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Ambitions Santé 2020

Portrait Saadika Harchi

Intervention de Saadika Harchi

 

Monsieur le Président, Monsieur le directeur, mes chers collègues, depuis de nombreuses années, nous,  écologistes,  considérons  que les maladies sont directement corrélées aux modes de vie et aux conditions environnementales des citoyens.

Nous ne pouvons qu’être satisfaits lorsque à la lecture de la feuille de route de la Stratégie Nationale de Santé, on constate que nous arrivons au même diagnostic, c’est-à-dire, je cite : « […] Le niveau de revenu, le degré d’éducation , les conditions de travail, l’accès aux services de santé, et les conditions environnementales (logement, pollution, bruit…) contribuent largement à l’état de santé d’une personne », fin de citation. Nous pourrions ajouter la qualité de l’alimentation bien entendu et bien d’autres aspects encore...

Partant de ce constat de la Stratégie Nationale de Santé, au-delà du plan Ambitions Santé 2020, les politiques que nous portons au Conseil régional impactent directement ou indirectement  les conditions sociales et environnementales des populations, et donc leur état de santé. Lorsque l’on porte des politiques de transport qui favorisent des circulations douces et des transports en commun, on diminue la pollution de l’air et on favorise l’activité physique. Ce n'est pas la même chose que si on faisait le choix de soutenir des projets d’autoroutes polluantes. On voit bien que les choix que nous portons ont un impact direct sur la santé des populations. Dans le champ de l’agriculture, si l’on développe une agriculture avec moins de pesticides et de produits phytosanitaires, une agriculture qui vise à développer l’agriculture biologique, et des produits d’élevage de qualité, on impacte non seulement la santé des agriculteurs eux-mêmes mais aussi tous ceux et celles qui vont en bout de chaîne consommer ces produits.

Malheureusement l’évaluation du précédent Plan Régional Santé Environnement constate une augmentation de l’utilisation des produits phytosanitaires dans notre région. On voit bien là que les choix qui sont faits sont des choix qui ne favorisent pas la santé de nos populations. Idem pour ce qui est de la biodiversité : si on préserve la biodiversité, on participe à la santé et à l’économie de notre région et Pascal Rossler nous le dit lors de ses interventions. Lorsque nous agissons en soutien des entreprises, nous posons  des conditionnalités, qui doivent prendre en compte les conditions de travail des salariés, puisqu’on  sait maintenant que les conditions de travail des salariés ont des effets sur leur santé physique et leur santé psychique, et que la souffrance au travail est source de pathologies que personne maintenant  ne peut remettre en question.

En investissant dans des maisons pluridisciplinaires de santé, en intervenant dans des co-financements de politiques portées par des conseils généraux ou des agglomérations, des communautés de communes, ou des pays, bien sûr que les choix que nous faisons lors de nos co-financements peuvent impacter la santé des populations.

Il en est de même des actions portées dans le champ de la culture, parce que le bien-être, les moments de plaisirs artistiques partagés ont aussi un effet sur la santé psychologique. Les actions  que nous portons en matière de qualité de l’eau ou de l’air bien évidemment, et Gilles Deguet y reviendra, ainsi que le soutien aux activités sportives, l’appui à l’éducation et à la santé de nos jeunes, toutes ces actions - et je ne les citerai pas toutes - améliorent  le champ des déterminants de santé.

Si la Stratégie Nationale de Santé dit qu’il nous faut travailler dans l’intersectorialité, c'est-à-dire ensemble, de manière concertée et croisée, force est de constater que parfois les dispositifs des différentes collectivités territoriales fonctionnent de manière un peu parallèle, pas suffisamment tricotées entre elles. Il nous faut encore mieux articuler les interventions des uns et des autres au sein des politiques  que nous portons, c’est une condition d’amélioration de la santé des populations.  

Par exemple pour ce qui nous concerne, il pourrait s’agir de mieux articuler les contrats locaux de santé avec les projets de MSP (Maisons de Santé Pluridisciplinaires) et le dispositif promotion de la santé des jeunes. Et lorsque  que nous mettons en œuvre l’évaluation  de nos politiques publiques, il faudrait évaluer, par la même occasion, en quoi cette politique publique contribue à améliorer l’état de santé de la population. C’est un critère d’évaluation aujourd’hui incontournable des politiques que nous portons.

Compte tenu de toutes les politiques publiques que nous portons, bien que n’étant pas économiste, je suis prête à parier que le niveau de collectivité territoriale qui investit le plus dans des politiques qui impactent la santé est celui des Conseils régionaux.

Ce qui nous amène sans transition à la question des dépenses de santé. Nous ne pouvons que constater que les dépenses de santé de notre pays sont parmi les plus élevées, des pays de l’OCDE, et les dépenses de prévention les moins élevées des pays de l’OCDE. La France occupe une place médiocre en matière de prévention en comparaison de ses voisins européens alors que la prévention a un rôle majeur à jouer pour réduire le fort taux de mortalité et de morbidité (c'est-à-dire de maladies) évitables dans notre pays, facteurs puissants de reproduction des inégalités sociales de santé. Et ce n’est pas moi qui le dit mais la feuille de route de la Stratégie Nationale de Santé.

Seulement, aussi paradoxal que cela puisse paraitre, et bien que nous arrivions au même diagnostic, force est de constater que nous divergeons sur les décisions envisagées. Les budgets consacrés à la prévention vont une fois de plus être à la baisse  au niveau national cette année encore. Et cette décision totalement incompréhensible va se répercuter sur les budgets prévention de l’ARS, ce n’est Monsieur Damie, directeur de l’ARS ici présent, qui nous dira le contraire. Et lorsque l’on dit que les budgets prévention baissent, ce qu’on oublie de dire c’est que c’est la promotion de la santé qui sera la plus concernée par cette baisse. En effet il faut savoir que les budgets de prévention secondaires comme les dépistages eux restent constants, du coup ça diminue d’autant plus les budgets que l’ARS peut consacrer à la promotion de la santé et en particulier aux associations qui portent des projets de promotion de santé. Hors la promotion de la santé est précisément celle qui vise l’ensemble des déterminants de santé, et donne aux personnes les outils qui permettent d’être acteurs de leur santé.

Lors de mon intervention au forum régional sur la Stratégie Nationale de Santé qui a eu lieu jeudi dernier, alors que je citais le budget de 500 000 euros  par an que le Conseil consacre à la santé des jeunes, dispositif qui impacte directement plus de 20 000 jeunes sur 72 établissements chaque année, Monsieur le doyen Perrotin nous répondait que 500 000 euros c’est le coût de traitement pour un malade qu’il connait, pour une journée.

Les dépenses de soins curatifs et les dépenses hospitalières  (médicalo-centrées) sont considérables, alors que le système de soins ne participe que pour 20 % à l’état de santé de la population.  Quand allons-nous inverser la tendance et investir moins dans les soins curatifs pour nous focaliser essentiellement sur la question de la démographie médicale et nous décider à investir plus dans les budgets médico-sociaux ainsi que dans ceux de la prévention et de la promotion de la santé ? Et je veux tirer la sonnette d’alarme sur la situation du centre de santé de "l’Entraide ouvrière" à Tours, qui accueille une population en grande précarité.

Fort  heureusement,  certains Conseils régionaux ont fait le choix d’investir dans le champ de la santé, comme le fait le Conseil régional du centre  avec son  dispositif « AMBITIONS SANTE 2020 » qui nous est présenté ici.

Parmi les remarques que nous avons à exprimer sur ce dispositif, nous souhaitons en exprimer deux en particulier. Le premier concerne la question de la démographie médicale et Michelle Rivet y reviendra. Nous ne cessons de dire qu’il faudrait déployer la même énergie à régler la question de la démographie des professions paramédicales, et cela ne dépend pas que du Conseil régional.

Si l’Etat et les collectivités ne créent pas de postes infirmiers, nous pouvons toujours en former plus, on ne réglera pas pour autant la question du taux extrêmement bas d’infirmiers par habitants, qui place la région Centre parmi les dernières régions de France.

La seconde remarque concerne la non modification du cadre de référence des futures MSP. Il faudrait une obligation pour que ces MSP soient inscrits dans des contrats locaux de santé, et prévoir d’emblée 3 postes infirmiers pour un poste de médecin de secteur 1, avec une aide à l’installation de ces infirmières. Tout comme il ne peut y avoir de projet de MSP sans y inscrire le développement de la prévention et de la promotion de la santé.

Pour conclure le dispositif « AMBITIONS SANTE 2020 » nous expose à la fois le bilan des actions réalisées avec succès  et nous propose  de nouveaux objectifs. La première question que nous devrions  nous poser est de savoir si ce dispositif  contribue à répondre  aux inégalités sociales et territoriales de santé. La deuxième question est de savoir si les dépenses que nous attribuons dans le cadre de ce dispositif visent à réduire les couts qui seront à supporter demain dans le domaine de la prise en charge des soins curatifs.

Monsieur le Président, nous voterons ce rapport. 

Je vous remercie de votre attention.