Carré d’info 27 février 2012
Par Régis Godec, adjoint au maire de Toulouse en charge des écoquartiers et candidat Europe Ecologie Les Verts aux élections législatives sur la 4e circonscription de Haute-Garonne. (Les intertitres et exergues sont de Carré d’Info).
Nicolas Sarkozy aura attendu aussi longtemps que possible pour descendre dans l’arène, et espère mener une campagne éclair. La débauche d’énergie est impressionnante, la bougeotte du candidat est flagrante et les sondages tombent tous les jours pour savoir si cet animal politique sautillant parviendra à inverser la tendance en sa défaveur. Sa souplesse idéologique, sa capacité à adapter son discours au contexte politique du moment, sa faculté de se convaincre lui-même de la justesse de son positionnement sont telles qu’on peut le croire capable de surmonter cette épreuve, et de sortir vainqueur du scrutin présidentiel. Mais tout de même, quelque chose ne fonctionne plus dans le mécanisme de séduction qui a fait son succès en 2007. Une nouvelle donnée s’est installée et semble décider à contrarier la dynamique du candidat : le temps long…
Nicolas Sarkozy est sans doute un enfant gâté de la politique qui se régale de gravir les marches du pouvoir, qui jubile à manipuler les symboles de la puissance symbolique, mais s’ennuie profondément dès qu’il est question de gouverner.
Nicolas Sarkozy comme Jacques Chirac : il aime la conquête du pouvoir pas son exercice ?
Nicolas Sarkozy a conquis les marches du pouvoir à une vitesse fulgurante en mettant en œuvre la stratégie du coup d’éclat permanent et il ne connaît que ce chemin. Son premier outil est l’examen stratégique des forces en présence pour créer son espace politique. Son attitude est l’anticipation et l’opportunisme politique pour tenter de coller aux opinions majoritaires. Mais si sa méthode a fait ses preuves pour conquérir le pouvoir, elle n’a jamais montré son efficience pour l’exercer. Nicolas Sarkozy est sans doute un enfant gâté de la politique qui se régale de gravir les marches du pouvoir, qui jubile à manipuler les symboles de la puissance symbolique, mais s’ennuie profondément dès qu’il est question de gouverner.
Après cinq années de gesticulations, de changements de cap, d’auto-contradiction, le candidat à du mal à convaincre de sa capacité à mettre en œuvre les changements qu’il propose aux français. Mais quel est le poids de la mémoire dans un tel scrutin ? Si les électeurs ont de la mémoire et confrontent les images du colonel Kadhafi accueilli dans les jardins de l’Elysée en 2008 et le même tyran pourchassé par les soldats français en 2011. Si les mémoires ont conservé l’image du 14 juillet 2009 , jour d’humiliation pour tous les républicains au cours duquel Bashar al-Assad, Ben Ali, et Hosni Moubarrak furent invités à ce qui aurait dû demeurer une fête républicaine qui célèbre les valeurs des droits de l’homme héritées de la Révolution française. Oui, définitivement, si les électeurs ont gardé une capacité de mémoire et l’utilisent le jour du vote, ils ne pourront reconduire dans ses responsabilités un dirigeant qui a pu démontrer une telle incohérence sur un quinquennat…
La politique semble s’être accommodée de cet emballement du temps et avoir quitté l’objectif de régenter les destinées humaines à l’horizon de décennies, pour entrer dans l’ère de l’information en continu et de la mise en scène de discours dans l’instantané sans recul ni perspective
Le temps court de l’information pervertit la politique ?
Par ailleurs, son volontarisme politique s’est heurté aux évolutions du contexte économique mondial. Sa politique de diminution des prélèvements obligatoires et des protections salariales qui devait relancer la croissance et accroître la productivité, s’est confrontée aux réalités d’une économie mondialisée. Un cycle économique s’est imposé à lui, comme il se serait imposé à d’autres, mais sa politique s’est avérée particulièrement inadaptée aux enjeux. La politique semble s’être accommodée de cet emballement du temps et avoir quitté l’objectif de régenter les destinées humaines à l’horizon de décennies, pour entrer dans l’ère de l’information en continu et de la mise en scène de discours dans l’instantané sans recul ni perspective…
Dans la séquence électorale de 2012 nous devrions débattre de l’avenir de notre modèle de développement hérité de la révolution industrielle et qui semble atteindre ses limites. Au-delà, de la question de l’organisation politique la plus à même de produire nos richesses et d’assurer leur répartition, il nous faut dorénavant nous questionner sur l’épuisement des ressources fossiles, et de la fin de l’ère du pétrole bon marché qui menacent jusqu’aux fondements de la croissance.
Oui, définitivement, si les électeurs français veulent célébrer le retour du temps long politique, et démontrer qu’en plus de leur mémoire ils sont dotés d’une capacité à regarder l’avenir en toute lucidité, ils pourraient avoir envie d’emmener la République sur une nouvelle voie au cours des quatre votes qui leur seront proposés en cette année 2012. L’avenir nous le dira…