Pôles de compétitivité
Le groupe EELV souhaite scinder en deux le dossier relatif aux pôles de compétitivité.
Nous soutenons la démarche Altertex parce qu’elle respecte beaucoup des critères d’intervention de notre partenariat, parce qu’elle positionne deux de nos filières industrielles régionales dans la perspective dynamique de leur reconversion écologique, tant environnementale que sociale, garantie de plus par l’adoption d’une Charte.
Nous soutenons le projet de développement axé sur la lutte contre l’illettrisme pour son lien évident avec nos compétences et son impact sensible en termes d’emplois.
Par contre, nous voterons contre le financement de la plate-forme d’innovations Mistral pour plusieurs motifs.
Pour éclairer cette position, je m’arrêterai sur quelques considérations concernant les pôles de compétitivité et quelques enseignements de l’évaluation nationale parue en juin.
Les pôles de compétitivité ont signé en France le retour d’une politique industrielle, placé l’innovation au cœur de la compétitivité plutôt que la déflation compétitive et réaffirmer la place des territoires.
De cela, nous ne pouvons que nous féliciter à condition de pouvoir débattre des secteurs et filières stratégiques à prioriser, de ne pas réduire l’innovation à la rupture technologique mais inclure l’innovation organisationnelle et sociale, les services innovants et veiller à l’égalité des territoires contre la concentration excessive.
En France par rapport à d’autres pays, le déficit dans la recherche développement ne provenait pas du secteur public mais bien de la faible part de la recherche privée des grands groupes et de la faiblesse de l’innovation des PME PMI. En promouvant la recherche et l’innovation collaboratives et en la finançant massivement notamment par les fonds européens, nationaux et régionaux, les pôles voulaient impulser un cercle vertueux.
En 2006, quand la délibération de soutiens aux pôles a été adoptée, lors du débat, Monsieur Fischer avait fait part de sa préoccupation quant à la précarité caractérisant certains emplois de chercheurs.
Monsieur Meyer l’avait rassuré, je le cite, « l’enjeu du pôle de compétitivité est bien de faire que les emplois dans la chimie qui perdait 3 % par an, arrête cette hémorragie d’ici 2010 et en plus crée 1000 emplois dans la chimie ».
Je tiens à souligner que les syndicats sont toujours en attente d’une Charte Sociale pour ces pôles et la précarité des chercheurs liée à l’organisation par projets est bien la réalité 6 ans après d’après la CFDT.
Aussi, comment expliquer l’impact mitigé sur la qualité et la quantité des emplois promis ?
Une des raisons tient au faible relais de l’effort de recherche interne des grandes entreprises des pôles, réduisant l’effet de levier recherché par les financements publics à un simple effet d’aubaine.
L’actualité nous apporte un exemple amer avec Sanofi Recherche et Développement, entreprise impliquée dans 7 pôles de compétitivité dont Lyonbiopôle et qui réduit son effort de recherche interne, laisse peser de fortes menaces sur son centre de recherche à Toulouse alors qu’il est un des grands bénéficiaires du Crédit Impôts Recherche.
Bien sûr il y a la crise, qui n’interdit pas pour autant la forte profitabilité comme le montre l’exemple précédent, mais une autre raison tient au fait que les retombées en matières de créations d’activités et d’emploi n’ont pas forcément lieu en France, des molécules développées à Lyon sont industrialisées en Chine ou au Brésil, c’est-à-dire que la ré industrialisation par les pôles est très largement minorée par les délocalisations au moment de la mise sur le marché des nouveaux produits ou services, du fait des critères de gestion qui prévalent.
Nous attendons les inflexions que pourrait porter le ministre du redressement productif face à ce constat qu’une partie des résultats des recherches financées par les finances publiques risque industrialisés à l’étranger et de la réduction de l’effort de recherche et développement privée à la faveur de ce financement.
Nous pensons qu’en dehors des changements gouvernementaux, il faudrait surtout changer la gouvernance des pôles et y faire rentrer les représentants du personnel et aussi des acteurs de la société, pour la définition des programmes de recherche et d’innovation et le contrôle de leur mise en œuvre.
Car nous questionnons aussi l’impact sociétal de certaines recherches sur la santé et l’environnement, sur ce dossier, je fais référence aux nanotechnologies que développe le pôle Techtera, qui exigerait l’élargissement des comités d’animation aux acteurs de la société civile, là aussi l’actualité récente sur l’évaluation des OGM nous le rappelle d’urgence.
Pour la phase 3 des pôles qui commence en 2012, il est grand temps de passer aux pôles de développement et de coopération.
Une dernière objection tient à la hauteur de l’engagement demandé alors même que nous avons déjà largement dépassé l’enveloppe initialement votée en 2006 et qu’il est pour le projet Mistral sollicité 500 000 euros dans le cadre du projet immobilier.
L’objectif que l’Etat a fixé aux pôles de s’autofinancer à l’avenir à hauteur de 50 %, notamment par les adhésions et les contrats de prestations, est loin d’être respecté pour cette plateforme qui n’émarge qu’à 26 % sur l’ensemble du projet et on est tenté de se poser des questions sur le modèle économique de ce pôle.
500 000 euros soit 11 % du projet pour le seul département c’est deux fois plus que la part des aides départementales des projets sur la période 2006-2011 et c’est un des montants les plus importants sollicité.
Dans une période où les investissements immobiliers vont devoir subir, sur nos propres champs de compétence, une difficulté à trouver des ressources internes comme des prêts bancaires, où l’enveloppe va être réduite, nous pensons que nous ne pouvons concentrer davantage les aides sur des projets qui restent massivement aidés à tous les étages et qui devraient plus massivement être relayés à cette étape par les financements privés.
Un équilibre doit être retrouvé entre concentrer des moyens sur certains secteurs et préserver un tissu industriel suffisamment diversifié pour un aménagement équilibré du territoire rhodanien et le soutien aux filières émergentes de proximité qu’il revient notamment aux départements de soutenir.
Oserais-je ajouter que si cette subvention de 500 000 euros promet de créer 6 emplois, il est des secteurs d’avenir, tant écologiques que sociaux, bien plus riches en emplois.
En conclusion, le groupe EELV votera contre la subvention de 500 000 euros pour le projet immobilier Mistral.