«La candidature d’Eva Joly gêne: elle bouscule le microcosme politico-médiatique dont les liens avec les lobbies de toutes sortes ne sont plus à prouver», affirme Michèle Rivasi, députée européenne Europe Ecologie-Les Verts. Selon elle, «nul ne peut souhaiter son retrait. Je crois même qu’un tel scénario affaiblirait la gauche au second tour et aurait un effet inverse».
Pour notre première élection présidentielle depuis la création d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV), notre mouvement peut sans conteste se réjouir de participer à ce scrutin qui a pourtant toujours été défavorable aux Verts. L’élection d’Eva Joly à la primaire d’EELV a été le point de départ d’une participation aussi déterminée que légitime.
Déterminée car les écologistes ne désespèrent pas de parvenir à faire bouger les lignes du Parti socialiste, pour l’établissement d’une gauche aussi solidaire qu’écologiste. Déterminée aussi car il faut beaucoup de courage pour porter des idées nouvelles dans une société sclérosée, incapable de remettre en cause le mode de vie qui nous a poussés vers l’impasse que nous connaissons. Déterminée d’autant plus que les médias jouent un jeu pervers que les candidats du pluralisme sont contraints de constater jour après jour. Alors que l’ensemble des partis souhaitent changer le pansement, nous n’avons cessé de penser le changement. C’est la raison même de notre détermination: personne d’autre ne représente mieux nos idées que notre candidate.
Légitime car notre mouvement est le seul à pouvoir assurer la présence d’un(e) candidat(e) écologiste, de par notre présence sur le terrain et les parrainages des nombreux élus faisant partie de notre mouvement. Légitime aussi car nos percées électorales ont été transformées en succès politiques: nous avons prouvé que nous restions cohérents face à l’exercice du pouvoir et que notre mouvement avait une véritable valeur ajoutée dans le spectre politique. Cette légitimité, nous avons d’ailleurs pu la conforter grâce à la bonne intelligence qui régit nos rapports avec le PS: notre collaboration n’a pas toujours été facile mais a créé une émulation riche de progrès sociaux, environnementaux et économiques. Légitime d’autant plus que notre mouvement puise ses idées dans le terreau fertile de la société civile et qu’aujourd’hui encore nous restons proches des seuls lobbies qui méritent l’écoute des élus: les collectifs et associations de citoyens.
Ce qu’EELV apporte au débat politique, c’est une intransigeance face aux lobbies qui contaminent tous les secteurs de notre vie quotidienne, portent préjudice aux alternatives et au tissu économique des TPE-PME. Les écologistes n’ont jamais voulu de ces grands groupes privés qui ne cherchent qu’à augmenter leurs marges et les dividendes de leurs actionnaires, au détriment de la nature, du travailleur et de l’humain. Ces mêmes groupes qui cherchent à privatiser le vivant et à garder le contrôle sur des ressources fondamentales telles que l’alimentation, l’eau et l’énergie. Ces groupes qui ne cherchent finalement qu’à développer et soutenir un modèle de société qui n’apporte plus rien aux 99% de la société qui subissent la crise.
Nous sommes indignés par nature, c’est pourquoi nous sommes résolus à détrôner les 1% qui nous ont menés dans le mur. Et c’est pourquoi la candidature d’Eva Joly gêne: elle bouscule le microcosme politico-médiatique dont les liens avec les lobbies de toute sorte ne sont plus à prouver. C’est cette consanguinité néfaste pour la démocratie française qui est la première des cibles de notre campagne. Personne d’autre ne porte ce message pourtant indispensable pour la vitalité de notre société, pour l’émergence d’une innovation véritablement durable.
N’en déplaise aux salons parisiens, où il fait bon genre de critiquer une personnalité qui décloisonne véritablement la politique de l’élitisme qui la rend de plus en plus illégitime aux yeux des citoyens.
Et que l’on cesse de dire que notre parti s’est discrédité avec l’accord de législature passé avec le PS. Nous n’aurions pas signé un accord si nous n’avions pas estimé qu’il représente une avancée dans nos relations avec le PS. Pour la première fois depuis le lancement du nucléaire civil en France, avec le concours de la société civile, nous avons su faire reculer l’hégémonie nucléaire au sein de la gauche, pourtant hantée par le mythe du génie français et de la sûreté nucléaire. En connaissance de cause, nos collègues Verts au Parlement européen nous ont félicités de cette avancée, c’est pour dire. Alors que Nicolas Sarkozy avait empêché de faire figurer le nucléaire au menu du Grenelle de l’environnement, nous pouvons nous targuer d’avoir fait avancer le débat en France, d’autant plus que François Hollande lancera un grand débat sur l’énergie dès son élection. Ce retournement n’est pas seulement le fait de ce qui s’est passé à Fukushima, mais aussi le résultat du rapport de force que nous entretenons avec le PS, soutenus par une population qui refuse de se laisser imposer un modèle énergétique incontrôlable.
Pourquoi donc un journaliste s’exprimant sur une des radios les plus écoutées de France mettrait-il en doute la candidature d’Eva Joly? Pourquoi prétend-on que nous échangerions notre retrait contre un groupe à l’Assemblée et trois sièges de ministres? C’est peu ou prou ce qui nous attendra au lendemain de l’élection si François Hollande remporte le second tour. La présence de François Hollande au deuxième tour est assurée: il n’y a aucun danger, aucun 21 avril bis dont il faudrait se prémunir.
Quoi qu’on pense de la candidature d’Eva Joly, nul ne peut souhaiter son retrait. Je crois même qu’un tel scénario affaiblirait la gauche au second tour et aurait un effet inverse.
Notre détermination confortera la gauche dans ses chances de victoire.