Rencontre avec la Caravane « Commerce au Climat » au Parlement européen le 7 décembre
La Caravane « Commerce au Climat » est une délégation de représentants d’associations environnementales, d’organisations paysannes, de groupements indigènes, d’associations de femmes, des acteurs de luttes locales face aux impacts de l’activité des multinationales (industries extractives en particulier).venant d’Afrique, d’Amérique latine, d’Asie et d’Océanie, accompagnés d’une dizaine de représentants d’organisations européennes et nord-américaines.
Partis de Genève le 2 décembre au lendemain de la Conférence ministérielle de l’OMC, ils vont rallier Copenhague et participer au Sommet des Nations unies sur le changement climatique. Deux routes sont prévues : l’une par l’ouest, via Dijon, Paris, Lille et Bruxelles, l’autre par l’est, via Berlin, et Hambourg.
Nous avons eu la chance de recevoir 3 membres de cette délégation au Parlement européen hier 7 décembre, et d’écouter leurs positions sur l’importance des liens existant entre les négociations commerciales et climatiques et les impacts directs de celles-ci sur leurs modes de vie.
-Ainsi, Mary Lou Malig, de l’association « Focus on the Gobal South », des Philippines a souligné à l’aide d’exemples concrets que le libre-échange et le commerce n’étaient pas une solution à la crise climatique, et qu’il était important d’exiger une solution alternative pour répondre à la crise écologique. Elle a martelé que le cycle de Doha, censé libéraliser les échanges, devait impérativement s’arrêter étant donné qu’il n’a fait qu’aggraver les échanges entre pays riches et pays pauvres, baisser les subventions agricoles, et ne présentait en aucun cas de solutions écologiques viables pour lutter contre la crise climatique.
-Diego Cardona, de Global Forest Coalition, en Colombie, s’est penché sur la question des peuples indigènes, en particulier au Panama et en Colombie, où les normes de l’OIT (Organisation internationale du Travail) ne sont pas respectées.
Les peuples indigènes et autochtones n’ont en effet aucune reconnaissance internationale, en particulier à Copenhague, où ils n’ont même pas le droit à une réelle participation, alors qu’ils sont les premières victimes du réchauffement et que tout se déroule sur leur territoire! Le Protocole de Kyoto mettait en place des normes sur les forêts, mais ne distinguait pas les plantations (eucalyptus, huile de palme) des forêts primaires, ce qui a conduit à une véritable exploitation au détriment des peuples, et à un déplacement de communautés. Les demandes de la Caravane sont claires : faire en sorte que la lutte contre le réchauffement climatique ne dépende plus du marché, trouver de vraies solutions à la crise climatique, et reconnaître la dette historique des pays du Nord vis-à-vis du Sud (en particulier au niveau des transferts de technologie et des droits de propriété intellectuelle).
-Enfin Riza Damanik, de Fisherfolk, Indonésie / Philippines a raconté comment les Philippines avaient subi les pires catastrophes naturelles ces dernières années. Depuis 2003, le pays a subi deux super typhons détruisant les cultures, des pluies torrentielles, et des glissements de terrains qui ont emporté des provinces entières. Le membre de la Caravane a souligné que c’était les pauvres qui souffraient le plus dans le pays. Le gouvernement philippin persiste à penser que la solution à la crise est le libre échange, mais étant donné que les accords de libre échange de l’ASEAN (Association des nations de l’Asie du Sud-Est) ne profitent qu’aux industriels, le pays est en bien mauvaise posture.
Il a également abordé le thème des agrocarburants, qui, aussi bien en Amérique du Sud qu’en Asie du Sud, mettent en péril l’agriculture traditionnelle et empêchent les pays du Sud de s’adapter durablement au changement climatique.
Cette rencontre, qui a réuni des membres de différents groupes politiques, a permis de mieux comprendre et de faire partager les analyses et propositions de ces représentants des pays du Sud. Les membres de la Caravane vont maintenant aller à Copenhague pour porter leur message au niveau international, afin d’exprimer leurs préoccupations concernant le respect des droits sociaux et environnementaux des populations du Sud et l’inadéquation des réponses basées sur le marché et les solutions techniques (systèmes de crédits d’émissions, OGM, agro-carburants, puits carbone…) pour répondre à la crise écologique.