Les écologistes ont voté contre la loi sur le redécoupage des régions de France métropolitaine car sur le fond, le redécoupage va à l’encontre des enjeux d’aujourd’hui. Sur la forme, le débat a été d’autant plus verrouillé que la réforme était mal préparée.
Au lieu de renforcer les régions par des moyens et des compétences comme partout ailleurs en Europe et de profiter de cette réforme pour organiser un véritable débat démocratique, le gouvernement a cru bon de les faire grossir en superficie et en population sans leur donner les moyens de leurs nouvelles ambitions. Résultat, des régions à la fois les plus grandes et les plus faibles d’Europe : des colosses aux pieds d’argile.
Au lieu de miser sur l’identité des territoires comme facteur d’investissement citoyen des habitants dans leurs régions, le gouvernement a opéré des regroupements purement techniques, incohérents, fondamentalement a-démocratiques. Comment espérer une démocratie régionale vivante dans les futures « Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine » ou « Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes » ? On sait pourtant que les collectivités territoriales qui fonctionnent le plus efficacement sont celles qui reposent sur une forte identité partagée : Corse, Alsace, Bretagne…
Au lieu de prendre le temps d’un redécoupage concerté, fin et précis, le gouvernement a préféré une action unilatérale et brutale. En cela il viole une nouvelle fois la Charte européenne de l’autonomie locale. Résultat : des régions sont fusionnées malgré elles (Limousin, Alsace, Nord-Pas-de-Calais…) et les territoires qui depuis des décennies demandaient une remise à plat du redécoupage régional ont, une nouvelle fois, été ignorés (Bretagne, Centre-Val de Loire, Savoie…). Quant au soi-disant « droit d’option » des départements, il fait face à des obstacles littéralement anti-démocratiques (droit de veto des régions d’origine, généralisation de la majorité qualifiée des trois cinquièmes pour tout changement, délai d’option limité à un an). Réalisée par en haut, sans concertation voire contre les territoires, le législateur ne laisse aucune modalité démocratique pour faire évoluer cette carte bâclée.
Au lieu d’ouvrir la voie, dans une loi sur les compétences, d’une future disparition des départements, le gouvernement a pris le problème à l’envers. En commençant par créer des méga-régions, il a sabordé son propre projet de suppression des départements en les rendant indispensables comme échelon intermédiaire entre le régional et le local.
Le débat qui va s’engager au Parlement sur les compétences des collectivités (loi NOTR) est donc en bonne partie vidé de son sens. La régionalisation espérée est d’ores et déjà bridée par la priorité donnée aux métropoles et la persistance des départements et du millefeuille territorial.
Julien Bayou, Sandrine Rousseau, porte-parole nationaux