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La campagne

Après Copenhague : le temps des régions ?

17/12/2009

Par Eric Loiselet, tête de liste Europe Ecologie en Champagne-Ardenne, porte parole de Convergence-s

En 1992, les 173 Etats signataires du programme Action 21, adopté à l’issue du Sommet de la Terre à Rio consacraient le rôle clé des collectivités locales dans la transformation à opérer de nos modes de production et de consommation : « Les problèmes abordés dans Action 21 qui procèdent des activités locales sont si nombreux que la participation et la coopération des collectivités à ce niveau seront un facteur déterminant pour atteindre les objectifs du programme. Ce sont les collectivités locales qui construisent, exploitent et entretiennent les infrastructures économiques, sociales et environnementales. Elles jouent, au niveau administratif le plus proche de la population, un rôle essentiel dans l'éducation, la mobilisation et la prise en compte des vues du public en faveur d'un développement durable. » . Il prévoyait même qu’entre 1992 et 1996 « la plupart des collectivités locales de tous les pays devraient mettre en place un mécanisme de consultation de la population et parvenir à un consensus sur un programme Action 21 à l'échelon de la collectivité ». Il n’en a rien été.
Dès 1997, la priorité climatique, à l’occasion de la signature du Protocole de Kyoto, est venue mettre en perspective les intentions de Rio. En 2002, le Sommet de la Terre à Johannesburg met en évidence les carences, les renoncements, les atermoiements des Etats signataires du programme Action 21 de Rio. Les paroles de Jacques Chirac, au nom de la France, résonnent encore dans nos têtes « notre maison brûle, et nous regardons ailleurs », terrible constat du Chef d’un des principaux Etats de la planète, membre du Conseil de « Sécurité » des Nations Unies. Johannesburg a célébré les vertus supposées des entreprises transnationales, en remplacement des carences des Etats. Presque huit ans après, le risque d’un accord minimal à Copenhague ravive la cruauté du constat et souligne, malgré la mobilisation de certains Etats et de certaines entreprises, les carences collectives, dévoilant le rôle essentiel que peuvent être appelées à jouer les collectivités locales.
L’évidence affirmée à Rio s’impose à nouveau : les collectivités territoriales sont en première ligne pour atténuer le changement climatique en réponse à nos engagements internationaux, souscrits ou non, et pour adapter les territoires en réponse à nos besoins domestiques. Yvo de Boer, secrétaire exécutif de la Convention-Cadre des Nations unies sur les Changements Climatiques, remarquait au sommet de Poznan en décembre 2008 que « 50 à 80% des actions concrètes de réduction des émissions de gaz à effet de serre et près de 100% des actions d'adaptation sont conduites au niveau infranational ».
Il serait pertinent que l’accord final du Sommet de Copenhague intègre pleinement cette réalité et que les pouvoirs locaux ou infra gouvernementaux soient désormais associés à la nécessaire gouvernance mondiale de l’atténuation et de l’adaptation au changement climatique. Mais, quel que soit le résultat de Copenhague, de toute évidence les pouvoirs locaux poursuivront leur effort.

A trois mois des élections régionales françaises, il importe d’envisager les perspectives à soumettre à nos concitoyens. Si ceux-ci les valident, elles constitueront l’architecture de l’action des éco régions françaises pour la prochaine mandature :
• fixer à 2020 l’échéance d’une action de réduction à hauteur de 40% des émissions de gaz à effet de serre sur le territoire des Régions par rapport à 1990. Ceci constitue un changement de perspective en regard du facteur 4 à horizon 2050 qui constituait l’objectif de la dizaine de plans climat ou énergie climat adoptés par des Régions françaises à ce jour. Même pour celles qui ont déjà engagé l’action, une accélération s’impose, à travers une mise à jour de leur plan existant dès 2010 à travers un plan climat de 2ème génération ;
• libeller leurs budgets en équivalent tonnes de CO², afin de mesurer l’impact des décisions politiques sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans la Région ;
• engager une action déterminée de conversion écologique de l’économie régionale par :
o la promotion de la sobriété énergétique et des énergies renouvelables au bénéfice des ménages aux revenus modestes et moyens ;
o la maîtrise de l'urbanisme et la diversification de l'offre de transports publics ;
o la préservation des ressources naturelles et la protection de la biodiversité ;
o la conjugaison "environnement et santé" ;
o la conduite de politiques locales et territoriales écologiquement responsables en mettant en œuvre une éco conditionnalité renforcée des aides régionales.
• s’engager dans les partenariats nord-sud : l’action des régions dans le domaine de la coopération décentralisée peut trouver un sens et une portée nouvelle à travers la « coopération climatique décentralisée ».
Véritables animateurs territoriaux, les Conseils Régionaux, en relation avec l’Etat et l’ADEME, pourraient mettre en place et piloter des « conférences climatiques régionales », instances régionales de concertation et de coordination des actions engagées par les collectivités territoriales en matière d’atténuation et d’adaptation au changement climatique sur le territoire régional. Il appartiendra aux nouveaux exécutifs régionaux de proposer la mise en place d’un mode de gouvernance à 5, inspiré de celui du Grenelle de l’environnement, de l’intégration de l’action climatique des acteurs de la région, qu’ils soient territoriaux, économiques, sociaux, associatifs et étatiques.
L’action des futurs exécutifs régionaux serait grandement facilité si le gouvernement, à travers le projet de loi Grenelle 2 en cours de discussion à l’Assemblée nationale et la réforme annoncée des collectivités territoriales introduisaient enfin la cohérence politico administrative qui manque cruellement aujourd’hui. Pour assurer la mutation des logiques d’aménagement et d’équipement que requiert un objectif de réduction drastique des émissions de GES sur nos territoires, il est par exemple nécessaire de répartir clairement la responsabilité de l’offre de transport entre les régions, pour l’interurbain et les réseaux ruraux, et les intercommunalités pour les transports de proximité. Le projet de loi Grenelle va rendre obligatoire la réalisation de plans climat énergie territoriaux pour les collectivités de plus de 50 000 habitants. Mais il ne prévoit pas les modalités de l’articulation des PCET des collectivités d’une même Région.
Face à la triple urgence climatique, économique et sociale, il importe, pour la prochaine mandature que les instruments aux mains des régions : schémas de développement économique (SRDE), schémas d’aménagement et de développement durable du territoire (SRADDT), schémas des infrastructures et des transports (SRIT) deviennent opposables aux collectivités infra régionales. De même le Plan Climat Energie Régional, devenu obligatoire, devrait être, lui aussi, opposable. De la sorte, les Plans Climat Energie Territoriaux qui seront adoptés par les collectivités infrarégionales, seraient élaborés en cohérence avec le plan régional préalablement adopté par l’Assemblée régionale. C’est une condition nécessaire à l’efficacité des politiques publiques territoriales. Sans cette opposabilité, les actions des régions risquent de rester des vœux pieux et la maison continuera, n’en doutons pas, de brûler.
Le gouvernement est au pied du mur : au-delà des intentions affichées à Copenhague, le moment est venu, en perspective du renouvellement des Conseils régionaux de mettre en cohérence les intentions et les actes. Le gouvernement, à travers le projet de loi Grenelle 2 et la réforme des collectivités territoriales, a le devoir de concrétiser le rôle aujourd’hui implicite de chef de file des régions dans la nécessaire mutation territoriale qu’appelle l’atténuation et l’adaptation au changement climatique. La fenêtre est étroite, mais les Français, eux, sont prêts à cela. Pour le pouvoir d’Etat, le choix est aujourd’hui entre continuer à rogner les prérogatives des pouvoirs locaux qui peuvent lui apparaître comme autant de contre pouvoir ou bien promouvoir une vision solidaire de l’action de nos collectivités et de l’Etat. Le Président de la République et le Ministre de l’Ecologie, au retour de Copenhague, et cela quel que soit le résultat du Sommet mondial, ont rendez vous avec les Français : sauront ils confirmer le rôle et les modalités du chef de filat des Régions françaises dans la lutte contre le changement climatique ? Si tel n’était pas le cas, il sera nécessaire de compter sur le vote des françaises et des français en mars prochain, puis sur la mobilisation de leurs élus pour imposer ce qui n’aura pas été rendu possible par l’action gouvernementale.

Eric Loiselet

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