En plein week-end prolongé de la Toussaint, le gouvernement a entériné un décret sur la fusion des fichiers de surveillance concernant la quasi-totalité des Français-es. Alors que les socialistes militaient contre cette mesure en 2012, le gouvernement Valls vient de faire passer en catimini le décret d’application du fichier TES (titres électroniques sécurisés). EELV s’oppose à la mise en œuvre du fichier TES, mesure liberticide et dangereuse.
Comme la ministre chargée du numérique, Axelle Lemaire, EELV dénonce l’atteinte majeure à notre démocratie que représente le fait de passer ce décret en douce et sans débat.
Fusionner les données personnelles, biométriques, de filiation, liées à des délits dans un seul et même fichier pour l’ensemble de la population française, c’est ce qui a été acté ce 1er novembre, en toute discrétion, par le passage d’un décret. A l’origine de ce projet, une loi votée en 2012 sous la présidence Sarkozy. A l’époque, la gauche est mobilisée contre, considérant que ces données sont déjà là, accessibles via plusieurs fichiers, et qu’aucun impératif ne nécessite de les fusionner dans une seule et même base de données. Il aura fallu la vigilance de NextInpact pour découvrir ce décret.
Une seule base de données accessible par l’ensemble des services, de la Préfecture de police, aux agents du renseignement en passant par les douanes, la police ou des autorités étrangères qui le demanderaient, est plus susceptible d’être piraté (copié, effacé ou transformé) que plusieurs fichiers indépendants. Aucun service, aucune entreprise n’est capable à ce jour de se prémunir totalement de risques d’intrusion, de copie ou de détournement informatique et la multiplication des utilisateurs est un facteur aggravant des risques. Les attaques des serveurs de Yahoo ou Twitter dernièrement ne sont que les derniers exemples d’une longue série qui prouve que des moyens financiers importants ne prémunissent pas des pirates.
Un seul fichier pour 60 millions de français ce n’est pas sans rappeler non plus le fichage massif instauré par le régime de Vichy, seul autre exemple en France d’une telle initiative. Un fichier symboliquement détruit à la libération et dont la logique ressurgit aujourd’hui, en plein état d’urgence.
Ce fichier concernera tout le monde ou presque : toute personne française ou ayant des papiers établis en France, âgée de plus de 12 ans. Outre la filiation, les adresses et les données biométriques assorties de photos, l’ensemble du casier serait consigné pour une durée de 10 à 20 années. En plein état d’urgence, on ne peut s’empêcher de penser aux manifestant-es ou aux lanceur-es d’alertes dont les faits et gestes seraient consignés à long terme et accessibles par toute autorité, n’importe quand.
Il est d’autant plus incompréhensible de fusionner ces données qu’elles existent déjà, réparties en plusieurs bases de données, jusqu’ici séparées pour des raisons de sécurité et de respect des libertés. Leur consultation par les forces concernées est aisée et leur croisement possible.
La présidente de la CNIL a interpellé le gouvernement, rappelant qu’une telle base de données ne saurait être mise en œuvre sans consultation préalable dans un état démocratique. EELV soutient cette requête dans la lignée de l’interpellation par Jean Desessard, sénateur écologiste de Paris, du Premier ministre, lui demandant d’instaurer un débat parlementaire et de se conformer aux recommandations de la CNIL.
EELV demande que le débat démocratique soit restauré et que le gouvernement sorte de cette logique sécuritaire et respecte les libertés publiques.
Julien Bayou et Sandra Regol, porte-parole nationaux