Zones humides et tourisme
Par Michel Daverat – Intervention au Conseil des Marais de Bordeaux, le 19 octobre 2012
En tant que membre du Syndicat Mixte du Forum des Marais Atlantiques depuis mars 2007, la Région Aquitaine se devait de contribuer aux travaux et échanges réguliers engagés tous les 2 ans en faveur des zones humides.
Le thème retenu pour cette journée « zones humides et tourisme » n’a pas été choisi par hasard ! Etymologiquement « Pays des eaux », l’Aquitaine concentre une densité et une variété de zones humides d’une grande richesse, et constitue ainsi un véritable patrimoine écologique favorable à la conservation de la biodiversité régionale.
Les zones humides, espaces de transition entre terre et eau, couvrent plus de 500 000 hectares sur le territoire aquitain:
- sur le littoral et l’arrière dune de la côte aquitaine : marais côtiers, grands plans d’eau, vasières et prés salés;
- sur le pourtour des estuaires de la Gironde et de l’Adour (marais et barthes, haltes privilégiées lors des périodes de migrations);
- sur les vallées fluviales de l’intérieur des terres : prairies humides inondables, tourbières, saligues, ripisylves, mais aussi les lagunes du massif landais.
Autant d’espaces et de patrimoines naturels qui engagent les pouvoirs publics dans la nécessité de développement de politiques concertées de protection, de restauration et de valorisation des zones humides.
Le Conseil régional d’Aquitaine s’est très tôt mobilisé pour satisfaire cet objectif à travers plusieurs actions volontaristes. J’en citerai au moins trois :
- la création d’un outil régional spécifiquement dédié à la gestion de sites d’intérêt majeur à l’échelle régionale, les Contrats Aquitaine Nature (CAN), accord conventionnel sur 3 ans reconductibles passé entre la Région et désormais plus de 25 gestionnaires (plus de 80% concernent des zones humides) pour, à partir d’un plan de gestion préalablement défini en concertation, assurer la conservation et la valorisation des milieux, des espèces, des paysages;
- le développement de l’agriculture biologique qui, de par son mode de production, contribue activement à la préservation des milieux en respectant les équilibres naturels (avec plus de 1500 producteurs agréés bio, l’Aquitaine se classe au 5ème rang national pour le nombre d’exploitations) et en favorisant une montée en puissance des démarches pour une modification des pratiques agricoles existantes, notamment à travers le programme AREA, (Agriculture Respectueuse de l’Environnement en Aquitaine);
- je terminerai volontairement par la gouvernance et par le confortement du rôle du Forum des marais Atlantiques dans ses compétences d’animation, d’évaluation, d’assistance technique des propriétaires publics, associatifs ou privés, et de Pôle-relais reconnu sur la façade atlantique afin d’assurer ce conseil de proximité.
Néanmoins, et il ne faut pas se voiler la face : la fragmentation des milieux naturels, et notamment des zones humides, est l’un des principaux facteurs actuels d’érosion de la biodiversité, liée notamment au développement des infrastructures ou de l’urbanisation. Tout comme peut l’être en terme de perturbation et d’équilibre écologique, une pression non maitrisée d’un tourisme de masse sur des espaces fragiles ; d’où le thème de cette journée.
L’artificialisation des sols est en effet l’une des principales causes de disparition de la biodiversité. A l’occasion de la conférence environnementale, le gouvernement a annoncé son souhait de mettre un terme à l’artificialisation nette des espaces agricoles et naturels. Le calendrier visant à atteindre cet objectif sera précisé dans le cadre de la loi sur le logement, l’urbanisme et la ville prévue en 2013.
Le futur Schéma Régional de Cohérence Écologique (SRCE), dont l’étude d’identification des enjeux régionaux en termes de continuités écologiques (Trame Verte et Bleue) et la consultation des acteurs régionaux sont en cours, pourra favoriser le maintien des corridors écologiques en adaptant les documents de planification des collectivités.
Cependant, même si la règlementation devient plus exigeante dans la prise en compte des zones humides au sein des politiques publiques, chaque acteur, chacun à son niveau de compétence, se doit d’anticiper et d’adapter ses modes de gestion et ses politiques.
C’est résolument le choix du Conseil régional d’Aquitaine qui proposera, durant le 2ème semestre 2013 et dans le cadre de la révision de son règlement d’intervention en faveur du patrimoine naturel, une réorganisation de son action et de ses partenariats spécifiquement en faveur des zones humides. Ce travail interne est actuellement en cours de réflexion. Sans vous en dévoiler le contenu, l’accent sera mis sur la transversalité de l’action régionale et sur toutes les décisions ou soutiens régionaux pouvant impacter les zones humides en terme de développement économique ou d’aménagement du territoire, notamment au niveau des politiques territoriales et sectorielles, agricoles, industrielles ou d’infrastructures. Un élargissement des modalités d’accompagnement, actuellement dédiées aux seuls Contrats Aquitaine Nature, pourrait également être proposé dans le cadre d’une montée en puissance des Réserves Naturelles Régionales désormais sous compétence des Régions.
Le sujet des présentations et débats de ce jour nous aidera pour avancer dans cette réflexion et être plus efficace. «Tourisme et zones humides» est à coup sûr un atout pour l’Aquitaine… à condition de bien le maitriser…
Je vous souhaite une excellente journée