Reprendre la marche de l'histoire, réduire le temps de travail
Atelier animé par Eva Sas, commission économie
Intervention de Sarah Trichet-Allaire, pour la commission féminisme
La réduction du temps de travail est un élément indispensable à l’égalité femmes-hommes : Le modèle dominant masculin avec ses journées de travail à plus de 40h ne permet pas de prendre le temps de s’occuper de son foyer, d’avoir des activités militantes.
C’est pourtant ce modèle qui a continué a perduré, tout du moins dans les milieux aisés. Il y a eu en effet une disparité assez importante selon la classe sociale : dans les milieux aisés, on retrouve plus de couples bi-actifs – et chez les cadres, les deux conjoints travaillent plus que 35h – et dans les milieux ouvriers, c’est souvent le chômage pour les deux personnes… Ou bien plus de temps partiels subis dans les emplois d’ouvriers et employés, ou encore des emplois « effilochés », avec une heure par ci, une heure par là.
On constate également une répartition des tâches parentales plus inégalitaire dans les milieux moins aisés. Le travail y est aussi plus sexué (ouvrier/assistantes maternelles, etc.)
Quand elles en ont les moyens, la manière pour les femmes de se sortir de la double journée – voire la triple journée : professionnelle, mère, femme – se fait le plus souvent en employant du personnel de ménage. Quasiment tout le temps des femmes. Ce modèle, plus courant dans les pays anglo-saxons, permet à une femme d’effectuer sa double journée, mais seulement grâce au travail d’une deuxième femme. La première sera valorisée pour ses qualités d’organisation, mais en s’appuyant sur le travail d’une deuxième femme, qui, elle, est complètement invisibilisée. Deux femmes travaillent pour le profit d’une seule…
Ce modèle est permis notamment par la politique de réduction d’impôt pour l’emploi de personnel de maison. Il permet à ces couples de ne pas remettre en question le modèle de répartition des tâches ménagères et parentales, tout en permettant tout de même aux femmes de travailler.
Mais ce travail des femmes, cette égalité de genre, se fait alors au prix de l’inégalité sociale.
Il existe peu d’études sexuées sur les conséquences des 35h, mais celles qui sont sorties ont montré que l’usage des 35h a accompagné, voire renforcé les différences de genre. Par exemple, dans le cadre d’une étude portant sur une entreprise de 246 personnes, les temps de RTT des mercredis ont été réservés pour les femmes. Enfin… Pour les temps partiels… Mais sur cette entreprise où il y avait 60% de femmes, il n’y avait qu’un homme en temps partiel.
La division traditionnelle en interne de l’entreprise est également restée la même. Les femmes ayant des enfants en bas âge prenant plutôt du temps pour s’en occuper, le choix de l’entreprise pour les embauches de postes qui étaient plutôt masculins s’est porté sur des hommes.
La répartition des temps des tâches internes à l’entreprise a également perduré.
Sur d’autres études, on a constaté que les femmes ont plus tendance à :
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prendre une journée de RTT le mercredi afin de s’occuper des enfants, de les accompagner à leurs activités extra-scolaires
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demander à travailler moins par jour (7 heures) et finir plus tôt, pour aller chercher les enfants à l’école le soir.
Les hommes, eux, utilisent leur temps libre pour bricoler, installer une maison : des « temps pour soi ».
80% des taches domestiques sont encore et toujours effectuées par les femmes. En 10 ans, les hommes ne consacrent en moyenne que quelques minutes de plus aux taches domestiques.
Sans accompagnement de la RTT, sans une politique publique volontariste de partage des tâches parentales et surtout ménagères, la RTT ne sera pas un outil d’émancipation pour les femmes, mais ne fera que perdurer les inégalités entre les femmes et les hommes, ne permettant pas à celles-ci d’effectuer les emplois qu’elles voudraient au sein de l’entreprise, ni à ceux-ci de prendre du temps pour s’occuper de leur maison.
Pour pousser les hommes à faire le ménage, ce sera sans doute plus difficile que pour aller chercher les enfants à l’école. Ce n’est pas seulement le temps libéré, mais les représentations mentales à changer. Il faut travailler sur l’image des hommes qui est véhiculée : dans la publicité, les livres scolaires, les médias.
Pour les tâches parentales, c’est un peu plus facile – quoiqu’on constate des différences à l’intérieur de cette catégorie. Une mesure simple est l’action sur le congé parental. Nous devons rendre obligatoire un congé bien plus long pour les hommes. Et conditionner les congés pour les femmes à ceux que prennent les hommes. Voici ce que nous proposons sur ce sujet dans le programme pour 2012 :
Pour une modification des temps de la vie et une véritable politique de conciliation travail – vie personnelle, le congé de maternité doit disparaître pour un congé de grossesse obligatoire suivi d’un congé de parentalité qui permettra de s’occuper de l’enfant, réparti entre les deux parents à part égale. Ce congé serait aussi proposé pour les enfants adoptés. Enfin, un congé parental facultatif pourra être accordé au père et à la mère. Ce congé parental, indemnisé à 80% du salaire et plafonné à 1800€ bruts par mois, pourrait durer une année maximum (26 semaines pour chaque parent), de manière non cessible et de durée égale.
Cela concerne seulement l’arrivée des enfants en bas âge. Il faut également permettre aux hommes d’aller chercher les enfants à l’école avec des horaires qui puissent concilier cela. Et aussi réduire les horaires à rallonge dans les entreprises, en interdisant les réunions après 18h, comme cela se fait déjà en Suède, et en fermant les locaux à partir de 20h.