Session du 12 Avril 2010 – Débat d’Orientation Budgétaire

Intervention de Christophe Porquier

Monsieur le Président, Monsieur le Président du CESR, Chers collègues, nous voici arrivés au débat d’orientation budgétaire 2010.

Bien entendu, ce débat, et ce budget que nous étudierons dans deux jours, il aurait pu relever en toute logique de la précédente mandature, et c’est à votre initiative, Monsieur le Président que son examen a été reporté à l’immédiat après-élection.

Nous en prenons acte aujourd’hui, nous pouvons d’ores et nous satisfaire des éléments positifs et encourageants qui sont inclus dans cette orientation qui est celle de l’année et en bonne part celle de la mandature.

D’abord pour dire qu’il apparaît effectivement essentiel d’engager la région Picardie dans la voie d’un nouveau mode de développement, celui d’une éco-région solidaire.

Depuis longtemps, notre région cumule des indicateurs inquiétants qui reflètent ses difficultés et tous les progrès qui restent à effectuer pour améliorer le niveau de formation, la santé, la qualité de vie des Picardes et des Picards.

Face à ces défis, pendant longtemps, les politiques en matière d’environnement ont été vécues comme des suppléments d’âme dans des programmes qui devaient d’abord se concentrer sur des sujets vécus comme distincts et prioritaires, comme les questions économiques et sociales.

Nous sommes arrivés à l’heure où ces politiques doivent être conçues comme intégrées et transversales. L’écologie n’est pas opposée à l’économie pas plus que ne le seraient les questions sociales ou culturelles. Tout ceci procède d’un mode de développement cohérent qui peut être créateur d’emplois. C’est l’enjeu de l’éco-développement, que nous allons mettre en œuvre demain dans les secteurs de l’énergie, des transports, du bâtiment, de l’alimentation, du tourisme, de la protection de nature ou de la santé.

Est-ce que l’Etat va nous y aider ? Rien ne semble l’indiquer. Après des engagements pris de façon encourageante avec le Grenelle de l’environnement et ses traductions législatives, voici venu le temps des grandes reculades.

A la rivière la fiscalité écologique, déjà bien mal embouchée et mal conçue, mais qui pouvait être l’amorce d’une réflexion sur la limitation des émissions les plus polluantes, au moment même où la taxe professionnelle était supprimée sans contrepartie. Michel Rocard a eu raison de signifier qu’il s’agissait d’un recul sans précédent dont les générations à venir pourraient nous accuser comme d’un crime contre l’humanité. En matière fiscale, seules les défiscalisations injustes progressent.

A la rivière les énergies renouvelables, qui se voient attaquées de façon systématique par le Président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, M. Patrick Ollier, qui a encore une fois pris pour cible l’énergie éolienne dans un récent rapport dont la partialité a été soulignée.

A la rivière les engagements pris à l’occasion du Grenelle, qui ont provoqué des démissions médiatisées, mais où il faut surtout lire les reculs en matière de politique de transports, d’urbanisme et de bâtiment qui se profilent dans la loi Grenelle II actuellement en examen au parlement, par rapport à ce qui avait été acté avec les associations.

Pourtant, que de belles paroles tenues par M. Sarkozy au moment où il signait le Pacte de Nicolas Hulot, en 2007.

Les paroles politiques peuvent avoir du sens, certes, mais elles n’ont de valeur que si elles se transforment en actes, qu’ils soient législatifs et budgétaires. En tant qu’écologistes, c’est ce à quoi nous serons vigilants avant tout.

A l’évidence, les voies d’un développement soutenable, écologique, solidaire, démocratique, dessinant un avenir pour nos concitoyens, n’ont pas encore pénétré tous les esprits.

Aussi, nous nous félicitons de voir cet objectif majeur être pleinement intégré ici-même, en Picardie, aux orientations budgétaires qui sont celles de la majorité.

Parce que la Picardie a déjà payé un lourd tribut aux délocalisations, avec les fermetures successives de sites industriels, dont les Sodimatex illustrent la détresse encore aujourd’hui, il devient vital pour les hommes et les femmes qui habitent ici de trouver demain des emplois locaux et non délocalisables.

Je souhaite que les choix que nous ferons permettent d’engager dans notre région ce cycle vertueux qui est celui de la transformation écologique de notre économie et de nos modes de vie.

Des outils existent déjà qui peuvent permettre à notre région de marier écologie et économie :
– Le Codem qui doit permettre d’assurer des transferts de technologie sur les eco-matériaux dans le bâtiment

– Le Fond Régional pour la maîtrise de l’énergie, qui permet de prévenir les impacts environnementaux des aménagements, pour diminuer la consommation énergétique et la production de gaz à effet de serre, ou qui a permis d’engager la création de formations autour des énergies renouvelables dans les CFA

– C’est le pôle de compétitivité i-trans permettant à des chercheurs et des entreprises locales de se positionner sur les systèmes embarqués des trains de demain, permettant de réduire leur consommation électrique

D’autres dispositifs demandent à être amendés ou développés pour renforcer des filières locales.

C’est le sens de la création d’un outil économique (une SEM) permettant de retirer des bénéfices de la production locale d’énergie et de développer ici la recherche, la formation et l’emploi dans ce secteur, alors que notre région accueille des projets nombreux de production d’énergie renouvelable sur terre et sur mer.

C’est le sens également des circuits courts, de la prévention sanitaire et de l’économie sociale et solidaire que nous entendons intégrer de façon transversale dans les dispositifs qu’il s’agit désormais de mettre en œuvre et de valoriser.

Ces politiques, elles trouvent leur cohérence dans un territoire.

Là où nous pouvons agir pour planter des haies, nous améliorons le paysage, nous préservons la qualité de l’eau et la biodiversité, nous créons un débouché pour la filière bois-énergie, en créant de la formation et de l’emploi.

Là où nous isolons des bâtiments, nous pouvons aider les ménages à alléger les factures énergétiques, en agissant sur les enjeux climatiques et économiques, là encore en créant de la formation et de l’emploi.

Ainsi, Le Prêt à Taux zéro a eu un effet de levier important de 1 à 10 : 1 euro investi par la région pour financer des emprunts a entrainé 10 euros de travaux dans l’isolation des bâtiments. C’est l’une des réussites du précédent mandat. Nous devons envisager demain les nouveaux dispositifs qui vont permettre de conserver une action d’envergure en ciblant les publics qui en ont le plus besoin afin de les aider.

C’est cela la transversalité qui nous permettra de faire d’une pierre deux coups ou trois coups sur les aspects environnementaux, sociaux, économiques, qui sont les trois piliers d’un développement soutenable.

Nous avons défendu des orientations distinctes un premier temps pendant la campagne électorale. Nous avons trouvé la voie d’un compromis qui est un compromis fécond et volontaire pour cette région, et il est d’autant plus nécessaire de faire face que la Picardie aurait beaucoup à perdre à la politique de creusement des inégalités et de recentralisation qui est l’œuvre aujourd’hui au niveau national avec les projets du gouvernement, au premier rang desquels la réforme bâclée des collectivités locales.

Nous agissons dans des délais très serrés immédiatement après l’élection. Nous traiterons dans quelques jours le budget 2010 dans le contexte d’incertitude financière qui est créé par la réforme fiscale gouvernementale.

Nous prendrons toute notre responsabilité dans cet exercice,avec détermination, avec lucidité, en prenant soin d’évaluer notre politique au plus près du terrain, avec les acteurs associatifs, économiques, sociaux, citoyens qui nous ont fait confiance ou qui ont simplement des attentes légitimes des politiques. C’est avec eux, que le projet régional se construira également, pas à pas, non sur la base d’un chèque en blanc pour plusieurs années, mais dans l’évaluation continue de ce qu’il faut faire pour améliorer la vie quotidienne des picardes et de picards.

Je vous remercie.

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