Intervention du Groupe Europe Ecologie – Les Verts Plénière extraordinaire sur la réforme territoriale
Chers collègues, mesdames et messieurs les représentants du CESER,
Nous sommes d’accord sur le principe d’une réforme et pour que les régions en soient la base. L’opinion le demande. Nous l’affirmions déjà en 2009 lors des Etats généraux du fait régional : le système est devenu illisible pour les citoyens et le déficit démocratique est patent. Face à cette situation, la réforme doit être ambitieuse ; plus ambitieuse, en tout cas, que le projet de loi qui nous est proposé. A vouloir faire trop vite, on fait mal !
Des cartes ont été publiées dans la presse, nombreuses, contradictoires. On a l’impression que l’avis des populations et des élus ne compte pas. On crée ainsi encore plus de distance entre les citoyens et les responsables politiques.
Tout cela est contreproductif : au lieu d’un vrai débat sur la régionalisation, sur la façon de redonner un souffle à la démocratie, on est passé à une empoignade sur des découpages hasardeux. Certains médias n’ont d’ailleurs pas tardé à caricaturer l’affaire, laissant entendre que les collectivités territoriales c’est Clochemerle et compagnie…
Cette réforme est œuvre purement bureaucratique, agrémentée d’impréparation, de parisianisme et d’une pointe de condescendance. Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner que des idées caricaturales progressent, selon lesquelles les collectivités territoriales seraient responsables d’une prétendue dérive de la dépense publique. Ne le laissons pas croire !
Ne laissons pas croire non plus qu’une réforme territoriale bâclée serait une solution économique miracle. Cette réforme peut être un outil à condition de bien comprendre que le dynamisme régional, la capacité à innover, sont aussi des facteurs humains, historiques et culturels. Une vision «économiciste » et purement technocratique de la régionalisation ne règlera rien.
Nos priorités
La question de la taille des régions n’est pas l’enjeu principal. Il faut avant tout définir clairement des points essentiels : les pouvoirs de la région, ses moyens budgétaires, ses ressources fiscales.
— Il faut définir la capacité de la Région à prendre des initiatives. Cela devra aller jusqu’à un pouvoir réglementaire et d’adaptation législative, avec un droit d’initiative et bien sûr de nouveaux domaines de compétences. Dans ce cadre, la clause de compétence générale doit être maintenue afin que les compétences des collectivités ne soient pas « saucissonnées ». La transversalité plutôt que le parallélisme, tel est notre choix.
— La région devra disposer selon nous de moyens budgétaires beaucoup plus importants qu’aujourd’hui. Les dotations ne peuvent rester le seul moyen de financer nos politiques régionales. Des ressources fiscales propres et une fiscalité dynamique sont indispensables. Les élus régionaux doivent en être responsables devant les citoyens. Ce serait un progrès pour la démocratie locale.
— Un système de solidarité-péréquation est nécessaire afin de réduire les écarts entre régions pauvres et régions riches, tant au niveau français qu’au niveau européen.
La prise en compte des territoires infrarégionaux est essentielle. L’effacement des départements doit permettre la naissance de « pays », des bassins de vie qui peuvent être constitués des nouvelles intercommunalités. La commune doit continuer d’exister comme première collectivité de proximité.
Profitons de cette loi pour améliorer la qualité de la démocratie avec une généralisation du mode de scrutin proportionnel, l’application du non cumul des mandats, et la création d’un véritable statut de l’élu. Profitons de cette réforme pour améliorer la qualité des services publics. Saisissons l’occasion pour renforcer la construction européenne : nous sommes favorables à une Europe des régions. N’oublions pas le développement des coopérations transfrontalières.
L’État doit aussi se réformer. Son administration doit elle aussi, se réorganiser, se simplifier.
Quelle architecture institutionnelle ?
Cela nous amène à faire des propositions pour une nouvelle architecture institutionnelle. Nous proposons que la région fonctionne avec deux assemblées afin que tous les territoires soient bien représentés, notamment les territoires ruraux, et afin d’améliorer la démocratie.
Nous souhaitons d’une part une assemblée citoyenne élue dans une circonscription régionale unique, telle que nous la connaissons aujourd’hui, d’autre part une assemblée représentant les territoires (les « pays», les nouvelles intercommunalités) issue, elle aussi, d’un vote de tous les citoyens. Le gain démocratique est évident.
Ces deux assemblées, élues à la proportionnelle, seront sur un pied d’égalité et géreront les affaires de la région. Elles éliront un exécutif, distinct du bureau des assemblées, qui constituera un gouvernement régional responsable devant les assemblées.
La simplification sera au rendez-vous. L’Aquitaine compte aujourd’hui cinq assemblées départementales et un conseil régional. D’un total de six assemblées, on passerait à deux assemblées seulement, avec un véritable gain démocratique et une compensation intelligente de la perte des conseils départementaux.
Quel avenir pour cette réforme ?
Pour nous, l’essentiel du débat réside dans les compétences et les moyens des régions. On peut s’interroger sur le rôle des métropoles. Leur création est le résultat d’une logique économique de concentration et de compétitivité. Quelle réponse peut-on apporter, avec une telle architecture, aux interrogations voire aux angoisses des populations rurales ? C’est pour cela que nous insistons sur le rôle des communes, des pays et sur la qualité des services publics.
Quant à la carte des régions, sujet très médiatisé, c’est selon nous un sujet secondaire. Nous regrettons que le redécoupage ne soit que le fruit de négociations et d’arbitrages entre les grands élus, le gouvernement et la haute administration. Ce redécoupage doit au contraire prendre en compte le point de vue des populations, des forces vives de la société civile et des assemblées élues. Sans consultation citoyenne, la réforme ratera sa cible. On peut imaginer une consultation sur des projets précis de fusion.
La taille des régions est-elle un critère pertinent : il faut garder à l’esprit que sur-dimensionner une région peut porter préjudice à la volonté initiale, qui est de faire des économies.
Se limiter aux frontières actuelles des régions (fusion bloc par bloc) est réducteur. Il faut pouvoir aller plus dans le détail quand la demande émane du terrain. Enfin, les critères de redécoupage doivent être géographiques, économiques, sociaux, culturels, historiques. Pour cette raison, nous ne ferons pas l’économie d’une réflexion sur une collectivité spécifique au Pays Basque.