LA NOUVELLE POLITIQUE SOCIALE RÉGIONALE
Intervention de Laure Lechatellier, séance du Conseil régional d'Ile-de-France, jeudi 7 avril 2011
Monsieur le Président,
Mes chers collègues,
Depuis 1998, notre région a investi par nécessité mais aussi par choix les secteurs du social et du médico-social via des politiques volontaristes, alors même que nous ne sommes pas en responsabilité propre.
Ce que je vous propose aujourd’hui, c’est une politique sociale revisitée qui affirme deschoix, des priorités, qui fait une large place à une autre approche de notre intervention, renouvelée, repensée.
C’est une politique encore plus juste, plus sociale, plus environnementale, qui conjugue ambition et innovation.
Tout d’abord, c’est la réaffirmation de notre engagement en direction des plus fragiles selon 3 grands axes :
ð agir pour une réelle inclusion des personnes en situation de handicap en affirmant leurs droits au logement, à l’emploi, à la culture et aux sports, tourisme et loisirs, …
ð accompagner le vieillissement de la population francilienne en créant un nouvel axe d’intervention régionale sur la prise en charge de la maladie d’Alzheimer
ð poursuivre la lutte contre la précarité en inscrivant l’aide aux femmes en difficulté, aux sans abris comme une priorité régionale, confirmant ainsi le soutien de la Région au monde associatif qui intervient auprès des publics en situation d’exclusion.
Face à la pluralité des situations, des publics, mais aussi des territoires, des solutions repensées existent, et nous les avons regroupées dans ce rapport avec une approche renouvelée, innovante, pour faire de la région un véritable laboratoire d’innovation sociale.
1/ Innovation, d’abord, du fait de la démarche qui a présidé à l’élaboration de cette politique.
Nous avons entrepris une démarche de concertation en deux temps :
ð Assises sociales régionales des 8, 9 et 10 novembre : après une présentation d’un bilan de nos politiques, ce sont plus de 600 participants, acteurs des secteurs social et médico-social, qui sont venus échanger, exprimer leurs attentes, leurs suggestions d’amélioration des politiques existantes
ð Demi-journée consacrée aux Gens du voyage le 15 février : nous avons consacré toute une matinée à cette question spécifique, en soumettant aux acteurs présents (associations gestionnaires, communes, associations d’usagers…) des pistes d’amélioration de nos politiques à résultat : nous avons réservé un volet entier de la délibération aux Gens du voyage, avec une critérisation spécifique
2/ Innovation, ensuite, parce que ce rapport propose d’utiliser de nouveaux outils pour lutter contre les inégalités sociales et territoriales
Les structures existent, bien sûr, d’ores et déjà, mais elles sont inégalement réparties sur le territoire régional.
La grande innovation de ce rapport, c’est qu’il propose des outils pour parvenir aurééquilibrage de l’offre sociale et médico-sociale en Ile-de-France. Et donc à plus de justice sociale.
Parce qu’une région plus équilibrée est une région plus juste.
Cela passe par la définition de priorités :
ð Priorité grâce à un système de bonification en direction des départements sous-dotés en équipements par rapport aux autres départements franciliens
ð Priorité aux communes sur le territoire desquelles vivent des populations plus défavorisées
Pour cela, ce rapport-cadre vous propose d’expérimenter l’utilisation de l’IDH², un nouvel indicateur développé par la Mission d’Information sur la Pauvreté et l’Exclusion Sociale (MIPES) sur le modèle de l’Indice de Développement Humain (IDH).
L’IDH, c’est ce fameux indicateur synthétique proposé par les experts du Programme des Nations Unies du Développement à la fin des années 80. L’objectif des Nations Unies consistait alors à proposer une vision multidimensionnelle du développement humain qui ne se limite pas aux indicateurs monétaires classiques de type Produit Intérieur Brut (PIB).
La MIPES s’en est inspirée pour créer l’IDH² régional, calculé à l’échelle communale. Cet indicateur mesure le niveau d’éducation, la situation sanitaire et le niveau de revenus des populations. Nous proposons de majorer nos aides lorsque la commune sur le territoire de laquelle s’implante un projet / une opération d’investissement présente un IDH² inférieur à la moyenne régionale.
Expérimenter cet indicateur, c'est participer au changement de mentalité concernant la mesure des inégalités.
Voilà les priorités que nous nous sommes fixées.
J’ajoute que nous créons aussi, avec ce rapport, le principe de « Grande cause régionale » annuelle. Chaque année, avec les élus de la commission, nous définirons lathématique prioritaire sur laquelle nous souhaitons faire un focus et privilégier ainsi un certain nombre de projets remarquables.
L’année 2011 sera consacrée à l’autisme. Ce qui signifie que tous les projets de nouvelles structures ou tout projet en fonctionnement favorisant les conditions de vie des personnes souffrant d’autisme, ces projets bénéficieront d’une subvention majorée de 5% en 2011.
Avec ces critères de priorisation de nos aides, notre politique sociale régionale prend une autre dimension. La Région devient un véritable laboratoire d’innovation sociale.
La Région doit poursuivre également ses aides en les conditionnant à des démarches d’éco-responsabilité. Objectif : faire émerger des projets réellement exemplaires sur le plan social, mais aussi environnemental.
C’est pourquoi nous prévoyons de renforcer encore les exigences en matière environnementale. En conditionnant les travaux de construction / extension / restructuration au respect de la règlementation thermique RT 2012 ou encore à l’obtention du label BBC.
Il est même prévu une majoration (+ 5%) si le bâtiment présente un niveau de performance supérieur : bâtiment passif ou bâtiment à énergie positive !
Cela fait beaucoup de priorités et d’exigences, mais bien évidemment ces exigences ont vocation à encourager le progrès social, et non à pénaliser les porteurs de projets.
3/ Outre ces outils d’encouragement au progrès social, le rapport que je vous propose d’adopter introduit de nouveaux dispositifs par rapport à la délibération de 2008 :
ð Nous prévoyons d’aider le secteur protégé (ESAT et EA) à se développer, pour une meilleure inclusion des personnes handicapées, en organisant un salon professionnel dédié ; nous souhaitons aussi soutenir la création d’ Unités de Logements et Services qui sont des logements individuels 100% accessibles avec un service d’auxiliaires de vie le jour et une permanence de nuit.
ð Pour les personnes âgées, nous lançons un grand Plan Régional Alzheimer, qui se traduit par le soutien aux Maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer (MAIA), par la création de structures d’hébergement temporaire pour soulager les aidants, etc.
Nous allons aussi lancer un appel à projets thématique « Accès des personnes âgées aux livres », parce que les personnes âgées, même lorsqu’elles vivent en institution médicalisée, ont le droit de terminer leur vie autrement que devant un écran de télévision !
Pour les personnes en situation de grande précarité et/ou d’exclusion, nous proposons d’intensifier nos aides aux femmes en difficulté (majoration de 5%) et de faire émerger des structures innovantes pour les jeunes en errance.
4/ Enfin, nous avons souhaité revoir les taux de financement de chacun de nos dispositifs pour mieux les calibrer au regard des besoins des opérateurs et du niveau de financement
Ces montants « de base » peuvent être rehaussés si le projet présente des intérêts supplémentaires au regard des priorités dont j’ai parlé tout à l’heure. Ce mode de calcul inédit est aussi l’une des grandes nouveautés de ce rapport.
Voilà, mes chers collègues, la belle politique sociale que je vous propose d’adopter aujourd’hui.
Sachez dès maintenant que je vous proposerai, à l’automne, de décliner le bouclier social en bouclier sanitaire, avec un nouveau rapport-cadre Santé. Là aussi les inégalités se creusent et l’urgence est de lutter contre la fracture sanitaire.
Jugez vous-mêmes de la cohérence et de la complémentarité des politiques que nous vous soumettons (sourire).
Mes chers collègues, vous avez la parole.