Trois semaines après la mort de Rémi Fraisse, la colère ne passe pas. Les demandes d’explications non plus. On a voulu mettre la réaction des écologistes sur le compte de la sensiblerie ou, pire, d’une envie de “récupération“. Il s’agit pourtant de demander la vérité et de répondre à de simples questions.
“S’il y a faute, il y aura sanction“, promet Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur. Mais on ne peut pas se réfugier derrière des enquêtes administratives en cours pour ne pas prendre ses responsabilités.
Y-a-t-il dissimulation, mensonge, erreur dans la communication gouvernementale ?
Pourquoi des informations contradictoires apparaissent sur les consignes de “fermeté“ qui auraient été données aux forces de l’ordre ? Pourquoi la mission de maintien de l’ordre a t-elle échouée puisqu’il y a eu un mort ? Il y a d’ores et déjà des réponses politiques à apporter. Reconnaitre cela est la première étape nécessaire à l’apaisement.
Au delà, la mort de Rémi Fraisse doit être le déclic qui nous fait prendre conscience de cette crise démocratique et de la dérive sécuritaire qui en est la traduction. Cela passe par quatre grands chantiers :
Il faut d’abord s’attaquer à la question des violences policières et faire évoluer la doctrine du maintien de l’ordre vers la médiation plutôt que la répression. Cela passe évidemment par l’interdiction pure et simple de toutes les armes dites non létales (flashballs, taser…), et pas seulement des grenades.
Il faut ensuite revoir les règles de l’utilité publique. Cette dernière est devenue une simple procédure administrative qui laisse la porte ouverte aux conflits d’intérêts. C’est le cas par exemple à Sivens, où la société qui a fait l’étude concluant à l’intérêt du barrage est la même qui doit le construire.
Il faut également redonner du sens et du souffle à notre démocratie. Les citoyens ne croient plus dans la parole de leurs représentants. Ces derniers, adeptes d’un cumul dans le temps que plus personne n’accepte, doivent partager une partie de leur pouvoir avec les citoyens, à travers le développement d’une multitude d’outils relevant de la démocratie participative, comme les referendums locaux ou encore le droit d’initiative citoyenne.
Il faut enfin revoir notre rapport à la nature et notre modèle agricole. Tant que les services rendus par les espaces naturels ne seront pas pris en compte par notre économie et notre modèle de développement, nous continuerons à avoir des projets d’aménagement contraire à l’intérêt général. Les forêts, les zones humides, les cours d’eau, les mers et les océans, les montagnes jouent un rôle vital dans le maintien de notre éco système, et à terme pour la survie de l’humanité. Tous les projets qui ne prennent pas en compte le long terme sont donc des bombes à retardement, tant sur le plan environnemental que sur le plan social.
Après le choc, en plus de l’exigence de vérité, s’attaquer à ces quatre chantiers est la seule manière de répondre dignement à ce qui s’est passé à Sivens il y a trois semaines.