Les communs désignent l’activité des communautés qui s’organisent et se régulent pour protéger et faire fructifier des ressources matérielles ou immatérielles, en marge des régimes de propriété publique ou privée. Zones urbaines transformées en jardins partagés par les habitants, savoirs versés dans l’encyclopédie Wikipedia par des millions d’internautes, cartographie OpenStreetMap nourries par les utilisateurs, savoirs traditionnels, logiciels libres, science ouverte, publications en libre accès, pédibus scolaires, système d’irrigation agricole partagé, semences libres, contenus éducatifs ouverts, échanges de savoirs, justice participative… Les initiatives fleurissent qui inventent des manières créatives et solidaires de générer, gérer et partager des ressources et les communs apparaissent comme source d’alternatives.
De nombreux éléments de la vie courante, matériels et immatériels peuvent faire l’objet de logiques de partage et définissent un espace qui échappe aux logiques de la propriété, qu’elle soit publique ou privée. Ces ressources partagées sont organisées et régulées par les communautés d’acteurs, petites ou grandes, locales ou non. Ces acteurs créent, maintiennent et/ou développent les communs dans lesquels ils s’investissent (logiciels libres, cartographie partagée, jardins urbains coopératifs…). Pour pallier à l’absence d’une gouvernance mondiale protectrice, les communs universels (eau, air, océans, spectre électro-magnétique…) sont l’objet d’une défense par les citoyens contre les formes nouvelles d’enclosures.
Le mode de gouvernance des communs a été très présent dans les pays occidentaux entre le 12ème et 18ème siècle pour la gestion des ressources naturelles et on en voit encore les réminiscences dans différents pays (ex : affouages en France). Il est encore très présent dans la gestion de terres agricoles et de systèmes d’irrigation de nombreux pays du Sud. Il fait un retour dans la pensée et dans l’action, à la faveur de deux grands facteurs : la complexité accrue des situations auxquelles nos sociétés sont confrontées et les crises systémiques à répétition qui en résultent d’une part, et l’irruption d’alternatives portées par de nouvelles communautés comme celle du numérique d’autre part.
Les transitions auxquelles nous sommes confrontés nous invitent en effet à inventer d’autres approches que le système bipolaire État/marché. De nouvelles alliances sont à construire dans lesquelles les communs permettent de renouveler l’imaginaire politique pour adapter l’action publique aux enjeux du 21ème siècle.
Les communs privilégient la valeur d’usage des ressources (l’intérêt pour les individus et les collectivités) plutôt que leur valeur d’échange (leur monétisation). Cette approche permet de penser le développement territorial, l’organisation urbaine, la relation entre producteurs et consommateurs…, contribuant ainsi à renouveler la façon dont le développement durable est aujourd’hui envisagé.
L’irruption massive du numérique dans la plupart des champs de l’activité humaine crée des situations inédites. Les réseaux facilitent l’émergence de larges communautés distribuées, susceptibles de se mobiliser pour créer et partager les savoirs (code logiciel, œuvres de l’esprit, cartes coopératives, encyclopédies ouvertes, sciences participatives…). Ces communs de la connaissance sont autant de gisements d’initiatives, de créativité et de mobilisation des individus dans un but collectif.
Communs naturels et communs de la connaissance tissent ensemble des perspectives inédites pour un renouvellement de nos modes de gouvernance et de développement.
Dans les territoires locaux (quartiers urbains et pays ruraux), de nombreux acteurs expérimentent au quotidien ces différentes façons de faire « en commun ».
La Région pourrait les aider à se rencontrer pour mutualiser leurs ressources et faire émerger des « assemblées des communs » pour donner à voir leur diversité et gérer collectivement les ressources produites par les collectifs citoyens.
Pas de « mise en commun » ni de démocratie sans la définition de territoires de proximité. A contre courant de la « réforme territoriale » relocaliser la gestion régionale, s’appuyer sur les initiatives citoyennes et sociales (quartiers populaires, entreprises solidaires, projets citoyens…) et leur mise en réseau d’une part et sur ce que peuvent offrir les régions en terme de compétence, de technicité et d’aménagement du territoire (donc de programmation avec des objectifs de long terme et d’intérêt général)