Marie-Monique Robin : « Au nom du Président de la République je vous fais chevalière de la Légion d’Honneur… »

Yannick Jadot sur la tribune dans la grange entouré de Marie-Monique Robin, Dominique Méda et de Sylvain et Brigitte Fresneau.

Yannick Jadot sur la tribune dans la grange entouré de Marie-Monique Robin, Dominique Méda et de Sylvain et Brigitte Fresneau.

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Samedi se déroulait au siège de l’Acipa, au cœur du bocage de Notre-Dame-Des-Landes la remise de la Légion d’Honneur à Marie-Monique Robin, journaliste documentariste engagée, auteure notamment de « Le monde selon Monsanto » « Les pirates du vivant » et très récemment du film co-produit avec Arté « Les Moissons du futur ».

Une cérémonie haute en symbole dans ce haut lieu de la lutte contre le second aéroport nantais combattu par toute une population de paysans qui a reçu le renfort de jeunes en quête d’un autre monde. Ils ont investi la ZAD, officiellement Zone d’Aménagement Différé (depuis 74 !), devenue pour eux le symbole d’une Zone À Défendre.

Yannick Jadot était invité à prendre la parole pour placer l’évènement dans son contexte si particulier mais reprenons le récit écrit à chaud par l’un des spectateurs/acteurs de la cérémonie, militant Europe Écologie Les Verts à Parthenay en Gâtine, berceau de la récipiendaire.

« Au nom du Président de la République… »

Samedi 8 juin 12 H30.

Au lieu dit « La Vache-Rit », commune de Notre Dame des Landes (44), la route venant de Vigneux est soudain envahie par une foule décontractée qui patiente, bavarde et refait le monde depuis une heure dans la cour de la ferme abandonnée qui, ce jour là, est plus vivante que jamais.

L’autobus retardé pendant une heure sur une autoroute sensée faire gagner du temps quoique n’oubliant jamais l’arrêt péage approche . Le silence se fait, la porte s’ouvre… Deux femmes surprises mais aux anges descendent les premières… Applaudissements nourris…

Et toute la troupe de foncer à la suite des organisateurs et leurs invités vers le grand hangar où une estrade et un bar ont remplacé les vaches, la paille et le foin.

La foule se presse, debout, sans prendre garde à un papy cravaté et une mamie endimanchée qui réussissent à se faufiler et se faire offrir un siège au tout premier rang alors que d’autres débordent dans la cour.

Pour eux, pour tous, ça sent l’événement d’importance…

Trois brefs discours de bienvenue et de satisfaction d’accueillir l’événement annoncent une étape symbolique forte dans une lutte entamée depuis 1974 au point que ce sont les enfants de ceux qui ont commencé à résister qui sont là aujourd’hui pour poursuivre la lutte pour la dignité et le travail de la terre que leurs ancêtres ont fait si belle.

Ici, un Fresneau reprendra toujours le flambeau !…

Le député européen Yannick Jadot, vite fait, confirme toute l’importance symbolique de l’événement, rappelle les espoirs de victoire et la nécessité de ne rien lâcher, lève la voix et le poing, c’est quasi ambiance meeting, mais non ! C’est pas pour convaincre, c’est parce qu’il est content de la fête en cours ! Visiblement ici, il est à domicile!…

Suit un long et très beau et discours de circonstance où se mêlent les références universitaires, les connivences et engagements militants, les déceptions et espoirs politiques, l’admiration de la personnalité  invitée et de son œuvre. Cela permet à chacun de se dire qu’il a bien fait de venir à ce moment d’importance.

Dominique Méda, sociologue et philosophe officie avec talent et conviction : «…Comme Marie-Monique, je voudrais que nous soyons exemplaires dans nos paroles et dans nos actes pour montrer combien la tempérance, la mesure, la capacité à s’auto-limiter et donc finalement la raison sont de notre côté…» ; Pas un signe d’agacement, une écoute totale, énièmes applaudissements nourris :vraiment dans cette grange, il se passe du pas banal…

Le texte du discours de Dominique Méda.

Souvent le ton change, deux femmes émues se font face. Elles en ont pourtant déjà connu, avec leur cinquantaine alerte, de ces instants forts qui vous forgent le caractère et l’assurance.

« Au nom du Président de la République …»… quelques légers sifflements sont vite éteints sous le regard de Dominique Méda et remplacés par un grand silence digne de l’instant.

« Au nom du Président de la République et en vertu des pouvoirs qui me sont conférés, je vous nomme, Madame Marie Monique ROBIN, chevalière dans l’ordre de la Légion d’Honneur »

Agrafage de l’insigne, embrassades émues, sourires éclatants, ovations du public…

Derrière les deux officières de la Légion d’Honneur flamboie un énorme logo de l’ACIPA avec son avion et son slogan « Notre-Dame-Des-Landes AÉROPORT NON ! »

C’était improbable, c’est fait !

La rencontre entre les honneurs de La République délivrés officiellement et ce que La France fabrique de résistance à l’ordre établi avec des femmes et des hommes qui ne lâchent rien.

Puis on change d’atmosphère…

Marie Monique ROBIN rappelle les circonstances de sa nomination par Delphine BATHO, ministre de l’environnement et du développement durable et de l’énergie, de ses hésitations à recevoir cet hommage de la République, de la demande de ses amis d’y accéder et du choix de venir ici à Notre Dame des Landes, symbole actuel des luttes ayant rempli « les années de service au titre desquelles la Légion d’Honneur lui est attribuée…» et se fend d’un tout aussi beau discours, tout aussi engagé…

Le texte du discours de remerciement de Marie-Monique Robin.

On croyait avoir tout vu et entendu. Mais comme prévu, Marie Monique Robin a invité les soutiens de toujours, quelques amis et sa famille pour partager l’honneur et le plaisir qui lui sont faits.

Séquence émotion et tabac garanti ! Papa Joël ROBIN* n’a pas sorti que la cravate pour accompagner Maman en robe du dimanche voir leur grande fille se faire honorer ! En discours sans papier, le paysan militant de la JAC il s’y connait… Et de la poche il sort la chanson composée tout exprès… Une belle chanson de terre et de vie… La grange est chavirée et le barde de l’ACIPA n’a plus qu’à conclure avec l’hymne du crû !


Marie-Monique Robin 8 juin 2013 La chanson de… par JeanMichelBraud

Comme on est chez les bretons et qu’il savent qu’il y a toujours une grosse marge entre réservations et nombre nécessaires de collations, tout le monde passe à l’apéro géant suivi des tablées de haricots-saucises-merguez-fromages-gateaux-vin-blanc-vin rouge-cidre au choix. Ils appellent ça un pique-nique sur le bon de réservation !

Et ça rebavarde dans les coins…

Des zadistes papotent avec qui veut. L’un d’eux se définissant comme SDF de la ZAD pour mieux souligner son éloignement de toute conventions confie « je pensais pas, mais ce que j’ai vu et entendu, ça m’a tiré des larmes… »

Il est 15h30, il fait beau, avec la copine et les trois copains venus du Poitou, on va faire un bout de causette 2 km plus loin à La Chat-Teigne et constater que vraiment pour déloger la ZAD les deux pages de publi-reportage du Presse Océan pro-aéroport du jour avec annonce par le préfet de reprise des travaux en novembre 2013 paraissent totalement incongrues !

Y’a pas un ou deux petits trucs qui ont cloché dans ce bel événement républicain ?

Ah, mais si !

Aucune télé officielle ou radio à l’horizon ! Il parait que Presse Océan en causera lundi. Ouest France, on sait pas…

Aucun élu du coin non plus sauf deux sénateurs écologistes notoires : Ronan Dantec et Joël Labbé.

Ceux de l’ACIPA ont souri, râlé un peu mais pas étonnés, commenté… Il paraît que pour les maires, conseillers généraux ou régionaux du coin qui d’habitude ne ratent pas une Légion d’Honneur et le pot qui suit, le téléphone aurait sonné…au nom du président de la République ?

Jean COLLON

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