Les critiques des Verts sur Autolib
TROIS QUESTIONS À… DENIS BAUPIN Adjoint EELV au maire de Paris, chargé du développement durable
Pourquoi Europe Écologie- Les Verts critique-t-il Autolib’ ?
Nous ne sommes pas des antiautomobiles primaires, nous sommes pour l’auto-partage. Le problème d’Autolib’, c’est la trace directe. C’està- dire que l’on pourra traverser la ville d’un bout à l’autre sans avoir à redéposer la voiture à son point de départ. On est donc sur un mode de transport qui va entrer en concurrence avec le Vélib’ ou avec le transport en commun. On risque donc d’avoir du transfert modal dans le mauvais seris, c’est-à-dire vers la voiture, qui deviendrait le moyen de transport de référence. Par ailleurs, il faudra bien ramener ces voitures à leur point de départ, ce qui suppose du personnel et de la circulation en plus dans les rues de Paris. Au bout du compte, on aura à la fois un impact écologique et un impact économique défavorables.
Vous craignez également qu’Autolib’ perde de l’argent …
Le service va être lourdement déficitaire. Il faudrait 200 000 abonnés pour amortir une flotte de 3 000 véhicules, c’est démesuré. À supposer qu’on y arrive, il n’y aurait plus qu’une voiture pour 66 abonnés. Or, dans un service d’auto-partage, on table généralement sur une voiture pour 10 à 12 abonnés. L’alternative se présente donc comme suit : soit le déficit sera considérable, soit il n’y aura jamais de voitures disponibles pour ceux qui voudront les utiliser. À l’arrivée, qui paiera quand l’industriel en aura assez d’essuyer des pertes ? Bolloré ou les contribuables ? Le but de Bolloré n’est pas de faire des bénéfices, il est de se payer une campagne de publicité pour sa voiture électrique. Ce n’est pas une garantie de long terme. On n’aurait jamais fait face à des risques aussi lourds en développant l’auto-partage.
Pourquoi l’auto-partage est-il resté embryonnaire à Paris ?
Parce que tous les crédits son orientés vers Autolib’. Les 35 millions d’euros consacrés à Autolib’ auraient permis un développement très conséquent de l’auto-partage. Quand celui-ci a démarré, il y a plus de trois ans, on ne pouvait pas lui accorder de places de stationnement sur la voie publique, du fait de la loi. Les voitures étaient cantonnées dans des parkings souterrains, ce qui nuisait à leur visibilité. Depuis, la loi a changé. Tout était prêt.
Recueilli par J.-D. R.