3.5. Manger bio et local : une gouvernance alimentaire pour Caen et son agglomération
L’affaire des lasagnes de cheval nous a rappelé la réalité des systèmes alimentaires mondialisés : on prépare les plats comme on assemble les ordinateurs. Les ingrédients, comme les pièces détachées, suivent des circuits passant par des sous-traitants du monde entier pour atterrir sur les rayons des hypermarchés. Ce système alimentaire global ne profite pas au consommateur, mais aux grands groupes qui contrôlent la chaîne alimentaire, de la production à la distribution : 10 groupes contrôlent l’écoulement de 40% de la totalité des produits alimentaires consommés en Europe, et le prix payé en bout de chaîne par le consommateur a augmenté ces dernières décennies alors que le prix payé au producteur a fortement baissé, conduisant 25% des exploitations en France à la disparition en une décennie.
Autour de Caen, cette réalité est palpable : les terres agricoles reculent au profit des grandes surfaces et les fermes continuent de disparaître. La question de la transmission des fermes se pose de manière particulièrement brutale : à l’échelle de l’agglomération, près de la moitié des exploitations concernées n’ont pas de successeur connu, représentant le tiers de la surface agricole utile du territoire. Dans certaines communes, la question du remplacement constitue un véritable enjeu puisque 100% des exploitations n’ont pas de successeur connu. Se pose donc la question de la pérennité de l’activité sur le territoire. Pourtant, notre ville et notre agglomération peuvent orienter leurs actions pour maintenir l’emploi paysan et développer une autre agriculture, biologique, paysanne, et sans OGM, en s’appuyant sur une demande croissante en produits locaux.
Nos objectifs
Quelles actions fortes pour restaurer la capacité du citoyen à influer sur l’orientation des filières alimentaires, pour garantir l’autonomie des producteurs, et sauver la biodiversité locale ? Quelles marges de manœuvre au travers des documents d’urbanisme pour soutenir et accompagner l’agriculture périurbaine ? Comment exploiter le levier de la restauration collective et des marchés publics pour offrir des débouchés aux producteurs bios et locaux ? Quelle gouvernance imaginer à l’échelle de l’agglomération pour garantir à tous une alimentation saine et locale ?
Nos engagements
Nourrir la ville en filières courtes
• Créer un observatoire du foncier agricole, afin de se doter, au-delà des logiques de préservation d’espaces agricoles dans les SCOT (Schéma de cohérence territoriale) et les PLU (Plans locaux d’urbanisme), d’une stratégie complète de soutien à la transmission des fermes, et, le cas échéant, à l’installation et à l’accompagnement des projets périurbains en agriculture biologique, paysanne ou/et durable.
• Accompagner la conversion à l’agriculture biologique dans les zones de captage d’eau potable, en entraînant ensuite l’ensemble de la filière, comme cela a été fait dans d’autres villes (Lons-le-Saunier, Munich…).
• Elargir l’accès à une alimentation issue d’une filière courte de qualité par une offre locale renforcée et diversifiée.
• Installer une Légumerie de Caen-la-Mer, chaînon manquant des filières paysannes, à la fois atelier de transformation et plateforme logistique.
• Associer la question alimentaire à l’Economie sociale et solidaire : les structures porteuses de circuits courts alimentaires émergents ont toute leur place dans une future pépinière d’entreprises de l’ESS. L’accueil dans cette pépinière donnera droit à un « coup de pousse », sous la forme d’une garantie de la Ville ou de l’Agglomération.
• Répondre à la difficulté de structurer les filières locales en prenant en compte la dimension associative de beaucoup d’initiatives ainsi que leur complémentarité avec le tissu encore fragile de l’Économie Sociale et Solidaire.
• Créer un marché couvert permanent, des « halles bio et paysannes » donnant la priorité aux producteurs locaux.
• Renforcer l’approvisionnement bio et local pour la restauration collective.
• Former les cuisiniers de la restauration collective à la préparation de repas valorisant les protéines végétales (en particulier grâce à des repas végétariens hebdomadaires) et les produits bio locaux.
• Lutter contre le gaspillage en ré-employant les surplus de la restauration collective dans des « cuisines de quartier », tout en favorisant le lien entre les générations autour des pratiques culinaires.
• Soutenir le dernier kilomètre de livraison à vélo des produits frais.
Répondre à l’urgence alimentaire
• Viser une équité et une cohésion sociales dans l’accès alimentaire. Faire du « manger local » un point de ralliement des habitants de toutes conditions.
• Créer une « carte légumes » pour l’accès des populations bénéficiaires des minima sociaux à des produits de qualité issus d’activités maraîchères respectueuses de l’environnement.
• Soutenir les épiceries solidaires de quartier et les intégrer dans les filières locales.
Auto-produire, cultiver en ville
• Créer une ferme pédagogique municipale à vocation régionale sur la Presqu’Île, en lien avec le futur écoquartier, pour diffuser les savoirs paysans et agroécologiques auprès des professionnels et du grand public. Cette ferme sera également un haut lieu de la biodiversité cultivée, Maison des semences et jardin d’insertion.
• Favoriser l’agriculture urbaine sous toutes ses formes : jardins partagés, jardins familiaux, bacs de maraîchage, occupation des friches, végétalisation des parcs, toitures, façades… Mettre en place une subvention « main verte » pour soutenir la mise en place de bacs à jardinage dans les co-propriétés.
• Installer des potagers-écoles, où tous les habitants peuvent apprendre à cultiver leur jardin. Expérimentation à mettre en oeuvre sur le Pôle Environnement Desnos.
• Encourager les activités périscolaires autour du thème du jardinage et de l’alimentation (potagers dans les écoles).