À 19h29 le 12 décembre 2015, les 195 pays réunis à Paris ont adopté à l’unanimité un accord pour limiter le réchauffement climatique. Après 24 heures de prolongation, les points de blocage ont été surmontés. L’accord reflète dans son équilibre général la persistance de réelles divergences dues à la très grande diversité des situations nationales. Mais c’est un véritable succès d’avoir réussi à obtenir une approbation universelle – l’accord de Kyoto ne portait au final que sur 15% des émissions de CO2 mondiales – cet accord de Paris permet donc de trouver un socle commun de discussion et de dynamique vers une économie décarbonée pour l’avenir. L’accord sera définitivement signé en avril 2016 et entrera en vigueur en 2020.
On peut en retenir la garantie d’un financement à hauteur d’un plancher de 100 milliards de dollars à compter de 2020 qui était un sujet essentiel pour que la confiance soit établie entre les pays occidentaux et le groupe des 77, la confirmation du mécanisme de révision tous les 5 ans à compter là encore de 2020, ou la confirmation du principe de responsabilité commune mais différenciée qui fonde l’approche des COP et conduit à reconnaître que les efforts à mener pour aboutir à l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre doivent être proportionnés aux responsabilités et moyens de chaque pays. Les Etats insulaires ont obtenu que l’accord mentionne l’objectif de contenir en dessous de 2 degrés le réchauffement climatique si possible à à 1,5 degrés, limite au-dessus de laquelle de nombreux états insulaires seront en effet submergés. C’est une surprise lorsqu’au début de la négociation seul l’objectif de 2 degrés était communément évoqué. Mais cette victoire a un prix. L’objectif de réduction des émissions à long terme est particulièrement flou et ne constitue pas une contrainte. Il est juste prévu de « viser un pic des émissions mondiales de gaz à effet de serre dès que possible «.
Pour mémoire le GIEC juge nécessaire de baisser de 40 à 70% les émissions de GES d’ici 2050 pour se situer dans une trajectoire de réchauffement à deux degrés. Jean Jouzel, ancien vice-président du GIEC, a dans les heures qui ont suivi l’adoption de l’accord alerté sur le fait que se fixer un objectif de 1,5 degrés sans y adjoindre les contraintes correspondantes n’avait pas de sens. Il a également rappelé que le scénario de réchauffement à deux degrés était déjà extrêmement difficile à atteindre.
Il faut également remarquer que l’accord devant entrer en vigueur en 2020 et le mécanisme de révision prenant effet tous les 5 ans, l’addition de ces deux éléments nous emmènerait beaucoup trop loin dans le temps sans revue des engagements par rapport à la situation (15 ans de délai alors que le GIEC a estimé dans son dernier rapport que c’était les 20 prochaines années qui étaient décisives). C’est pour cette raison que le groupe de pays qui s’est formé pour porter une haute ambition sur le climat (high ambition) et qui comprend l’Union européenne comme les Etats-Unis ( qui ont fait le choix de s’y joindre au cours de la négociation de Paris) ou le Brésil et des pays particulièrement vulnérables au réchauffement s’est engagé à une révision de ses engagements avant 2020.
Au vu de cette situation plusieurs orientations se dégagent :
– D’abord la nécessité de faire d’un accord universel mais peu contraignant le point de départ d’une dynamique ce qui ne va pas de soi ;
– Ensuite l’importance pour l’Union européenne de retravailler rapidement sur sa cohésion et son rôle de leadership et de médiation entre le Nord et le Sud dans la perspective de la Cop22 qui aura lieu au Maroc ;
– Ensuite encore la nécessité de donner aux pays les plus impactés aujourd’hui par le dérèglement climatique (Afrique, pays les moins avancés, Etats insulaires) les moyens d’une adaptation concrète, rapide et efficace. Attendre 2020 pour mettre en place les outils d’une adaptation efficace serait criminel ;
– Enfin le travail à effectuer rapidement pour faire le lien entre les engagements de l’accord et ceux des collectivités locales et des entreprises, comme des initiatives citoyennes.
Lucile Schmid, membre du Bureau exécutif chargée de la COP21