Vers une nouvelle démocratie européenne ?
Ne nous y trompons pas, la désignation du futur Président de la Commission européenne constitue un test in vivo de l’évolution de la démocratie européenne.
Si le traité de Maastricht prévoyait une désignation de couloir par un conclave de chefs d’Etat et de gouvernement,enregistré ensuite par le parlement européen, le traité de Lisbonne, entré en vigueur en 2009, a singulièrement renforcé le processus démocratique et la transparence.
En effet, il s’agit désormais, pour les chefs d’exécutifs nationaux de “tenir compte du résultats des élections“ européennes dans la désignation du président de la Commission.
Certes cette formulation, ambigüe, ouvre la porte à diverses interprétations, mais pour les écologistes européens, notamment avec leur processus inédit de primaires lancé dès janvier 2014, elle ne souffre aucun doute : les citoyens européens doivent décider par leur vote du futur Président de la commission et le Conseil doit respecter leur choix.
C’est pourquoi les négociations en cours pour la présidence doivent impérativement respecter l’esprit du traité de Lisbonne et la désignation ne peut donc se faire que parmi les six candidat-e-s officiels désignés par les mouvements politiques européens pour les élections.
Non, Jean-Claude Juncker n’est pas le candidat des écologistes. Nous nous avions, à travers nos primairescitoyennes, élus Ska Keller et José Bové comme candidat-e-s de tous les écologistes européens.Malheureusement les citoyen-ne-s ne nous ont pas mis en tête. Si nous dénoncions tout au long de la précédente législature, pendant la campagne et encore aujourd’hui les positions politiques néolibérales et conservatrices de l’ancien premier ministre du Luxembourg, nous respectons les résultats démocratiques des élections européennes qui l’ont placé en tête.
Dés lors, c’est bien à Monsieur Juncker d’ouvrir une négociation transparente en vue de s’assurer une majorité au Parlement européen faisant ainsi vivre le principe des démocraties parlementaires où l’exécutif émane d’abord de la majorité au Parlement.
Cette coalition ne pourra exister sur la seule base programmatique du Parti Populaire Européen. Comme Angela Merkel en Allemagne qui il y a quelques mois, avait du se résoudre à mettre en œuvre le SMIC pour réussir à construire une majorité de coalition avec le SPD, Jean-Claude Juncker devra, lui-aussi, faire d’importantes concessions pour convaincre les représentants des autres partis de ne pas faire obstacle à sa nomination.
Mais s’il échoue, ce sera alors à l’allemand Martin Schulz, arrivé second, de tenter d’obtenir une coalition et ainsi de suite, parmi les candidats ayant concouru à l’élection.
Le véritable danger actuel, que les écologistes et l’ensemble des démocrates européens dénoncent avec force, réside dans les manœuvres de certains leaders eurosceptiques, europhobes ou tout simplement réactionnaires consistant à désigner des candidats « sortis du chapeau » et choisis par eux-seuls en dehors de toute logique démocratique.
Il faut donc sans la moindre hésitation soutenir le nouveau processus démocratique et appuyer la démarche de celles et ceux qui, même au sein du PPE, défendent la candidature issue du scrutin.
Une fois la victoire acquise, il sera temps pour les écologistes et leurs alliés de poursuivre le chemin démocratique vers une Europe fédérale où l’exécutif en totalité sera issu du vote direct des citoyen-ne-s et de listes transnationales.
Pascal Durand, eurodéputé groupe Verts/ALE,
& Nicolas Dubourg, chargé de l’Europe au sein du Bureau Exécutifd’Europe Ecologie Les Verts