Intervention de Thierry Brochot : explications de vote

Session budgétaire Conseil régional de Picardie, vendredi 16 décembre 2012

Intervention de Thierry Brochot, pour le groupe EELV

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Monsieur le Président,
Monsieur le Président du CESER,
Cher collègues,

Vous savez à quel point notre groupe est attaché à l’intérêt régional et comment nous nous sentons, quel que soit l’ancrage de chacune et chacun d’entre nous dans son bassin de vie, des responsabilités à l’égard de l’ensemble de nos concitoyens. En effet, si certains ici se sentent parfois obligés de monter au front dès qu’ils sentent leur carré de bitume menacé par je ne sais quelle vindicte ou maltraitance de cette assemblée, accordez-moi que leur voix s’élève rarement des rangs écologistes.

Cette introduction pour vous dire à quel point la notion d’intérêt régional nous tient à cœur et comme nous attendons avec impatience quelle définition précise en fera le législateur. « Intérêt régional » qui devra dicter chacun de nos actes à compter du 1er janvier prochain – à la bonne heure, me direz-vous – et conditionner, et ça c’est un peu plus inquiétant – chacune de nos interventions. Je veux dire chacune de nos dépenses.

Je rejoins donc là les questionnements que formulait lundi, en ouverture de cette session, mon homologue socialiste Philippe Massein, même si, pour la circonstance, je le suspecte d’avoir plutôt exprimé son « impatience » au titre de ses fonctions de Vice-Président chargé des finances de la Région.

En la circonstance, permettez-moi de vous féliciter, Monsieur le Vice-Président, pour la qualité du projet de budget primitif qui nous a été proposé. Permettez-moi d’associer à ces compliments les services du Conseil régional sous la conduite de Monsieur le Directeur Général des Services et particulièrement la Direction des finances dont chacun peut mesurer, année après année, j’oserais dire, milliard après milliard, à l’occasion de ces sessions budgétaires, l’excellence du travail.

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Avant de vous livrer l’explication de vote du groupe Europe Ecologie – les Verts, je souhaiterais évoquer deux chiffres. Ces chiffres ne figurent pas dans les cahiers du budget.

– Le premier de ces chiffres. C’est 8 millions. D’après le rapport de la fondation Abbé Pierre sur le mal-logement paru il y a quelques jours, il y a 8 millions de personnes, en France, qui, cet hiver, n’auront pas les moyens de se chauffer et s’éclairer correctement. 8 millions, c’est un foyer sur 6. Et combien en Picardie ? Ce chiffre en dit plus long que tous les discours sur notre système énergétique aberrant et la montée implacable de la précarité la plus ordinaire, la plus quotidienne, la plus révoltante. Et ce, avant même l’augmentation du prix du gaz annoncée pour le 1er janvier : +4,4 %, trois fois l’inflation.

– Le deuxième de ces chiffres, c’est 140 000, c’est, à l’échelle du pays, le nombre de jeunes qui quittent tous les ans le système scolaire sans qualification et sans diplôme. 1/3 d’entre eux resteront durablement éloignés de l’emploi. Est-ce pour y remédier que l’état réduit de plus de 20 % en moyenne le financement des MEF et des missions locales ?

Notre collectivité, année après année, fait le choix de la persistance, elle a de la suite dans les idées. Elle a posé des diagnostics et propose des prescriptions. Il nous aurait été possible, la mort dans l’âme, d’abandonner des pans entiers de ce qui fait la spécificité de notre action : le soutien à la vie associative, le logement, la coopération décentralisée. Nous avons choisi de tenir bon.

Au contraire, nous avons poursuivi la mise en œuvre de notre projet politique. Présenté, parmi les premières régions, notre projet de Schéma régional climat air énergie, organisé les assises de l’économie sociale et solidaire, mis sur les rails la politique de santé environnementale, pour me limiter à des politiques portées par les membres du groupe politique auquel j’appartiens.

Mais, les contraintes qui pèsent sur notre collectivité rendent chaque année plus difficile, les arbitrages budgétaires. Le garrot est de plus en plus serré et l’irrigation de l’ensemble de l’organisme toujours plus difficile.

Une difficulté nouvelle apparaît ces derniers temps avec la crise du crédit : la raréfaction des concours bancaires. Les banques deviennent frileuses, elles doivent également obéir à des règles prudentielles qui se sont durcies. Nous allons voter un budget, j’ai peu de doute à ce sujet, mais il sera compliqué de l’exécuter.

Je forme ici une proposition. Que nous puissions mettre à l’étude, comme l’ont déjà concrétisé d’autres régions, Rhône-Alpes, Auvergne, Limousin, Pays de la Loire, comme vient de le mettre à l’étude le Conseil régional d’Ile de France – à l’initiative du MRC, rendons à César- un emprunt populaire, un emprunt citoyen, dont la collecte soit fléchée sur le financement de quelques projets structurants et emblématiques, fédérateurs et durables. Je ne doute pas qu’un lien fort s’installe à cette occasion entre la collectivité et les souscripteurs. Je ne doute pas qu’ils nous renouvellent leur confiance.

…/…

C’est parce que je ne suis pas à la tribune du parti unique nord-coréen ou en train d’écrire un article pour la Pravda que je peux me permettre, très tranquillement, d’évoquer les débats qui traversent la majorité dans cette région comme ailleurs. Les contraintes financières rendent plus aigue l’urgence impérieuse, pour chacun, de réaffirmer ses priorités et ses choix. Vos connaissez nos doutes. Je ne veux évoquer ici que le projet de canal à grand gabarit Seine-Nord Europe. Quand bien même le tour de table serait finalement réuni, se posera à terme, la question de l’exploitation sous la forme d’un partenariat public privé. Cette expression qui signifie- les contribuables en on fait la douloureuse expérience à maintes reprises – profits pour le privé ou pertes pour le public. Le plus souvent les deux. Il faudra connaître le sort réservé au milliard d’euros annuel de déficit d’exploitation que certains prédisent.

Monsieur le Président, vous l’évoquiez lors de votre discours d’ouverture lundi, ce budget dont nous allons doter la Région est soumis à revoyure après les échéances électorales nationales du printemps. Nous en convenons avec vous, celles-ci seront déterminantes dans le devenir de notre collectivité. Ces questions seront au cœur de nos débats. Comptez sur notre volonté d’inscrire notre action au plus près des besoins de nos concitoyens, au cœur même de nos territoires et privilégiant, toujours la solidarité.

Volonté inflexible, inaltérable, immarcescible.

Mais, dans l’intervalle, après 2011, « Année Internationale de la Forêt », l’Organisation des Nations Unies a déclaré 2012, « Année de l’Energie Durable pour tous ».

Et le groupe Europe Ecologie – les Verts est solidaire de ce budget qui exprime l’adhésion de notre collectivité à la feuille de route dont se sont dotées les Nations.

Je vous remercie.

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