Le coup d’Etat militaire qui vient de survenir au Mali est extrêmement grave. Il semble rejouer une tragédie hélas classique en Afrique subsaharienne depuis les indépendances : un groupe de jeunes officiers s’estimant lésés par leur hiérarchie corrompue et trop peu soutenue par le pouvoir politique face à une rébellion en passe de déborder l’armée nationale, décide de prendre le pouvoir et de suspendre la constitution. Ces officiers sont regroupés au sein du « Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat » (CNRDR).
Depuis plusieurs mois, d’anciens leaders touaregs maliens ayant émigré il y a des années en Libye où le gouvernement de Mouammar Kadhafi leur avait confié des fonctions répressives, sont retournés dans leur région d’origine. Fuyant une Libye ayant changé de régime, ils ont emporté avec eux les armes lourdes acquises auprès du dictateur déchu et se sont réinstallés au nord du Mali, faisant régner un ordre armé qui s’est soldé par des attaques de villages ayant causé des dizaines de morts. Prenant conscience de leur force, ils ont réactivé la rébellion touarègue pour s’attaquer aux garnisons de l’armée malienne et lui causer des dizaines de victimes dans des conditions parfois atroces. Dans leur avancée, ces rebelles regroupés au sein du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) trouvent des alliances objectives tantôt avec les Touaregs islamistes d’Ansar Dine, tantôt avec les combattants d’Al Qaeda au Maghreb islamique (AQMI) qui retiennent beaucoup l’attention des gouvernements occidentaux.
Les rebelles du MNLA ou d’AQMI ne représentent pas la population du Nord du Mali, qui n’aspire qu’à une vie pacifique – 200 000 personnes ont dû fuir leurs foyers pour échapper aux violences de ces derniers mois. Et en commettant leur coup d’Etat, les jeunes officiers du CNRDR ont lourdement porté atteinte aux institutions démocratiques d’un pays qui devait connaître son prochain scrutin présidentiel dans cinq semaines. Les actions de ces trois groupes traduisent néanmoins la tension liée à l’extrême précarité économique et sociale durement ressentie par la population d’un pays dont deux habitant/es sur trois vivent sous le seuil de pauvreté et qui figure au 178e rang sur 182 de l’Indice de développement humain des Nations unies.
Comment redonner un horizon économique aux habitant/es du Mali ? Voilà qui devrait être la principale préoccupation de la politique française et européenne dans la région, bien plus que la surveillance d’AQMI. Aider au développement de la part du vivrier dans les exploitations cotonnières et garantir aux producteurs de coton une redistribution de la valeur ajoutée pour obtenir un revenu minimum suffisant, inciterait par exemple les Malien/nes à se détourner des mouvements rebelles armés.
Face à l’urgence, Europe Ecologie les Verts condamne ce coup d’Etat militaire, appelle les parties en conflit à respecter les droits humains et à trouver une issue non-violente et négociée, réaffirme enfin son attachement au droit international ainsi qu’à l’ordre constitutionnel et à l’intégrité territoriale du Mali.
Cécile Duflot Secrétaire nationale EELV
Fadimata Toure pour le Parti Ecologiste du Mali
Catherine Greze Députée européenne pour le Groupe Verts/ALE au PE
3 réflexions au sujet de “Non au coup d’Etat : redonnons un horizon démocratique et économique aux Malien/nes !”
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Bonjour, je viens de prendre connaissance de ce communiqué.
Je trouve incroyable que la revendication touareg soit à ce point niée.
L’argument du danger islamiste ne peut primer sur le droit à l’autodétermination des peuples.
Vous êtiez pour l’intervention soviétique en Afghanistan ? (quand la résistance était à 90% composée d’islamistes, parfois très radicaux)
La situation au nord n’est pas claire. Même si ce que vous dites est vraie et que le MNLA s’est laissé vampirisé par les islamistes, cela n’enlève rien à la légitimité des droits du peuple touareg.
Bien cordialement
Bertrand Jullien
Bertrand, relis le communiqué : il ne nie pas l’autodétermination du peuple toureg, il dit simplement sur l’union armée MNLA + AQMI + Ansar Dine ne représente pas la population du Nord Mali. Les événements des quatre mois qui ont suivi la publication de ce communiqué ne semblent pas le contredire.
Les Amazighs de France avec l’Azawad
Appel à manifester le samedi 16 février 2013 à 14h, à Paris
Depuis la décolonisation du Mali, les citoyens de l’Azawad (nord-Mali) vivent dans la marginalisation et le dénuement. Leurs révoltes ont été souvent violemment réprimées et les «accords de paix» signés avec l’Etat malien n’ont jamais été suivis d’effet.
Las de subir les injustices en toute impunité, les habitants de l’Azawad ont créé le Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA) afin de prendre leur destin en main, conformément au droit international relatif au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Afin de contrecarrer l’objectif du MNLA, le gouvernement malien et certains Etats étrangers ont fortement favorisé l’entrée et le renforcement de groupes islamistes terroristes et narcotrafiquants dans cette région.
C’est ce qui a donné le motif officiel à l’intervention militaire française au Mali, avec l’objectif initial de «stopper l’avancée des islamistes» vers le sud, menaçant la capitale du Mali. Mais on constate que la France qui intervient opportunément au moment où Bamako est menacée est restée indifférente à l’occupation de l’Azawad par les intégristes et à leurs crimes. Cela montre le parti pris français qui a toujours soutenu l’Etat du Mali contre les peuples de l’Azawad et en particulier les Touaregs.
Par ailleurs, la France s’est rajoutée un nouvel objectif, celui de «reconquérir l’intégrité territoriale du Mali», ce qui supposerait qu’elle attaquerait le MNLA et le peuple de l’Azawad ? Et pourquoi la France ne condamne-t-elle pas les exactions commises par l’armée malienne et ne punit-elle pas leurs auteurs ?
Nous rappelons que le drame actuel des populations de l’Azawad et des Touaregs en particulier découle directement du découpage territorial arbitraire de cette ancienne colonie française. La responsabilité de la France est donc doublement engagée : dans la création d’un Etat artificiel sans le respect pour les peuples et dans l’opération Serval si celle-ci outrepasse le strict objectif de débarrasser l’Azawad des islamo terroristes et autres bandes de narcotrafiquants.
En conséquence, nous, Amazighs de France, déclarons notre solidarité avec les populations de l’Azawad et appelons tous les citoyens épris de justice et les défenseurs des peuples opprimés, à exprimer leur soutien à l’Azawad et au peuple Touareg en manifestant massivement le :
Samedi 16 février 2013 à 14h
de l’Assemblée Nationale (Place Edouard Herriot)
au Ministère des Affaires Etrangères (37, Quai d’Orsay, Paris-7°)
Toutes et tous,
– Pour le droit à la vie et à la liberté pour le peuple Touareg sur la terre de ses ancêtres
– Pour le respect du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes
– Contre l’impunité concernant tous les crimes commis contre les peuples de l’Azawad
– Contre la Françafrique
– 50 ans de marginalisation, de répression, de crimes, de révoltes et d’exil…ça suffit !
Premiers Signataires :
Congrès Mondial Amazigh, Organisation de la Diaspora Touarègue en Europe, Association Temoust, Tamaynut-France, Action Culturelle Amazighe Laique, Association Tiwizi59, Association Corso-Berbère, Association culturelle Amazigh, Association Amazigh Marseille, Mouvement pour l’autonomie de la Kabylie (MAK), Association ADEKA-Paris, Collectif des Amazighs de France pour le changement démocratique au Maroc, Tamurt.info, Tamurt.tv, radiotamurt.com, Ass.Taferka, Fondation Lounes Matoub, Cercle d’études et de réflexion sur l’autonomie de la Kabylie (CERAK), Gouvernement Provisoire Kabyle (GPK)