Les 9 et 10 avril dernier, le Conseil Régional Midi-Pyrénées accueillait dans ses murs la 8ème édition annuelle des rencontres nationales des élu-e-s régionaux écologistes.
Ces rencontres ont constitué un moment d’échange important : les élu-e-s régionaux EELV ont souhaité verser au débat les éléments clés issus de la plénière « Débat national sur la transition énergétique: quelles perspectives pour les politiques énergétiques locales ? »
Ces propositions n’auront véritablement de sens qu’à la condition que l’acte III de la décentralisation confie au Région les compétences nécessaires à une politqiue ambitieuse. De fait, la région doit être chargée d’organiser, en qualité de cheffe de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l’exercice des compétences relatives à l’aménagement et au développement durable du territoire, à la biodiversité, à la transition énergétique.
Nos propositions s’inscrivent dans un double défi :
- La lutte contre le changement climatique, en cohérence avec les engagements internationaux de l’Union Européenne et de la France. Nous voulons activement engager les régions sur la voie de la division par deux d’ici 2050 des consommations d’énergie et par quatre des rejets de gaz à effet de serre.
- La sortie de l’énergie nucléaire en un peu plus de deux décennies, car cette énergie est sans avenir : risques immenses en cas d’accident, réserves de minerai limitées, gestion des déchets et démantèlement des centrales en fin de vie non maîtrisés, coûts exponentiels de la filière (EPR, stockage des déchets, démantèlement) risque de prolifération nucléaire à usage militaire…
Les grands principes
- Une gestion de l’énergie basée sur les besoins et non plus sur l’offre, et respectant dans l’ordre trois principes : sobriété, efficacité, recours aux énergies renouvelables
- Un soutien à la production décentralisée de l’énergie
- Un renforcement des autorités concédantes, notamment les intercommunalités
- Une gestion multi-filières de l’énergie, qui soit coordonnée et cohérente avec les autres politiques publiques (agriculture, transport, urbanisme etc.)
Nos propositions
Sans préjuger des nouvelles compétences qui seront dévolues aux régions suite à l’acte III de la décentralisation, les élu-e-s régionaux insistent sur la nécessité de mobiliser, et surtout de consolider tous les leviers aujourd’hui à leur disposition, couplés à la création de nouveaux dispositifs.
- Rendre les PCET obligatoires à l’échelle intercommunale, avec obligation de moyens et de résultats. Jusqu’ici, ces plans ne sont en effet assortis d’aucune obligation ni de moyens, ni de résultats
- Soutenir les intercommunalités dans la création de postes d’animateurs de Plan Climat et d‘économes de flux
- Favoriser, à travers la formation tout au long de la vie et l’apprentissage, la création d’emplois dans les énergies renouvelables, les transports propres, les économies d’énergie, le démantèlement des centrales nucléaires
- Renforcer l’éducation à l’éco-citoyenneté
- Rendre progressivement obligatoire la rénovation énergétique du bâti existant d’ici à 2020
- Devenir prescripteur de la mutation énergétique en orientant la commande publique régionale vers des produits et services de proximité à haute qualité environnementale et sociale, favorisant la relocalisation des activités et emplois
- Développer les financements innovants (fonds de garantie d’emprunt, tiers investissement en complément des aides directes) pour le financement de projets urgents (réhabilitation thermique des bâtiments, éco-construction de logements sociaux) ou structurants (réseaux de chaleur au bois, unités de méthanisation, captation géothermique)
- Promouvoir un service public local de l’énergie par la mise à disposition d’une expertise juridique et technique auprès des collectivités territoriales ayant des réseaux d’énergie en concession. Il s’agit d’aider ces collectivités à se réapproprier la production et la distribution d‘énergie dans une optique de service public
- Soutenir la création d’entreprises d’insertion et les acteurs de l’économie sociale et solidaire pour accélérer les programmes de lutte contre la précarité énergétique dans l’habitat (locataires ou propriétaires à faibles ressources), les métiers de l’éco-construction ou de l’éco-réhabilitation, les métiers du bois et de la forêt
- Structurer et développer la filière bois dans le cadre de gestions forestières durables : la relance de la filière bois énergie doit être adossée à la relance de la production de bois d’œuvre. La France importe une grande partie de ses bois nobles. Il s’agit d’une part de re-créer dans nos régions des filière « bois d’œuvre d’ameublement ou de construction » et valoriser en énergie, une partie des rebuts, petits bois, déchets générées par ces activités, dans le cadre d’une sylviculture écologique et de qualité
- Soutenir les agricultures écologiques à très faible niveau d’intrants et bas carbone, structurer des filières courtes de transformation et de distribution agroalimentaires
- Créer un plan régional d’action pour une alimentation de qualité dans tous les établissements recevant du public.
- Renforcer l’information du public aux solutions énergétiques d’avenir, notamment en soutenant la création de postes de conseillers « info-énergie »
- Promouvoir et accompagner les démarches d’urbanisme qui réduisent les distances à parcourir entre travail, habitat et services au travers des outils de planification
- (SCOT, PLU, Plans de transports…), favorisant la mixité des activités, tout en luttant contre le mitage des terre agricoles et l’étalement urbain
- Réorienter les crédits dédiés aux infrastructures routières (hors mise en sécurité) vers les transports collectifs du quotidien, et le fret ferroviaire et fluvial
- Elaborer et mettre en oeuvre un schéma régional de téléservices, plateforme de bureaux partagés, pour privilégier le télétravail choisi aux déplacements subis
- Créer, avec des collectivités partenaires, un fonds de « solidarité climatique » en direction des pays du Sud utilisé au travers de projets concrets dans le cadre de la coopération décentralisée
- Renforcer les compétences des régions en matière d’énergie et de climat. Les régions doivent être cheffes de file de :
- l’élaboration des schémas régionaux d’aménagement et de développement du territoire, et des SRCAE
- l’élaboration des schémas de transport et de distribution de l’énergie (gaz, électricité, chaleur), la gestion étant confiée aux intercommunalités et métropoles
- l’intermodalité entre tous les modes de transports alternatifs à « l’autosolisme », en devenant autorités organisatrices de la mobilité durable
Les différents schémas cités devront être opposables aux tiers.
Les élu-e-s régionaux demandent par ailleurs :
- Une définition des tarifs de l’énergie réalisée de manière concertée, transparente, lisible pour les opérateurs et porteurs de projets. Le rôle du Parlement dans l’élaboration et la révision de ces tarifs doit être en la matière renforcé
- La simplification des démarches d’investissements citoyens dans les projets énergies renouvelables
- L’adaptation du code minier au développement de la géothermie profonde [forages restant au dessus des socles, sans fracturation hydraulique, interdiction de la prospection et exploitation des gaz de schiste]
- Un soutien massif de la recherche et développement dans les renouvelables, réseaux et moyens de stockage de l’énergie
- Le lancement d’un plan de relance du fret fluvial et ferroviaire à la hauteur des enjeux
- Un droit à l’expérimentation, incluant la possibilité de légiférer au plan régional
En guise de conclusion
La transition énergétique, c’est une urgence, mais c’est aussi une chance, d’autant plus si elle est rapidement engagée. Car en plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre, la transition permettra à la France de se départir de sa dépendance chronique aux sources d’énergie importées, pétrole, gaz et uranium, qui contribue au déficit de la balance commerciale à hauteur de 69 milliards d’euros (facture 2012). Elle permettra d’endiguer la montée de la précarité énergétique, directement provoquée par la hausse structurelle du cours des énergies fossiles et le passif accumulé par des années de négligence de la problématique (isolation thermique des logements, étalement urbain, etc.).
Les élu/es régionaux rappellent que sa mise en oeuvre représente un potentiel de création nette de quelques 600 000 emplois à l’horizon 2020 : il y a là une formidable opportunité de re-créer un tissu industriel et artisanal dynamique innovant et de lutter contre la désertification de nos territoires.