution de la société française et de son rapport à la politique ;
- L’évolution idéologique des différents partis politiques composant l’échiquier politique français ;
- Le bilan de notre participation gouvernementale ;
- Le bilan entre 2012 et 2015 du gouvernement ;
- Le bilan de notre participation à la majorité parlementaire ;
- Le bilan de notre groupe au parlement européen ;
- Le bilan des dernières élections nationales (élections européennes, municipales, départementales) ;
- La mise à jour de notre programme et de notre corpus idéologique ;
- La définition d’une stratégie claire.
Sortir de la minorité, au sens de Kant, c’est aussi sortir de l’imposture générale, du temps court et de la précipitation. Nous ne pouvons pas réitérer les erreurs du congrès de Caen et limiter nos débats, à de simples enjeux tactiques entre différentes « sensibilités » ou à la préparation des élections présidentielles de 2017. Ce cadre est dépassé. Face aux enjeux, donnons-nous d’abord les outils d’analyses susceptibles de nous aider à penser collectivement la situation présente et à venir.
Le conseil fédéral réuni le 4 et 5 juillet 2015 décide :
1) De faire du prochain congrès une étape dans la mobilisation d’EELV et du monde de l’écologie.
À cet effet, Le conseil fédéral décide :
2) de préparer un texte de cadrage sous forme d’une motion présentée au prochain Conseil fédéral qui :
– définira les enjeux et les objectifs politiques du congrès ;
– définira la méthode participative de préparation du congrès dans une dynamique d’ouverture permettant d’associer l’ensemble des adhérent-e-s / coopérateur-e-s durant le premier semestre 2016 et d’organiser dans chaque région, des réunions autour des enjeux clefs de la période ;
– définira les principales questions auxquelles les motions d’orientations devront répondre.
3) de confier la rédaction du texte de cadrage à un groupe ad-hoc, en lien avec le BE, composé à parité de 2 membres de chaque sensibilité et de 2 Conseillers fédéraux hors-motion.
Contre : 2 ; pour : 47
Adoptée
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