Elue « par surprise » en 2009 sur la liste de Daniel Cohn-Bendit en Ile-de-France, la députée européenne écologiste Karima Delli remet son mandat en jeu, mais cette fois en tête de liste dans la région Nord-Ouest face notamment à Marine Le Pen.

En 2009, Karima Delli, 4e sur la liste Europe Ecologie-Les Verts (EELV) menée par Daniel Cohn-Bendit en Ile-de-France, bénéficie du score historique des écologistes (16,3% des voix, 20,86% pour la liste de Daniel Cohn-Bendit) et se retrouve élue au Parlement européen « contre toute attente ».

La jeune femme de 35 ans s’en amuse encore. « On a dû recompter les voix et, à 03H00 du matin, je suis élue! J’ai appelé mes parents, mon père ne m’a pas crue et a raccroché en me disant de le laisser dormir », raconte-t-elle hilare, imitant l’accent algérien de son père.

Cinq ans plus tard, la voilà tête de liste avec François Veillerette, acteur de la société civile, pour la région Nord-Ouest face à 21 autres listes, dont celle de la présidente du Front national Marine Le Pen.

« Je ne fais pas une obsession sur le FN », dit-elle, « j’affronte Mme Le Pen sur la forme et sur le fond ».

Arborant une écharpe fait maison aux couleurs de l’Europe (bleu avec les 12 étoiles dorées), elle a tracté sur le marché d’Hénin-Beaumont et par deux fois a affronté Mme Le Pen lors d’un débat public.

« Nous sommes dans la même commission » au Parlement européen, « je ne l’y vois jamais », affirme Karima Delli au sujet de la présidente du FN. « Il faut l’attaquer sur les dossiers, calmement », explique-t-elle.

« Elle est petite, mais elle n’a pas peur, elle y va, elle a la niaque », souligne Barbara Pompili, coprésidente du groupe écologiste à l’Assemblée nationale, venue soutenir Karima Delli lors d’un déplacement à Amiens.

« Karima a été assistante parlementaire, eurodéputée, elle est expérimentée, ce n’est pas un perdreau de l’année », précise la députée de la Somme.

- ‘Je ne la connaissais pas du tout’ -

Neuvième d’une fratrie de 13 enfants, Karima Delli, qui est née à Roubaix et a fait ses études à Lille, n’est pas en terrain inconnu dans cette grande circonscription Nord-Ouest qui comprend la Basse-Normandie, la Haute-Normandie, le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie.

« J’aime bien les campagnes électorales, j’aime bien parler aux gens », dit-elle avec un large sourire.

Son manque de notoriété? « Quand tu es député européen, soit tu bosses, soit tu es à Paris sur les plateaux télé », rétorque-t-elle. Elle a choisi de bosser.

« Karima était la surprise de 2009″, reconnaît Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d’EELV qui a aussi fait le déplacement à Amiens. « En cinq ans, elle a gagné ses galons. c’est une grande justice qu’elle soit tête de liste », affirme la patronne des écologistes.

« Je ne veux pas être juste députée, je reste militante », souligne toutefois l’intéressée, qui a gardé les méthodes d’activisme de son passage au collectif « Jeudi noir pour la défense des mal-logés » : des actions chocs et souvent festives.

La semaine dernière, ses équipes ont recouvert de masques les statues de Lille pour interpeller sur la pollution.

« Je ne la connaissais pas du tout, je suis allée me renseigner sur internet avant sa venue », avoue Sabine Verhaegen, directrice de Ménage Service, une entreprise sociale d’Amiens où la candidate a passé plus d’une heure.

« L’Europe, c’est loin et, pourtant, on y est confrontés tous les jours », admet-elle alors qu’une de ses collègues vient d’expliquer qu’il « faut devenir énarque pour comprendre ce système » des fonds européens, auxquels a pourtant droit l’entreprise d’insertion: « il faut de la simplification », insiste-t-elle.

Calmement, Karima Delli explique, souligne parfois que « là ce n’est pas la faute de l’Europe, c’est l’Etat français ». La députée Barbara Pompili proteste en souriant. « Tu n’y es pour rien Barbara, c’est un décret », s’amuse l’eurodéputée.

« Je suis extrêmement fière et particulièrement heureuse quand je vois qui sont nos candidats », a lancé Emmanuelle Cosse lors d’un meeting à Amiens devant une cinquantaine de personne

« Karima a montré durant son mandat ce qu’elle avait à apporter et notamment devant un Parlement masculin, blanc et vieux », a-t-elle dit.