La crise qui couve en Corée du Nord, outre qu’elle souligne une nouvelle fois les dérives autoritaires de la dynastie des Kim et la grande souffrance que ces tyrans infligent à leur peuple, met en lumière les limites de l’idéologie nucléariste.
On ne peut d’abord que condamner les atroces gesticulations de Kim Jung-un, dernier rejeton d’une dynastie de dictateurs qui a affamé son pays pour financer son armement, et qui menace aujourd’hui d’employer ses armes nucléaires contre la Corée du Sud… et le reste du monde.
Mais il y a également de sérieuses leçons à tirer de cette crise, et notamment la totale inefficacité des doctrines de l’armement et de la dissuasion nucléaires. On voit bien qu’avec les armes nucléaires, nul n’est à l’abri d’une utilisation délirante ou d’un « accident » technique ou politique… Et que la menace nucléaire d’un grand pays comme les États-Unis ne sert à rien en retour pour obtenir quoi que ce soit d’un petit pays comme la Corée du Nord ou en général d’un adversaire déterminé… Les armes nucléaires n’ont pas d’emploi sensé, « fondamentalement dangereuses, extraordinairement coûteuses, militairement inefficaces et moralement indéfendables », comme l’expliquait en 1996 le général américain Lee Butler, ancien chef du Strategic Air Command durant la guerre froide.
La menace nucléaire, non seulement politiquement aléatoire, contient intrinsèquement un risque indubitable et permanent de basculement dans l’horreur. L’arme nucléaire n’évite ni les crises militaires, ni les guerres. Au contraire, elle les provoque. Sans oublier que s’il attaquait la Corée du Sud, de quelque manière que ce soit, Kim Jung-un pourrait y faire des dégâts immenses et irréversibles en portant ses attaques contre les 23 réacteurs nucléaires sud-coréens.
Cette crise le démontre : il faut d’urgence aller vers un monde sans armes nucléaires. La France s’honorerait à porter le combat de l’abolition des armes nucléaires, une priorité morale et une urgence diplomatique.
Jean-Philippe MAGNEN, Elise LOWY, Porte-parole