Copenhague, la souffrance de « l’autre Sud »
Le dénouement des négociations internationales sur le climat approche. Dans deux semaines, le Sommet de Copenhague touchera à sa fin. On pourra alors répondre à la question : notre planète a-t-elle encore une chance d’éviter un réchauffement de plus de 2°C catastrophique ? On peut légitimement espérer que oui. Mais on assistera également à un exercice de communication de la part de tous les pays, que ce soit pour nous vendre un accord forcément historique ou pour désigner les boucs émissaires d’un échec encore possible.
Cet exercice de communication a déjà commencé en France, où l’Europe est présentée comme le leader incontesté des négociations internationales. Mais son leadership international sur le climat est en panne depuis des mois si ce n’est des années. Et la France n’est pas étrangère à cela.
S’il faut trouver un leadership, allons voir du côté des grands pays émergents. Fini le temps où ces derniers considéraient le changement climatique comme le problème des pays riches. Tous sont prêts à s’engager à la hauteur de leurs responsabilités. L’Afrique du Sud souhaite inverser la croissance de ses émissions avant 2025. Le Brésil les réduire de 40% par rapport aux projections d’ici à 2020. La Chine diviser par deux l’intensité carbone de son économie : selon l’Agence Internationale de l’Energie, cela représenterait un quart des efforts nécessaires au niveau mondial. Tous ces engagements seront nationaux, mais les grands émergents accepteront de facto un droit de regard international, en communiquant chaque année à l’ONU le bilan de leurs émissions, les mesures mises en œuvre pour les réduire et leur efficacité, et leurs prévisions à moyen et long terme.
Les grands émergents font le boulot. Ce n’est malheureusement pas le cas de la majorité des pays riches. Ni des Américains, malgré un retournement politique impressionnant qui devrait les conduire à réduire de près de 20% leurs émissions en une décennie. Ni des Européens qui essayent de faire croire à la communauté internationale qu’une réduction de ses émissions de 20% d’ici à 2020 par rapport à 1990 – soit moins de 10% par rapport à aujourd’hui – constitue un changement de paradigme énergétique.
Pire : les pays industrialisés dans leur ensemble n’ont fait aucune proposition sérieuse pour aider financièrement les pays du Sud à faire face à la crise climatique. Si le Sud des grands émergents peut désormais agir sans être aidé à 100% par le Nord, il y a un autre Sud. Celui des pays les plus pauvres qui a besoin de dizaines de milliards d’euros par an pour s’adapter aux conséquences inéluctables du réchauffement climatique, qui tue déjà 300.000 de ses citoyens chaque année et en force des dizaines de millions à se déplacer. Mais avant de s’engager à les aider, avant de donner ne serait-ce qu’une idée du montant qu’elle est prête à leur consacrer, la France – défenseur autoproclamée de ce Sud qui souffre malgré la baisse continue de son aide publique au développement – attend de voir ce que les grands émergents et les Etats-Unis vont mettre sur la table des négociations. A croire qu’ils n’y ont rien mis. A croire qu’un leader se doit d’attendre que les autres avancent. Pendant ce temps, l’ « autre Sud » souffre.
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