La campagne
Denis Duclos apporte son soutien à Europe Ecologie
Denis Duclos, directeur de recherche au CNRS, anthropologue, spécialiste des « grandes peurs collectives », collaborateur du monde diplomatique.
Je soutiens de tout cœur la liste Europe-Ecologie Région Limousin conduite par Ghislaine Jeannot-Pagès. Il est clair que les écologistes sont les seuls à proposer une politique d’avenir conséquente, s’appuyant sur ce que nous savons maintenant des limites de « charge » de notre monde vivant. Ils ont pris en compte avant bien d’autres, et de façon résolue, ce que disait le grand économiste Nicholas Georgescu-Roegen à l’encontre des économistes prébendés ou aveuglés : à savoir que si le but de l’économie est de produire « un flux de joie de vivre », ce n’était certainement pas la croissance forcenée produisant surtout de la pollution et des déchets non recyclables qui permettrait de nous en assurer, et a fortiori de le garantir pour nos enfants. A la faveur des crises, les mentalités changent, les gens sont prêts, pour nombre d’entre eux, à s’engager dans un renouvellement de leurs façons de vivre ; à moins se laisser prendre aux mirages de la compétition sociale et économique ; à faire vivre leurs marchés et emplois locaux et régionaux plutôt que de subir la loi de la « globalisation », finalement spéculative et destructrice des activités, et tout spécialement de celles qui prétendent à une légitime autonomie.
Il me semble qu’à la faveur de cette prise de conscience atteignant ceux qui ont cru le plus longtemps aux miracles de l’économie fondée sur la dépense énergétique maximale, il convient de se tourner vers ceux et celles qui, depuis des décennies, et en dépit de l’incompréhension et du mépris, ont tenu bon leur cap : celui de la simple raison, prenant en compte l’ensemble des conditions d’existence et non pas seulement les urgences de la logique du profit. Il est temps que les écologistes s’imposent comme une force désormais incontournable, ne serait-ce que parce qu’il en va de la continuation de la vie démocratique : le chercheur en sciences sociales que je suis est trop averti du fait que, lorsque la crise s’aggrave sans espoir de restauration, lorsque la classe politique se trouve disqualifiée après trop d’erreurs et de promesses vaines, les risques sont grands de voir le peuple se tourner vers des solutions autoritaires, démagogiques et arrogantes. Pour la recherche elle-même, c’est-à-dire la liberté de comprendre ce qui se passe et de découvrir d’autres possibles, nous vivons dès aujourd’hui un terrible appesantissement, un esprit de restriction et de refus, des amorces de « chasses aux sorcières » qui étouffent la pensée et l’échange scientifiques.
Plus que jamais les chercheurs, qui ont notablement contribué au diagnostic sur la santé de nos sociétés, ont besoin de respirer, de pouvoir librement étudier, imaginer, proposer hors des querelles académiques vaines sur lesquelles les rabattent des politiques étroites, voir haineuses.
Plus que jamais la pensée a besoin de l’écologie politique comme projet libérateur, tout comme l’écologie ne peut se concevoir sans la réflexion, sans les savoirs et leur élan renouvelé.
Denis Duclos