Création de la Métropole de Lyon : approbation du protocole financier général
Nous sommes invités à nous prononcer sur le protocole financier, dernière grande étape de la création de la Métropole de Lyon et de la redéfinition du territoire du Département du Rhône. L’objet de ce rapport n’est donc pas de revenir sur la réforme aussi j’en viens directement aux modalités de répartition de la dette et au calcul de la dotation de compensation.
La clef de répartition de la dette en application du principe de territorialisation des dépenses d’investissement sur les années 2009 – 2013 nous semble pertinente d’autant que notre capacité de désendettement est de 5 ans à ce jour.
Nous aurions préféré qu’en face de cette dette on ne trouve que des dépenses d’équipement qui valorisent des actifs. Mais nous savons que l’encours de la dette s’est accru en 2012 et 2013 par transformation d’une partie des coûts de sortie d’emprunts toxiques en dette nouvelle sans contrepartie à l’actif et ce pour 35 millions en deux ans. A ce montant s’ajoutent pour une somme équivalente, les indemnités de sortie décaissées ces mêmes années qui ont pesé sur notre épargne brute, donc sur notre capacité d’autofinancement, donc sur notre recours à l’endettement.
Nous espérons une issue judiciaire favorable aux trois emprunts toxiques restants car la ponction sur les ressources des collectivités est déjà scandaleuse et elle est toujours in fine payée par les citoyens, en hausse d’impôt ou en coupes sur les dépenses publiques.
La gestion mutualisée de cette partie de la dette doit permettre aux élus des deux collectivités de partager une détermination et une vigilance communes contre ces transferts financiers et spéculatifs.
Concernant la Dotation de Compensation Métropolitaine, je voudrais souligner, que sans compensation, la Métropole de Lyon ne pourrait pas être créée car ce type de partition met à mal l’économie générale de la collectivité territoriale départementale.
Tous les départements, sans leurs principaux centres urbains, ne seraient pas viables, compte tenu de la nature des charges, principalement les prestations universelles de solidarité, et la nature des recettes de fiscalité directe et de fiscalité indirecte plus dynamiques dans les villes centres.
Sortir la communauté urbaine et maintenir pour le territoire restant, les mêmes compétences départementales et la même structure des recettes et des charges oblige à rétablir l’équilibre à l’instar de ce que fait l’Etat avec les fonds de péréquation.
Aussi, la dotation de compensation est bien la condition de la scission et démontre les contraintes des budgets départementaux qui subissent de plus un effet de ciseaux dramatique entre dépenses dynamiques y compris du fait de la crise et recettes plus ou moins atones du fait de la crise également avec des traductions différenciées selon les territoires.
Comme hier pour les mécanismes de péréquation, nous souhaitons prévenir des représentations en termes de territoires assistés et de territoires qui « seraient bien plus riches » sans péréquation ou sans dotation de compensation, d’autant que les écologistes estiment qu’à contrario de cette spécialisation des territoires en concurrence, la transition énergétique et écologiste, permet à chaque territoire de dominante urbaine, rurale ou périurbaine, un développement autonome et soutenable, profitable à tous.
Avant cette partition, il est utile de rappeler que le taux d’épargne nette du département était de 5,1 % en 2012 et de 7 % en 2013, si on exclut les produits de cession et les coûts de réaménagement de la dette toxique.
Ce taux ne cessait de chuter alors que le gel puis la baisse des dotations de l’Etat n’a pas fini de produire ses effets dans les deux futures collectivités.
Pour contrer cette baisse tendancielle, il a fallu augmenter la taxe foncière sur les propriétés bâties en 2013 et le taux départemental sur les DMTO cette année, taux dont l’Etat ‘généreusement’ nous a autorisé le relèvement pour compenser la baisse de sa propre dotation.
L’équilibre budgétaire devient de plus en plus précaire.
Dans ce contexte, la Métropole perçoit 78 % des produits tout en ne supportant que 73,5 % des charges, ce qui conduit à ce que le taux d’épargne nette qui émargeait péniblement à 7 % deviendrait négatif pour le nouveau Rhône après cette séparation, sans dotation.
Quant à la Métropole, sans dotation, elle retrouverait un taux d’épargne nette de 13 % qui était celui du département tout entier en 2008, ce qui mérite d’être souligné.
La future dotation de compensation de 75 Millions doit aussi être relativisée par rapport à une autre réalité, celle de la baisse programmée et historique de 11 milliards en 3 ans des dotations de l’Etat aux collectivités territoriales. Cette baisse conduira, mécaniquement et toutes choses égales par ailleurs, à l’assèchement total de l’épargne nette de 2 collectivités territoriales sur 3 en France. Pour la compenser, si on voulait n’agir que sur le levier fiscal, il faudrait consentir 15 % d’augmentation des impôts locaux. Pour en ralentir l’effet, l’Etat renforcera le mécanisme et les fonds de péréquation horizontaux, que verseront demain nos deux nouvelles collectivités qui ne seront donc pas les plus pauvres. Ces réflexions nous permettent de redonner à ce que nous votons aujourd’hui son juste poids dans le cours des choses.
Le rapport indique donc que sans dotation, l’épargne brute du nouveau Rhône aurait été négative de 32 Millions, ce que la Loi interdit, le budget de fonctionnement devant être équilibré.
Sans dotation, impossible a fortiori pour cette épargne brute négative de couvrir le capital de la dette, autre obligation.
Si sans dotation, pas de réforme, demeurait la question de son niveau.
Le raisonnement comme quoi, chacun devait à l’issue du partage, retrouver le taux d’épargne nette départemental sur sa part de l’ancienne collectivité afin de préserver sa capacité d’investissement et son niveau d’autonomie financière nous semble pertinent. En effet, cela ne fait que maintenir la réalité départementale dont nous rappelons qu’elle est commune à tout département et opérer ainsi, n’entraine ni appauvrissement ni enrichissement du fait de la scission.
Aussi, si nous approuvons le principe et le calcul de la dotation de compensation, nous soulignons néanmoins sa rigidité, bien qu’on comprenne, qu’hormis sur l’exercice 2014, il sera difficile de la recalculer, les dépenses et les recettes n’étant pas en totalité obligatoires ou fatales et dépendant aussi des politiques publiques conduites par chacune des collectivités.
Mais une dotation intangible et pour reprendre une réponse apportée quant à sa durée « versée jusqu’à ce que cela s’arrête » risque d’en réduire la pertinence au fil des années. Sans même parler de sa valeur en euros constants qui diminuera forcément sauf si le risque de déflation la valorise, ce sont les dynamiques des charges et des recettes qui la déformeront forcément. Nous connaissons cette distorsion dynamique avec les compétences que nous a transférées l’Etat avec une photo immuable des recettes et des charges au jour du transfert.
Aussi, il nous semble que ce qui est essentiel pour l’avenir, c’est le dépassement de cette situation figée par le protocole par le développement plus équitable des territoires, passant par de nouvelles réformes territoriales et des redéfinitions des compétences notamment des régions et intercommunalités et des voies alternatives à la crise qui sortent du chemin ‘austéritaire’ qui ne contribue qu’à aggraver l’équilibre budgétaire des collectivités territoriales.
En attendant cette dynamique vertueuse, nous voterons le protocole financier proposé.
Raymonde Poncet