La Cimade Reims – La Pastorale des migrants de Reims – l’ACAT Reims – RESF Reims – CCFD Terre Solidaire délégation de Reims et Châlons – en Champagne – Cercle de silence de Reims
Reims, le 14 mai 2012.
Madame, monsieur,
Vous avez déclaré votre candidature aux prochaines élections législatives. C’est à ce titre que, représentants locaux des associations ou réseaux signataires de cette lettre, nous nous adressons à vous.
L’engagement des membres de nos associations et réseaux auprès des étrangers, qu’il s’agisse de migrants ou de personnes déjà installées dans notre pays, fait de nous des observateurs de leur condition. Or, le sort qui est réservé aux étrangers dans notre pays, et en particulier la manière dont sont traitées les situations des migrants, ne nous parait pas conforme à l’idée que nous nous faisons des droits de l’homme.
Certes la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, et elle connaît actuellement une crise de l’emploi et de son économie. Toutefois, la France ne peut renier son histoire, ses principes d’égalité et de fraternité, sans risquer de perdre son identité et son rayonnement.
Si nous reconnaissons à l’Etat le droit d’édicter des règles en matière d’immigration, nous refusons certaines pratiques contraires aux principes d’égalité et d’hospitalité. Ainsi par exemple :
- Un étranger doit régler 110 € de frais de dossier pour pouvoir faire examiner sa demande de titre de séjour en préfecture (en dehors des demandes d’asile), et depuis le 1er janvier 2012, il doit encore verser plusieurs centaines d’euros pour obtenir ce titre de séjour.
- Il peut être refusé un titre de séjour à un étranger malade, au prétexte qu’un traitement est disponible dans son pays, sans toutefois que l’on se soit assuré (comme le prévoyait la précédente législation), que celui-ci peut avoir un accès effectif à ces soins.
- Un étranger peut se voir refuser l’accès à la procédure normale de demande d’asile si le pays dont il est originaire est considéré comme « sûr » par les autorités de notre pays. Dans ce cas, la procédure est dite « prioritaire », c’est à dire en réalité qu’elle est examinée dans des délais si courts que le demandeur n’a pas le temps de présenter un dossier étayé et qu’ainsi il a peu de chances d’obtenir l’asile politique.
- Les lois actuelles laissent aux préfets un trop grand pouvoir d’appréciation des situations et de décision ; le manque de critères communs a pour effet un traitement inégalitaire des situations, renforcé par la fixation d’un quota annuel d’expulsions.
Nous pensons que ces pratiques génèrent de l’insécurité, de la clandestinité, qu’elles contribuent à l’engorgement de la justice par le nombre de recours qu’elles suscitent et détériorent le tissu social dans son ensemble.
A l’inverse, en référence à la devise de notre république, liberté, égalité, fraternité, nous proposons une politique migratoire reposant sur la défense et la promotion des droits fondamentaux : le droit de vivre en famille et d’avoir une vie privée, le droit d’accès à la justice et le droit d’asile.
Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir nous faire part de votre position à propos des propositions suivantes dont nous pensons qu’elles constituent des leviers susceptibles d’inverser la tendance actuelle, sans remettre en cause l’équilibre de notre société :
- Mettre en place une procédure unique de demande d’asile avec droit au travail.
- Attribuer un visa de plein droit à toutes les personnes pouvant se prévaloir du droit au respect de la vie privée et familiale, protégé par les conventions internationales.
- Stabiliser le séjour par la délivrance de plein droit de cartes de résident lors du premier renouvellement de celles-ci pour tous les motifs liés au respect de la vie privée et familiale.
- Rendre exceptionnel le placement en rétention administrative, et l’interdire pour les familles (avec ou sans leurs enfants), les femmes enceintes et les personnes vulnérables.
- Dénoncer les « accords de gestion des flux migratoires » qui conditionnent la politique de coopération et de développement à des clauses de réadmission.
- Accorder un accès au droit de vote et d’éligibilité pour les élections locales et régionales aux étrangers titulaires d’un titre de séjour stable dans le cadre d’une « citoyenneté de résidence ».
- Ratifier la convention des Nations Unies sur la protection des droits des travailleurs migrants et leur famille, adoptée le 18 décembre 1990 par son Assemblée Générale.
Nous sommes confiants dans l’avenir et ne doutons pas que vos principes démocratiques sont en accord avec ce que nous proposons.
Restant à votre disposition, nous vous prions d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de notre considération distinguée.