Avant d’affirmer qu’il faut « travailler plus », Manuel Valls a-t-il pris quelques minutes pour essayer de comprendre la révolution qui bouleverse le monde du travail depuis quelques années, en France comme chez nos voisins ?
L’Allemagne a connu, en 2009, une récession deux fois plus grave que la France. A la demande des syndicats, Angela Merkel a décidé de développer le « KurzArbeit » (travail à temps réduit) : plutôt que de licencier 20 % des effectifs, une entreprise en difficulté baisse son temps de travail de 20 % et garde tous les salariés. Elle baisse les salaires mais l’Etat maintient les revenus.
Quand le gouvernement français favorisait les heures supplémentaires, les Allemands réduisaient leur temps de travail. Grâce au KurzArbeit, malgré une récession deux fois plus forte, le chômage a augmenté cinq fois moins vite en Allemagne qu’en France. Si nous avions agi comme nos amis allemands, nous aurions 1 million de chômeurs en moins !
Aux Etats-Unis, le Livre blanc publié par la Maison Blanche, en février 2007, indiquait que la durée moyenne réelle était tombée à 33,7 heures (sans compter les chômeurs). La durée moyenne dans l’industrie était de 40,7 heures mais il y avait, par ailleurs, tellement de petits boulots que la durée moyenne, tous secteurs confondus, était tombée à 33,7 heures. Avant même que commence la récession.
En quarante ans, la durée moyenne du travail aux Etats-Unis est passée de 38,6 à 33,7 heures. Ce chiffre devrait faire réfléchir Manuel Valls et Jean-François Copé : dans un pays qui bénéficiait d’une croissance forte – grâce à une forte immigration et à un niveau d’endettement colossal – et où n’existe quasiment aucune règle en matière de temps de travail : la durée moyenne est tombée à 33,7 heures !
Qu’en est-il en France ? Quelle est, chez nous, la durée moyenne du travail ? Si l’on en croit le Portrait social 2010 de l’Insee, « en 2009, la durée hebdomadaire moyenne du travail déclarée par les personnes ayant un emploi est de 37,8 heures en France métropolitaine : 41 heures pour les personnes à temps complet et 22,8 heures pour celles à temps partiel ». Dans beaucoup d’entreprises, si l’on tient compte des heures supplémentaires, déclarées ou non, la durée réelle d’un temps plein est plus proche aujourd’hui des 40 heures que des 35.
En 1978, quand la commission Giraudet rendait ses conclusions à Raymond Barre, elle affirmait qu’il fallait baisser le temps de travail de 10 %. En 1995, la commission Boissonnat (créée par Edouard Balladur) affirmait qu’il fallait « une baisse de 20 % à 25 % du temps de travail » mais, quinze ans plus tard, la durée moyenne d’un temps plein reste supérieure à 39 heures et un socialiste nous dit qu’il faut travailler plus !
Entre 1900 et 1970, alors que la productivité augmentait assez lentement, on a divisé par deux le temps de travail : on est passé de sept à six jours, puis de six à cinq jours, tout en donnant cinq semaines de congés payés. Mais, depuis 1970, alors que la productivité a fait des pas de géant, nous sommes incapables de faire évoluer vraiment notre contrat social. Certes, dans les entreprises de plus de 20 salariés, on a gagné quelques jours de RTT mais, fondamentalement, la norme d’emploi reste la semaine de cinq jours et le temps plein reste proche de 39 heures. Quel non-sens !
Au lieu de profiter à tous, les gains de productivité colossaux débouchent sur un partage du travail non dit : d’un côté, ceux qui travaillent plein pot et, de l’autre, plus de 3 millions de chômeurs et de RMIstes qui travaillent zéro heure par semaine. Et au milieu, la foule de tous ceux et celles – les femmes sont les plus touchées – qui galèrent avec des emplois à 20 heures par semaine…
Ce « partage du travail » sauvage, réalisé par le marché, est très favorable aux actionnaires : quand il y a autant de chômeurs, quel salarié peut exiger une augmentation de salaire ? Dans beaucoup d’entreprises, la négociation sur les salaires se résume à un « si tu n’es pas content, tu peux aller voir ailleurs ». Dans tous les pays, la part des salaires dans le produit intérieur brut (PIB) a nettement baissé depuis trente ans.
Pour les 15 pays les plus riches de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la part des salaires représentait 67 % du PIB à la fin des années 1970. Elle ne représente plus que 57 %. En trente ans, ce sont quelque 35 000 milliards d’euros qui auraient dû aller aux salariés et qui sont allés vers les actionnaires.
On comprend pourquoi l’aile néolibérale du Medef et de la droite voulaient tellement en finir avec les 35 heures : la forme actuelle du partage du travail et des revenus leur convient très bien.
Nous autres, écologistes, pensons que le débat sur le temps de travail mérite mieux que les caricatures que nous entendons depuis quelques années. Nous n’avons jamais pensé que la RTT était la baguette magique, la solution miracle. Il faut en même temps investir dans une vraie politique du logement, investir dans une vraie politique d’économie d’énergie, développer les énergies renouvelables, construire un service public de la petite enfance, rénover notre fiscalité, investir dans la recherche, développer les PME…
La RTT n’est qu’un levier parmi d’autres mais c’est sans doute le plus puissant ; en 1997, une étude du ministère du travail montrait qu’un mouvement général vers la semaine de quatre jours à la carte, financé essentiellement par une activation des fonds Unedic (l’idée vient de la CFDT), permettrait de créer 1,6 million d’emplois. Quelle autre réforme peut créer plus de 1 million d’emplois ?
Dans le texte sur l’égalité réelle qu’il a adopté en décembre, le Parti socialiste ne dit pas un mot sur la question du temps de travail. L’une des rares mesures annoncées en matière de lutte contre le chômage, ce sont les « dispositifs nouvelle chance pour les 150 000 jeunes sortant du système scolaire sans qualification ». Cent cinquante mille, c’est bien, mais il y a plus de 4 millions de chômeurs et tous ne sont pas jeunes. Tous ne sont pas sans qualification.
La réduction du temps de travail est aujourd’hui le levier le plus puissant dont nous disposons pour sortir du chômage. C’est aussi un révélateur de notre vision de la société : le peuple est-il une masse d’individus un peu stupides auxquels on s’adresse avec des slogans ou le peuple est-il un ensemble d’hommes et de femmes libres, de citoyens capables d’intelligence, capables, ensemble, de comprendre le monde et de choisir en conscience l’avenir qu’ils veulent construire ?
Le seul intérêt des déclarations de Manuel Valls est d’avoir rouvert le débat sur le temps de travail. Alors débattons.
Pierre Larrouturou, économiste et pilote des Etats généraux de l’emploi organisés par Europe Ecologie – Les Verts Article paru dans l’édition du 07.01.11
Objet : préparation des élections, candidats et campagne électorale
Bonjour,
Nous vous présentons l’association
« école des candidats »
Une démarche originale
Notre objectif est de former les candidats aux élections politiques, locales (municipales, cantonales, régionales et territoriales), nationales (présidentielles, législatives et sénatoriales) et européennes.
Il s’agit d’atteindre une certaine maîtrise des concepts fondamentaux d’une campagne électorale, en utilisant une méthode intensive et directement opérationnelle (méthode Bergé).
Cette méthode se présente comme un maillage serré entre la théorie et la pratique, sur une période courte de 2 jours ( soit ½ journée de cours théoriques et trois ½ journées de mise en situation). C’est donc une matrice adaptable à la personnalité du candidat, à sa démarche politique, et à la circonscription électorale.
Public visé
Ces stages s’adressent, et sont ouverts, à tous les électeurs, tous les candidats et les équipes de campagne, sans condition de diplôme, de parcours ou niveau scolaire, de statut social ou professionnel, ni d’engagement partisan ou militant.
Nous ne pratiquons aucune discrimination. Nous considérons que c’est l’électeur qui, par son vote, valide certaines démarches politiques.
Une contribution citoyenne et non partisane
Nous ne dépendons , ni directement ni indirectement, d’aucun groupement politique, syndical, philosophique, religieux, sectaire, économique ou financier.
Nous n’avons aucune revendication, ni position politique sur les sujets d’actualités.
Nous souhaitons seulement apporter notre contribution dans l’espace politique, en favorisant les candidatures, par l’intermédiaire des stages de maîtrise de la campagne électorale.
Une équipe composée de personnalités aux parcours et engagements divers
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