| Conseil fédéral des 09 et 10 septembre 2017 | Le Conseil Fédéral

Repenser notre mobilité pour faire face aux enjeux climatiques

Exposé des motifs

L’organisation des transports et de la mobilité constitue l’un des enjeux majeurs de notre société, tant sur le plan social (le droit à la mobilité pour tou.te.s) qu’économique (nombreux emplois concernés) et environnemental. En Europe, les transports sont responsables d’un quart des émissions de gaz à effet de serre, dont 72 % pour le routier, 14 % pour le maritime, 12 % pour l’aérien, et moins de 2 % pour le ferroviaire, le fluvial … Alors que depuis 1990, l’industrie a baissé ses émissions de 34 %, les transports ont augmenté les leurs de 27 %. 

Le 19 septembre 2017, le gouvernement va lancer les Assises de la mobilité, cycle de réflexion et de concertation ayant pour but d’élaborer un projet de loi pour le début de l’année 2018. Au centre des débats, plusieurs thématiques : gouvernance et investissements ; environnement ; sécurité ; digital et intermodalité, etc.

A l’occasion de ce débat national, Europe Écologie Les Verts rappelle que la mobilité est un secteur clef dans la lutte contre le dérèglement climatique mais aussi un secteur créateur d’emplois et d’innovation. Depuis de nombreuses années, les écologistes appellent à révolutionner nos politiques de mobilité, avec en toile de fond, la lutte contre la pollution de l’air. 

Ils appellent à diminuer les déplacements contraints par une politique d’aménagement adaptée (en rapprochant notamment les lieux de travail et de domicile), et à développer le télétravail.

Les solutions existent :
• réduire notre dépendance au « tout routier » ;
• développer des alternatives moins polluantes au tout routier : trains du quotidien, tramways, métros, voies et pistes cyclables, aménagements favorisant la « marchabilité » des espaces publics, etc. ; 
• concernant le transport de marchandises : favoriser le fret ferroviaire, fluvial ou maritime en favorisant les infrastructures existantes pour éviter les grands projets inutiles qui grèvent nos finances, consomment des terres naturelles et agricole, voire déménagent le territoire plus qu’ils ne l’aménagent.

Le développement de ces modes de transport alternatifs constituerait un gisement d’emplois, et répondrait aux besoins de mobilité des 8 millions de nos concitoyen.ne.s qui ne disposent pas de véhicule particulier, et à celles et ceux qui souhaiteraient s’en passer.

Ce débat national doit être également l’occasion de rappeler que la liberté pour chacune, chacun, de se déplacer au quotidien, constitue un droit fondamental. Encore convient-il qu’il s’exerce dans le respect de son environnement, humain et naturel. C’est ainsi qu’Europe Écologie Les Verts préconise le développement de toutes les alternatives à l’utilisation de la voiture individuelle en solo (autosolisme), et promeut plus particulièrement les modes actifs (marche à pied, vélo, etc.), le covoiturage et le transport en commun. Ni le coût, ni la distance à l’arrêt de bus le plus proche, ni l’accessibilité physique au véhicule ne doivent être un obstacle à une mobilité, qu’elle soit subie ou choisie. 

La réflexion sur la mobilité, enfin, est indissociable d’une réflexion plus globale sur l’urbanisme. L’aménagement du territoire actuellement envisagée par le développement des grandes métropoles ne fera qu’accentuer la périurbanisation et la concentration des déplacements sur des axes lourds déjà saturés et l’abandon prématuré de ceux  à faible trafic. 

Motion

Des transports plus écologiques
Que ce soit pour le transport des personnes ou de marchandises, l’enjeu global est celui de la décarbonation des transports : comment moins et mieux transporter, en consommant moins d’énergie, en émettant moins de polluants et de gaz à effet de serre, en faisant moins de bruit ? 

Europe Écologie Les Verts sera attentif à la tenue de la promesse gouvernementale de l’abandon progressif du diesel, estimant que nous avons déjà assez perdu de temps.

En l’attente, nous veillerons à ce que les constructeurs soient placés en vigilance renforcée par le gouvernement afin qu’ils soient désormais mis à contribution financière sur toutes les politiques publiques en faveur de la qualité de l’air.

Nous demandons également la transition vers le gaz naturel puis le biogaz, et vers un mix comprenant l’électrique ou encore l’hydrogène (ou a minima l’hybride), notamment pour la livraison du « dernier kilomètre » et pour les déplacements de moyenne distance qui ne peuvent pas être effectués autrement.

Concrètement, il s’agit :
• de faire muter en ce sens toutes les flottes de véhicules professionnels, à commencer par les transports publics ;
• d’encourager la mise en place d’un réseau de stations de chargement au gaz (naturel ou hydrogène) des poids lourds et autres véhicules professionnels ;
• d’installer des stations de recharge électrique d’origine renouvelable des véhicules en des lieux stratégiques, par exemple pour le rechargement de véhicules professionnels à la pause méridienne ;
• de développer les réseaux électriques intelligents (smart grids) afin que le rechargement s’effectue aux heures les plus favorables en termes de production d’énergie, tout en prenant en compte la nécessaire protection de nos données personnelles et en restant vigilants sur les débats en cours concernant les effets sanitaires des ondes électromagnétiques
• de favoriser la construction de bureaux partagés à proximité des gares.

Développer le fret fluvial et ferroviaire
L’absence prolongée d’investissements dans les réseaux ferroviaires et fluviaux a pu laisser croire qu’ils étaient inadaptés au transport de marchandises. Et pourtant, depuis l’arrivée de nouveaux transporteurs tels les opérateurs ferroviaires de proximité, on constate un regain d’intérêt des chargeurs pour le rail et la voie d’eau (+ 50 % en Allemagne). Un train de l’autoroute ferroviaire Luxembourg – Perpignan, c’est 80 camions de moins sur les autoroutes. Une barge sur la Seine ou le Rhône, c’est 200 à 300 camions de moins. 

Europe Écologie Les Verts propose :
• l’émergence d’opérateurs ferroviaires publics de proximité sur chaque grand bassin logistique et son arrière-pays ;
• la modernisation des entrepôts logistiques et leur recentrage à proximité des nœuds ferroviaires et/ou fluviaux ;
• la suppression des taxes pesant spécifiquement sur le transport fluvial de marchandises ;
• le développement de tous les outils informatiques permettant la mutualisation des besoins de transport entre logisticiens. 

Renforcer les transports publics
Les transports en commun souffrent encore de nombreux handicaps : ils sont souvent mal connus, parfois un peu compliqués à utiliser, voire un peu lents, et très souvent insuffisamment développés et cadencés, tant en zone urbaine et périurbaine que rurale. 

Europe Écologie Les Verts propose de tirer le meilleur parti des transports publics existants :
• par une meilleure communication sur la réponse qu’ils apportent aux besoins de déplacement ;
• par des facilitations d’accès : information temps réel, tarifs adaptés, etc. ;
• par leur circulation sur voies réservées partout où cela est possible (« en site propre ») ;
• par le développement des fréquences et de l’amplitude horaire des services pour que les contraintes du soir n’empêchent pas le choix du matin.
• par plus d’intermodalité et de multimodalité (élargissement de la possibilité pour les utilisateur-trice-s des trains de laisser leur vélo en sécurité en gare, ou d’embarquer leur vélo à bord, dans des conditions plus aisées et plus fiables).

Pour les déplacements de moyenne et longue distance, plutôt que les « bus Macron », Europe Écologie Les Verts porte le projet « Trains à haut niveau de service » (THNS), de renaissance d’un réseau maillé de trains rapides à haut niveau de service reliant entre elles les capitales régionales et desservant les villes moyennes, dût-il s’appuyer sur des opérateurs publics autres que la SNCF. 

Europe Écologie Les Verts demande également le maintien ou le rétablissement des lignes de nuit (Paris-Rodez, Paris-Briançon, Paris-Béziers, Paris – Nice, Bordeaux – Nice, etc) qui sont une alternative écologique à l’avion pour les trajets de longue distance, mais aussi des autres lignes menacées de fermeture (Cévenol, ligne des Alpes, etc).

De plus, il existe également des lignes fermées qu’il conviendrait de rouvrir.

En finir avec les GPII et réorienter les financements publics
La mutation de notre système de transport vers une mobilité plus acceptable sur le plan social, économique et environnemental nécessite d’importants investissements porteurs d’avenir : la mise en accessibilité des réseaux pour tous, le développement du transport collectif urbain et interurbain, la lutte contre les nuisances sonores et pour la transition énergétique. 

Au-delà du recours à l’emprunt, pas illogique dès lors que les amortissements se calculent sur 50 ans, les recettes se trouvent dans :
• le financement par les usagers (20 à 30 % aujourd’hui pour le transport public) ;
• le financement par les employeurs (50 % aujourd’hui pour le seul transport public urbain) ;
• le financement public, c’est-à-dire par l’impôt. 

Europe Écologie Les Verts propose :
• de ramener à 5,5 % le taux de TVA applicable aux transports du quotidien, à considérer comme de première nécessité ;
• une tarification des transports publics qui tienne compte de la capacité contributive des utilisateurs (jusqu’à la quasi-gratuité pour les jeunes et les personnes les plus fragiles) ;
• un versement transport (payé par les employeurs) élargi au financement du réseau ferroviaire structurant dans les grandes agglomérations ;
• un contrôle plus prégnant du coût du transport ferroviaire et une meilleure lisibilité des tarifs;
• un alignement de la taxation du gazole sur celle de l’essence ;
• une taxation du kérosène sur tous les vols (au moins intra-européens dans un premier temps) ;
• la mise en place d’une redevance kilométrique poids lourds type Euro vignette. 

Afin de pouvoir financer des projets de mobilité durables, il faut stopper les grands projets inutiles et imposés tel que le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, le tunnel ferroviaire Lyon-Turin, le canal Seine-Nord, mais également les projets d’autoroutes tel que le grand contournement ouest de Strasbourg, l’A45 Lyon – Saint-Etienne, la « Toulouse – Castres », l’autoroute du littoral à la Réunion ou encore le contournement Est de Rouen. 

Concernant les gares ex urbanisées, dites « betterave » (TGV Haute-Picardie, Mâcon-TGV, etc), Europe Ecologie Les Verts estime que s’il est trop tard pour celles qui existent déjà, il faut définitivement y renoncer à l’avenir pour favoriser les gares centrales multimodales et connectées aux réseaux existants (abandon de Montpellier-Sud-de-France, et projets de Nîmes-Manduel-Redessan, de Montélimar-Allan, etc).

Comme cela se pratique à l’étranger, la genèse des politiques publiques – et des grands projets, s’il doit y en avoir – doit répondre avant tout à des enjeux d’aménagement urbain, d’aménagement du territoire, et faire l’objet de débats publics avant validation politique, et référendum si nécessaire pour leur donner toute leur légitimité.

Le Conseil Fédéral propose :
• (que soit organisé) un « Tour de France de la mobilité » pour que les écologistes puissent faire part de leur opposition aux projets inutiles et de leur propositions pour la mobilité de toutes et tous ;
• l’écriture d’un livre vert pour dénoncer les grands projets inutiles et présenter nos alternatives ;
• une page internet dédiée aux assises de la mobilité sur notre site eelv.fr, avec une fiche pédagogique par grand projet inutile et par alternative ;
• une campagne-action qui permettra aux militant.e.s écologistes de se mobiliser tout au long des trois mois que dureront les Assises de la mobilité ;
• le dépôt de cette motion comme contribution d’EELV aux assises de la mobilité sur le site internet qui sera ouvert par le Gouvernement à cet effet.

Unanimité moins 8 blancs.

Télécharger la motion : 

thumbnail of Motion_K_mobilite_2017_CF_2017090910
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