Créé en 1795 en pleine Révolution, le Sénat fut consécutivement Conseil des Anciens, Corps législatif, Chambre des pairs ou Conseil de la République pendant la IVème République. En 1958, il est institué comme Chambre Haute de la Vème République par l’article 24 de la Constitution qui lui donne les pouvoirs de voter la loi, contrôler l’action du Gouvernement et évaluer les politiques publiques. Il assure la représentation des collectivités territoriales de la République en étant élu par un collège électoral de 150 000 grands électeurs (élus territoriaux). Les sénateurs sont élus pour six ans, la chambre étant renouvelable par moitié tous les trois ans. Issu de la « Chambre des sages », le Président du Sénat a par ailleurs la responsabilité de remplacer le Président de la République en situation de transition due à un décès ou une démission.
Représentante des élus territoriaux autant que de leurs électeurs, la Chambre Haute s’est forgée au fil du temps une fonction de gardienne de la Constitution et d’enrichissement du débat législatif. Napoléon III lui attribuait déjà un rôle clé en décrétant que le Sénat « est le dépositaire du pacte fondamental et des libertés compatibles avec la Constitution ». Considérée par la gauche et les progressistes comme la plus conservatrice des deux chambres, le Sénat, affranchi des considérations électorales et politiques court-termistes, a pourtant montré plusieurs fois sa capacité de résistance aux desideratas des gouvernements et aux tentatives de restriction des libertés publiques et des droits fondamentaux. Ainsi, la Haute assemblée a su adopter, lors de la précédente mandature, de nombreuses mesures contre l’avis du gouvernement et a permis d’éviter les pires dérives sécuritaires, notamment dans le cadre des votes des lois LOPPSI et LOPPSI 2, qui avaient pourtant été adoptées par les députés de la majorité actuelle.
La gauche et les écologistes sont aujourd’hui face à leurs responsabilités : faire un choix de préservation de ses acquis et d’immobilisme en se glissant dans les « pantoufles » confortables de la Vème République, ou prôner une véritable transformation de la Haute assemblée susceptible de réconcilier les citoyens et la politique, dans le cadre de la mise en place d’une Sixième République en phase avec le XXIème siècle.
Europe Ecologie Les Verts peut, avec ses dix éluEs porter au Sénat cette vision : Le Sénat doit pleinement endosser son rôle de représentation des collectivités, en prenant acte de la récente réforme territoriale et de la démographie française actuelle. En effet, les zones urbaines se sont considérablement peuplées depuis 1958 tandis que les zones rurales se désertifiaient, créant ainsi un biais politique plutôt conservateur. La Haute assemblée, au mode d’élection revu, doit être garante d’une réelle décentralisation et d’un fédéralisme accru, et veiller à la protection des libertés publiques et droits fondamentaux. Les grands électeurs doivent pouvoir contribuer à l’élaboration des politiques nationales en y intégrant les enjeux territoriaux et les préoccupations de long terme des citoyens, éloignée des grands mouvements d’humeur de l’opinion. Les sénateurs doivent également mieux représenter les collectivités et leurs habitants : il s’agit d’une opportunité unique pour la gauche et les écologistes d’instaurer la proportionnelle à tous les niveaux, pour une bien meilleure représentativité des femmes, des jeunes et de personnalités de toutes origines, pour une chambre rajeunie et métissée aux couleurs de la France d’aujourd’hui. C’est d’ailleurs dans une chambre représentative des collectivités qu’il convient en premier lieu de faire élire les « vrais acteurs » des territoires : militants de terrain, associatifs, éducateurs…
Le Sénat peut devenir le représentant de l’évolution longue des territoires. Le changement climatique, l’érosion de la biodiversité, l’évolution des sciences ou encore l’évolution démographique sont, comme l’a souligné le nouveau doyen du Sénat Paul Vergès lors de son discours inaugural, des défis à relever hors des considérations politiques urgentes. Le travail de fond du Sénat et des sénateurs, d’ores et déjà très solide, doit être renforcé par le développement d’une vision d’ensemble des mutations en cours, des crises présentes et à venir, de discernement des « courants profonds qui modifient l’état du monde ». Le Sénat a vocation à être l’assemblée démocratique de discussion des politiques structurantes pour l’avenir.
Les écologistes ont donc toute leur place au sein de la Haute assemblée et un rôle clef à y jouer.