Pour une politique vivante du patrimoine et de l’environnement

A l’occasion des journées européennes du patrimoine, la question mérite d’être posée : Comment la protection du patrimoine s’accorde-t-elle avec les nouvelles préoccupations environnementales ? Deux manières d’y répondre selon l’angle que l’on aura choisi d’aborder: la cohérence avec les règles relatives aux espaces protégés d’une part, l’intégration (ou non) de nouveaux critères pour une restauration du patrimoine d’autre part.

Les réglementations du patrimoine dans une perspective du développement durable

La protection du patrimoine (au sens large) relève de l’État qui charge les architectes des bâtiments de France (ABF) , d’en assurer le suivi via les services départementaux d’architecture et du patrimoine (SDAP). Ces services ont pour rôle le conseil pour une architecture et un urbanisme de qualité, la conservation et l’entretien des monuments historiques et le contrôle des projets d’aménagement dans les secteurs placés sous leur autorité, à savoir :

Les SDAP participent aussi à l’élaboration des plans de sauvegarde, des plans locaux d’urbanisme. Pour réaliser des aménagements dans ces zones, pour toute demande de permis de construire, selon le type d’espace, les ABF délivrent des autorisations, des avis ou des conseils.

La loi Grenelle 2 a modifié en juillet 2009 une réglementation, qui rend désormais facultatif l’avis des ABF pour les ZPPAUP. Cette flexibilité nouvelle a fait couler beaucoup d’encre et des promoteurs des énergies renouvelables se sont réjouis de voir facilitée l’installation de panneaux solaires. Pas si simple rétorquent les élus Verts de Lyon qui ont déposé un vœu au conseil municipal de leur ville le 14 septembre dernier, où ils demandent le retrait d’une telle mesure qui n’a d’écologique que le nom:

« Cette disposition méconnait les relations de partenariat nouées à l’échelle locale entre les ABF et les collectivités autour des ZPPAUP. L’avis conforme est l’instrument qui provoque un dialogue de tous les partenaires mobilisés autour d’un permis de construire. Sans l’avis conforme, s’introduit le risque que l’enjeu patrimonial ne soit plus pris en compte et conduise à une dégradation de la qualité des territoires en ZPPAUP. »

Si Lille n’est pas concernée, puisque qu’elle n’a pas de ZPPAUP,[ La ville de Lille compte 56 ha classés en secteur sauvegardé]], Dominique Plancke n’en défend pas moins la même vision de concertation et de dialogue entre les partenaires. Il déplore le manque de moyens du SDAP du Nord, qui allonge notamment les délais de réponses et ne favorise pas le temps nécessaire au conseil et à l’écoute.

Les textes officiels intègrent la nouvelle donne écologique et énoncent que :

« Le patrimoine est désormais reconnu comme un matériau constitutif de notre environnement. Aussi les bâtiments et les ensembles urbains doivent-ils évoluer pour accueillir de nouveaux usages et modes de vie. Pour accompagner ces changements, des cadres souples de protection de l’existant encouragent aujourd’hui une cohabitation fructueuse entre le neuf et l’ancien.

Ainsi on cherche plutôt à rendre cohérentes les politiques du patrimoine et les pratiques d’aménagement dans une perspective de développement durable. »

De la lettre à l’esprit il y a plusieurs pas: les mentalités et les adaptations ne suivent pas toujours comme en témoignent ces propos encore entendus il y a quatre mois dans la bouche d’un architecte des bâtiments de France, qui compare des panneaux solaires à des post-it défigurant nos toitures.

Si les collectivités sont engagées dans un débat constant et constructif, on peut comprendre que pour les particuliers, les démarches peuvent sembler longues et complexes. Et il est conseillé d’introduire sa demande le plus en amont possible.

Inventer de nouveaux critères

Quoiqu’il en soit, les demandes croissantes (panneaux solaires, isolation externe, éoliennes…) tout comme les objectifs déclarés de lutte contre le changement climatique au sein entre autres des [DREALincitent nécessairement à une meilleure prise en compte de ces problématiques par les SDAP et appelle une formation spécifique auprès des agents des SDAP.

Un autre volet reste par ailleurs largement à exploiter, celui de l’intégration en amont de critères environnementaux dans la rénovation et l’entretien du patrimoine : choix des matériaux, isolation, efficacité énergétique, récupération de l’eau de pluie, nichoirs dans les clochers, préservation de la biodiversité.

A cet égard, la future restauration de la contre-garde du Roy (rempart de la Citadelle) à Lille reste encore un exemple trop rare qui mériterait d’être suivi. Le renouvellement des procédures, des délais, les nouvelles compétences pour rédiger les cahiers des charges peuvent expliquer la difficile mise en œuvre de ces nouveaux critères.

Encore une fois, l’appropriation des ces thématiques par les différents partenaires et la concertation sont les meilleurs atouts pour parvenir à une adéquation réussie entre protection du patrimoine et préservation de l’environnement.

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