Comité National d’Éthique : pour une réflexion d’EELV sur ses principes et sur ses pratiques

Le Comité National d’Éthique,
aux adhérents d’Europe Écologie Les Verts

 

Chères adhérent-e-s,

Paris, le 17 Juin 2013

Il a été décidé, lors des Assises constitutives d’Europe Écologie Les Verts (à l’automne 2010), la mise en place d’un Comité National d’Éthique, associant des membres élu-e-s adhérent-e-s d’EELV et des membres associé-e-s.

La fonction de ce Comité est définie dans les statuts d’EELV. Elle a été précisée en Conseil Fédéral lors de sa mise en place. Contrairement à ce que plusieurs saisines que nous avons reçues tendent à supposer, il ne s’agit pas de se substituer au Conseil Statutaire, en charge des questions de règlement intérieur. Il faut que les questions proprement disciplinaires, inévitables dans la vie d’un parti politique, soient correctement traitées pour que l’on puisse mesurer les questions qui ne relèvent pas de ce traitement. Il ne s’agit pas non plus de constituer une instance surplombante, chargée de faire la morale aux un-e-s et aux autres, au nom d’un supposé savoir-expert du bien ou du mal. Il s’agit, pour un mouvement qui prétend « faire de la politique autrement » de faire exister – c’est-à-dire de formuler – et de travailler les problèmes émergeant en son sein qui tiennent à la difficulté, individuellement ou collectivement éprouvée, de mettre les principes et les valeurs en accord avec les pratiques.

Dans cette perspective, le CNE peut être saisi par n’importe quel-le adhérent-e. Il peut aussi se saisir lui- même, s’il le juge nécessaire.

Au fil des mois qui se sont écoulés le CNE a rarement été sollicité et les saisines ont principalement concerné des questions de comportement personnel (attitudes injurieuses, pratiques douteuses ou jugées douteuses). Pourtant, il est assez régulièrement question, dans des conversations et des échanges privés, de problèmes rencontrés mais ceux-ci restent cantonnés à ces échanges et ne font pas l’objet d’une appropriation et d’une réflexion collectives. Or, le CNE souhaite contribuer à aider le mouvement à se saisir de ces questionnements.

Cette phase expérimentale de quelques mois nous semble déboucher sur une interrogation de fond, celle du rôle et de la position du CNE au sein du mouvement et vis à vis des différents organes qui le constituent. Elle a amené ses membres à préciser cette position pour mieux répondre aux enjeux intrinsèques au mouvement et aussi, plus largement aux enjeux posés par la nécessité de plus en plus prégnante d’une haute qualité démocratique.

CNE 1 21/06/2013

L’existence du Comité National d’Ethique au sein d’EELV est en elle-même une singularité qu’il convient de souligner. Aucun autre parti en France n’a à ce jour engagé de démarche de ce type et cela est sans aucun doute révélateur de la force de l’intention d’EELV de faire de la politique autrement. C’est en raison de cette conviction apparente et des répercussions que cette initiative serait susceptible d’avoir non seulement sur le mouvement mais aussi sur le monde politique que les membres du CNE ont accepté de participer à cette innovation. Force est de constater que, quelques mois après la création du CNE, les réalisations sont bien éloignées des ambitions.

Plusieurs hypothèses pourraient être formulées pour expliquer cela. Des raisons liées à la vie même du mouvement pourraient être évoquées : EELV serait tout simplement devenu un parti politique comme les autres – et cela surtout dans une période de participation gouvernementale – au sein duquel les urgences de l’action, la gestion des intérêts internes, ainsi qu’une certaine routine de fonctionnement produisent un remarquable silence. Le temps d’un congrès les esprits s’agitent, les positions de principe s’affichent, et puis tout retombe…

Il pourrait aussi y avoir un décalage entre la sensibilité des adhérent-e-s à la base, citoyen-ne-s vigilants sur les questions d’ordre éthique et l’état d’esprit d’une partie des instances du mouvement, peu disponible pour se pencher sur l’approche éthique de la politique.

Se limiter à ce type d’hypothèse serait négliger que c’est aussi peut-être tout simplement le rôle et la position du CNE lui-même qui sont en question. Le CNE a, en effet, jusqu’alors été à l’écoute des remontées des membres du mouvement sans jamais se saisir lui-même de thématiques qui, pourtant, au regard des actualités politiques, auraient mérité un approfondissement éthique. Ceci était conforme à la position prise suite aux premières rencontres de ces membres.

Cependant, la période d’expérimentation l’invite aujourd’hui à évoluer vers une posture plus affirmée d’autosaisine sur des sujets qui lui semblent primordiaux. Le CNE sera donc amené à proposer au mouvement d’engager un dialogue éthique sur différents thèmes. Le CNE pourra participer à ces discussions mais ne pourra pas être organisateur de ces espaces de dialogue. Cela suppose donc que les instances du mouvement s’emparent des propositions du CNE pour les mettre en œuvre.

Les modalités de fonctionnement du CNE dans cette nouvelle posture, en particulier du mode d’interpellation des instances d’EELV et du mouvement, restent pour le moment à affiner. Le renforcement de la posture d’autosaisine doit être considérée comme complémentaire de la démarche d’écoute des demandes des membres du mouvement qui a prévalu jusqu’alors et qui reste, bien évidemment, valide.

A ce titre, certains sujets ont déjà été identifiés :

 la violence symbolique, exercée notamment dans les séquences d’investitures, avec concurrence et conflictualité souvent très fortes ; l’incapacité à passer du conflit sous une forme génératrice de violence verbale à un conflit ou désaccord constructif,

CNE 2 21/06/2013

 le cumul des mandats mais aussi des pouvoirs (y compris dans le temps), la répartition effective des responsabilités politiques, les conflits (éventuels) d’intérêts, s’agissant des fonctions, des carrières au sein d’EELV dans les fonctions électives et dans les organismes associés, les instruments de la transparence financière d’un mouvement,

 le rôle des « sensibilités » et « motions » qui devraient être simplement des outils de débat politique et de démocratie interne, et qui implique trop souvent des mécanismes d’inféodation partisane ; l’exercice des libertés politiques au sein d’EELV, dans le respect du collectif,

Et plus généralement l’appropriation de l’intérêt commun, intégrant l’interrogation « qu’est ce que « je », qu’est-ce que « nous » lorsqu’on est membre d’un mouvement ? ».

Nous vivons un temps qui est à la fois celui de la dégradation générale de la vie publique, celui d’une normalisation à la baisse qui touche l’ensemble des partis et du personnel politique dans notre pays. Les citoyen-ne-s le perçoivent, et leur patience n’est pas, ne sera pas, illimitée. Cette tendance générale devrait rendre très vigilants ceux qui comme EELV se veulent différents, et porteurs à la fois d’une perspective de civilisation nouvelle, écologiquement instruite, et d’un projet de refondation républicaine et démocratique. Quelle place un parti comme EELV est-il prêt à faire, et de quelle manière, à une réflexion sur ses propres principes et sur ses propres pratiques ?

Contact courriel : comite-ethique@eelv.fr

CNE 3 21/06/2013

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