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Une plus grande participation des citoyens à la définition des projets d’aménagement du territoire

Portrait Charles Fournier

Intervention de Charles Fournier

Monsieur le Président, chers collègues,

En complément de l’intervention de Jean Delavergne, je voudrais dire quelques mots à la fois sur le choix de distinguer l’échelle d’élaboration des projets, de l’échelle des contractualisations et exprimer un intérêt quant aux avancées démocratiques que pourrait contenir une telle démarche tout en émettant quelques réserves sur les moyens envisagés pour associer les acteurs des territoires. 

Il ne me semble pas qu’il faillle se limiter ni même être inquiet d’une plus grande participation des citoyens  à la  définition des projets d’aménagement du territoire ou plus globalement à l’ensemble des politiques que conduisent les collectivités, cela est compatible avec la responsabilité qui est la nôtre  de construire une vision pour le développement de nos territoires, en écoutant l’expertise d’usage des citoyens, en les associant au diagnostic tout comme à la définition des orientations. Nous l’avons vu pour le SRDADT, les forums ont été  sujet à une forte mobilisation. Mais j’y reviendrais.

La distinction d’un territoire de projet et de territoires de contractualisation me semble être un bon choix au moment où vont se redessiner, je l’espère avec ambition, tant l’organisation de nos territoires que la définition de leurs compétences, dans l’acte 3 de la décentralisation. nous espérons bien d’ailleurs que ce choix du bassin de vie trouvera sa traduction dans les lois à venir.

Faire ce choix c’est sans obérer aucunement le cadre de nos politiques territoriales, si d’aventure les choix qui seront faits au niveau national, ne collaient pas à ceux que nous allons faire en région, s’inscrire dans une perspective, c’est dire que nous considérons que les échelons actuels ne sont pas totalement adaptés à une approche durable des territoires, ou qu’en tout cas il convient de faire évoluer le cadre d’élaboration des projets tout comme celui de la coopération entre les échelons territoriaux. 
Certains ne manqueront sans doute pas de dire que la région souhaite au travers des évolutions proposées renforcer sa tutelle sur ces territoires infrarégionaux , que tel ou tel collectivité ne pourra plus user à sa guise de l’opportunité financière apportée par les différents contrats régionaux, que le choix des priorités sera essentiellement celui de la région .

C’est justement pour aller au-delà d’un débat de priorités limité aux seuls co-contractants, certes des élus représentants,  que ces évolutions sont nécessaires. Construire un projet détaché au moins dans sa construction, des intérêts particuliers des territoires qui le composent, c’est  permettre une vision partagée du développement, c’est poser un regard global sur les priorités qui devront être les nôtres, celles de la région comme celles  de l’ensemble des collectivités concernées. 

A l’instar de ce que les SCOT ont pu induire comme pratique d’élaboration de projet de territoire, nous ne serons pas à cette échelle, dans la gestion du seul gâteau financier. 

L’intérêt général n’est pas la somme des intérêts individuels, il est bien plus complexe et il suppose une construction commune, sans nul doute des confrontations dans le diagnostic tout comme dans les choix à faire.  
Le bassin de vie et c’est un point essentiel, est une échelle qui correspond à la vie des gens, à leur pratique du territoire.  Territoire de formation, d’emploi, de la mobilité quotidienne, d’économie, d’interactions entre espaces urbains et espaces ruraux, il correspond également au territoire d’intervention de bon nombre d’autres institutions et acteurs : établissements scolaires et de formation, associations, services public, bon nombre d’entreprises ... Lors de l’élaboration du SRDADT, les temps de préparation des forums ont été des vrais moments d’échange entre des acteurs diversifiés et riches en réflexions. 

Les futurs contractants des contrats régionaux auront bien entendu toute la place pour exprimer leurs enjeux, ils sont rodés à cet exercice, leurs projets existent, ceux-ci devront s’inscrire et se compléter dans une vision plus globale et plus intégrée de l’ensemble des politiques régionales. L’inter-territorialisation du débat sera un plus, par exemple en matière d’agriculture, la lutte contre l’artificialisation des terres, passe par une vision commune du développement économique et on par l’implantation de zones d’activités au gré d’initiative locale sans mesure des conséquences plus globales. Il nous faut une agriculture qui contribue à nourrir les villes, nos destins sont liés et consommateurs souvent urbains et agriculteurs l’ont bien compris en mettant sur pied des AMAP ou autres outils de coopération.

Au-delà des blocs de priorités qui seront intégrés dans les contrats, l’approche par bassin de vie, permettra une approche intégrée des différentes politiques régionales. Ainsi, par exemple, la formation professionnelle n’est pas qu’une préparation à l’emploi ni un outil de gestion des crises deconnectee des logiques de territoires, elle est aussi un facteur d’attractivité des territoires : la présence d’acteurs de la formation, d’établissements contribue au développement endogène des territoires et à donner  une coloration specifique au développement économique. Elle permette aussi d’engager la transformation du modèle économique de ces territoires.

Par ailleurs et c’est le second sujet que je voulais développer, le bassin de vie peut être une bonne échelle pour démocratiser les politiques territoriales. Il correspond à un espace vécu, il est un échelon qui permettra au citoyen et aux acteurs en général de mesurer les enjeux, pour peu que l’on s’en donne pleinement les moyens. 

Et c’est là que j’émettrais des réserves sur ce que dit la communication. La seule tenue de forums tous les deux ans pour définir le projet et évaluer la stratégie , ne me paraît pas suffisant et mérite d’être complétée par d’autres pratiques de concertation et plus loin même de participation. Le dialogue ne saurait se réduire à un temps ponctuel qui tout au plus permet de partager des constats, de forger des opinions, mais sans doute pas d’associer à l’élaboration des projets. Pas plus qu’il ne donne un droit de suite sur ce qui est réalisé. C’est un cadre intéressant pour lancer les dynamiques mais il est nécessaire de proposer des cadres réguliers d’échanges et d’utiliser des outils :
-   qui permettent une appropriation minimale et commune des enjeux des bassins de vie, accessible au plus grand nombre. Les nouveaux outils numériques – Systèmes d’information géographique, Web Public – offrent assurément des opportunités pour renouveler les processus de transmission et de partage d’informations et de connaissances sur le territoire. On parle déjà de géogouvernance et d’autres régions expérimentent ces outils qui permettent de se mieux se représenter le territoire en cartes et d’agir sur ces cartes,
-   qui s’adaptent en fonction de l’objectif : panel de citoyens pour approfondir un réflexion et aboutir à une proposition concertée, conférence de consensus sur un sujet complexe,...bref il existe une panoplie de démarches mais aussi de nombreux acteurs susceptibles d’accompagner ces processus. 

A minima, il me semble utile de garantir un droit de suite sur les décisions prises et notamment concernant chaque bloc de priorité. Des commissions thématiques ou autres formes de concertation continue permettraient d’aller plus loin dans l’implication des acteurs et des citoyens. 

Bien évidemment cela posera inexorablement, la question des moyens humains pour accompagner ce dialogue fusse t-il a minima ou ambitieux. La mobilisation des techniciens de la région et des pays autour du projet de bassin de vie devra être revisitée pour  à la fois organiser l’articulation entre la vision du SRDADT déclinée dans les bassins de vie  et les aspirations et besoins ascendants des composantes de ce territoire.

Je voudrais conclure sur un dernier aspect qui me paraît indispensable et qui participera à  la clarté des échanges futurs entre tous les acteurs concernés, c’est que notre assemblée puisse adopter un règlement exigeant et stable des contractualisations et que si celui-ci devait évoluer, cela soit également soumis à notre assemblée. De la même façon, je crois utile que notre assemblée puisse porter un regard global à des échéances espacées mais régulières , sur les effets du SRDADT au travers notamment de l’évaluation croisée des projets de bassins de vie. 

Vous l’aurez compris Monsieur le président, nous voyons dans cette communication une bonne anticipation du mouvement de décentralisation qui doit se poursuivre et même s’accélérer, pour autant nous pensons qu’il faut amplifier le processus démocratique parce qu’une une décision concertée est toujours une meilleure décision et il nous  faudra donc beaucoup d’ambitions. 
Je vous remercie