Exposé des motifs :
Le système de santé est en crise et nos concitoyens en ont conscience, qui font de la santé leur 2ème préoccupation, après le chômage, selon le sondage IFOP du 30 mars 2012.
Ce qui caractérise cette crise est qu’elle est avant tout sanitaire. Le premier problème est l’explosion de l’épidémie de maladies chroniques : les cancers, qui sont devenus la première cause de mortalité dans notre pays, les maladies cardio-vasculaires, le diabète, qui a progressé à une vitesse impressionnante ces dernières années avec la surconsommation de sucre, en particulier chez les enfants, l’obésité qui l’accompagne ; l’asthme et les allergies avec les problèmes de qualité de l’air ; la souffrance psychique, en particulier au travail, le suicide, qui est devenu un problème de santé publique très important, les maladies psychiatriques et neuro‑dégénératives, telles que l’Alzheimer, qui sont en expansion, les troubles de la reproduction liés aux perturbateurs endocriniens … Les principaux facteurs de ces maladies portent sur les modes de vie et sur l’environnement, ce qui fait de la crise une crise écologique, avec celles du climat, de l’énergie, de la biodiversité.
La crise sanitaire s’accompagne d’une crise financière dont les causes sont multiples, tant en ce qui concerne les recettes que les dépenses. Mais il faut souligner qu’elle est directement liée à l’augmentation des maladies chroniques. En effet, l’augmentation du budget annuel des soins aux Affection de Longue Durée (ALD, dans les termes de la Sécu) est d’environ 10 milliards d’€ depuis 20 ans et correspond à peu près exactement au déficit annuel de l’Assurance Maladie. Autrement dit, si l’on avait le taux de maladies chroniques de 1990, il n’y aurait pas actuellement de déficit de l’Assurance Maladie.
La crise est structurelle, c’est-à-dire qu’elle n’a pas tendance à se résoudre spontanément, ceci pour plusieurs types de raisons :
– Tout d’abord parce que l’augmentation des maladies chroniques est plus rapide que les progrès des soins médicaux qui essaient de les enrayer.
– Ensuite parce que la gestion actuelle repose sur l’endettement et, pour ne pas alourdir le poids de l’impôt affecté, le Remboursement de la Dette Sociale (RDS), on augmente la durée de remboursement. Pour le fonctionnement de la seule année 2010, on a augmenté de 4 ans les remboursements, de 2021 à 2025. Ce n’est pas durable.
– Egalement parce que l’accès aux soins recule. L’augmentation de la pauvreté – de plus en plus de nos concitoyens ne peuvent plus se payer une mutuelle -, alliée à la hausse du « reste à charge » des usagers (ticket modérateur, forfaits, franchises, Dépassements d’Honoraires,…) font que 38 % de nos concitoyens déclarent avoir renoncé aux soins pour des raisons financières. Dans le même temps, la diminution drastique du nombre d’étudiants en médecine, les inégalités de répartition des médecins entre généralistes et spécialistes et entre régions ont pour résultat qu’on a laissé s’instaurer des déserts médicaux. Comment vivre sur un territoire, en particulier pour les personnes âgées, quand il n’y a plus de médecin accessible ?
– Enfin parce que les pratiques actuelles sont responsables de sur-prescriptions d’examens et de traitements inutiles et coûteux.
Les inégalités de santé sont majeures et caractérisent la situation française. A 35 ans, les écarts d’espérance de vie sont de plus de 8 ans entre les 2 extrémités de l’échelle, les instituteurs et les manœuvres. Les inégalités sont également très fortes entre hommes et femmes et entre les régions. Et elles se poursuivent encore après la retraite, notamment en termes d’espérance de vie en bonne santé. De plus, dans la période récente, les inégalités sociales de santé sont croissantes.
L’idéologie dominante cache cette situation en affirmant que l’espérance de vie continuera nécessairement d’augmenter. Nicolas Sarkozy se trompe et nous trompe quand il affirme que les collégiens d’aujourd’hui vivront centenaires. Les centenaires d’aujourd’hui ont vécu leur enfance avant la guerre de 1940. Depuis les années 60 sont survenus la suralimentation, les pollutions et le stress de la vie quotidienne qui caractérisent la vie moderne. Il est très possible que nous soyons aujourd’hui au sommet de la courbe de l’espérance de vie, surtout quand on sait qu’elle commence à diminuer aux USA.
La politique de santé est pour nous écologistes au cœur de l’ensemble des politiques publiques agricoles, alimentaires ou industrielles, car la santé de nos concitoyens est bien souvent l’une des conséquences de ces politiques publiques.
C’est pourquoi, seule une nouvelle politique de santé orientée vers la prévention par l’éducation, l’action sur les déterminants environnementaux des maladies chroniques et l’accès aux soins pour tous pourra inverser l’évolution de la situation sanitaire. Il est urgent d’en faire une priorité politique pour le nouveau gouvernement que nous appelons de nos vœux.
Motion :
C’est pourquoi nous lançons un :
Appel 2012 pour une santé écologique et solidaire
Nous, citoyens français du 21ème siècle, appelons à la reconquête de la santé. La santé est au rang des toutes premières préoccupations des citoyens, mais elle nous échappe et se dégrade. Les maladies chroniques ont pris le devant de la scène. Les épidémies modernes sont aujourd’hui le cancer, les maladies cardio-vasculaires, le diabète et l’obésité, les allergies, la souffrance psychique, les troubles de la reproduction, la souffrance au travail, le suicide, les maladies dégénératives du système nerveux et les pathologies psychiatriques… La hausse des dépenses qu’elles entraînent correspond quasiment au déficit de l’Assurance Maladie.
Nous ne pouvons pas accepter la montée de ces maladies, comme une fatalité alors qu’elles sont liées pour l’essentiel à des modes de vie et à un environnement nocifs. Elles seraient accessibles à la prévention notamment par des mesures générales touchant de nombreux domaines tels que le logement, l’urbanisme, les industries responsables des facteurs des maladies chroniques, … Nous ne pouvons plus accepter que les politiques de prévention qui pourraient éviter ces maladies ne soient jamais prises au sérieux, jamais prises en compte et jamais financées à hauteur des besoins, a fortiori quand le coût de nombreuses mesures préventives, réglementaires notamment, est particulièrement peu élevé au regard des coûts colossaux sur le plan sanitaire, économique, social et humain de ces maladies évitables.
Nous ne pouvons plus accepter que les soins médicaux soient abandonnés à la logique libérale, comme s’il s’agissait de n’importe quel commerce, et qu’on voie des services hospitaliers en grandes difficulté, des territoires qui deviennent des déserts médicaux et des citoyens de plus en plus nombreux qui renoncent aux soins parce qu’ils ne peuvent plus payer. La France est encore un pays où l’on a les moyens de soigner, de nourrir et de loger tout le monde, pour peu qu’on réduise un peu les inégalités.
Nous ne pouvons pas accepter qu’on gère la Sécurité Sociale par l’emprunt, mettant à la charge des générations futures les dépenses de fonctionnement d’aujourd’hui.
Nous ne pouvons pas accepter qu’on considère les soins simplement comme un secteur de développement économique, sans s’interroger sur leur utilité, sur leurs résultats et sans définir démocratiquement des objectifs de santé publique, c’et-à-dire sans s’interroger sur la qualité de vie des humains.
La santé ne peut être considérée comme un secteur technique, qui n’intéresse pas vraiment les politiques, alors que c’est une des toutes premières préoccupations de nos concitoyens et que la Sécurité Sociale représente un budget supérieur à celui de l’Etat.
Nous ne pouvons en particulier pas laisser faire la politique sécuritaire qui instrumentalise la psychiatrie et sacrifie la politique de santé mentale et les pratiques de réseau au profit de la répression.
C’est pourquoi, à l’occasion des élections, nous appelons à un véritable débat démocratique sur ce que nous attendons du système de santé. La santé ne commence pas avec la maladie ; au contraire, elle est à protéger et à développer, afin d’être en bonne santé c’est-à-dire « bien dans sa peau » le plus longtemps possible. Ainsi conçue, la santé n’est pas une marchandise, mais un facteur de développement personnel, d’équilibre social, de prospérité et constitue un des piliers du développement durable.
Quand les dangers pour notre santé viennent des modes de vie et de consommation, nous voulons faire de l’éducation pour la santé et de la promotion de la santé un enjeu national majeur. Le premier objectif pourrait être de permettre à tous de reconquérir une alimentation saine et équilibrée. En complément d’un vaste programme d’éducation, il implique de dégager l’alimentation des manœuvres publicitaires et marketing de toutes sortes ainsi que des intérêts des lobbys des industries agro-alimentaire et chimique ; de limiter les transports par la production locale et de construire un équilibre des échanges avec les peuples du sud de la planète. Ce seul objectif, l’alimentation saine et équilibrée, est susceptible d’améliorer considérablement la situation sanitaire, d’entraîner des gains majeurs sur le plan des soins, et beaucoup plus largement encore sur le plan social et économique.
Quand les facteurs de risque sont liés aux pollutions de l’environnement et aux conditions de travail, nous voulons une politique de santé environnementale et au travail qui protège réellement la santé de la population. Nous proposons comme premier objectif qu’aucun parent de jeune enfant ne soit contaminé par des perturbateurs endocriniens, que sont en particuliers les pesticides, aujourd’hui très largement répandus.
C’est pourquoi nous voulons un nouvel investissement de 1% du budget des soins dans la prévention primaire, hors dépistage médical, soit 1,7 milliards d’€, qui permettrait de structurer dans chaque région un service d’éducation pour la santé et de promotion de la santé et un service de santé environnementale et au travail. Quand on sait par exemple que le coût des soins du seul diabète est de 12,5 milliards d’€ par an, que le coût des maladies du tabac est estimé à 18,3 milliard d’€ par an pour les soins et 18,1 milliards d’€ pour la perte de productivité, le coût de celles de l’alcool à 37 milliards d’€ au total, etc…, il est clair qu’en faisant régresser ces maladies de seulement 10 %, l’investissement dans la prévention primaire peut rapidement permettre de faire des économies infiniment supérieures à l’investissement.
Mais nous aurons toujours besoin des soins, et nous voulons qu’ils soient assurés avec équité et solidarité, sans laisser personne au bord du chemin… ou sur le trottoir !
Nous voulons une couverture de l’ensemble du territoire par les soins de premier recours car ils représentent une véritable mission de service public. La solution est de créer des Maisons de santé et de l’Autonomie comprenant une équipe de soin pluridisciplinaire et un service d’Education pour la Santé et de Santé Environnementale. Une telle maison pour une population d’environ 10000 habitants permettra de constituer une équipe de médecins généralistes capable d’assurer la permanence des soins.
Nous pensons qu’on ne sortira pas de la surconsommation, voire du gâchis actuel, sans confier une mission de coordination des soins médicaux, qui ne pourra être réellement assurée que par la médecine générale. Sa mise en place ainsi que la couverture du territoire sont à négocier avec les organisations professionnelles et impliquent en particulier de former un nombre de médecins généralistes qui réponde aux besoins de la population. Une coordination est également nécessaire entre les soignants, les travailleurs sociaux et les services à domicile.
Nous voulons un hôpital public qui continue d’assurer sa mission d’accueillir tout le monde, pour tous les types de soins, et financé en tenant compte de ses missions d’intérêt général. Il faut rompre avec la logique de l’ « hôpital – entreprise » développée par la loi Hôpital-Patient-Santé-Territoire (HPST) qui organise une concurrence déloyale entre l’hôpital public et les cliniques privées, qui sacrifie encore une fois la prévention et qui déséquilibre le pouvoir en faveur de l’administration, au détriment des professionnels, des usagers et des élus.
La rationalisation de la consommation de soins est possible sans rationnement, et elle est d’autant plus utile qu’il est urgent de revenir sur les franchise, forfaits, dépassements d’honoraires qui augmentent régulièrement le « reste à charge » des usagers. Il faut viser à court terme un taux de 80 % de remboursement et aller vers la gratuité des soins. Dans le cadre des contraintes économiques actuelles, une réorientation du système de santé peut être génératrice de marges de manœuvres budgétaires importantes, tout en améliorant la santé de la population.
Pour ce faire, il est urgent de décentraliser, de démocratiser le système de santé en mettant en place des Conseils Régionaux de Santé en lien avec les conseils régionaux et de s’appuyer sur un renouveau du partenariat donnant voie au chapitre et un véritable pouvoir à une représentation des usagers.
Qu’on ne s’y trompe pas, nous ne pouvons pas nous satisfaire de l’immobilisme, car la situation se dégrade et l’organisation actuelle ne trouve pas de solution à la crise. C’est par une profonde réforme que nous pourrons retrouver l’esprit de solidarité qui avait prévalu en 1945 avec la création de la Sécurité Sociale.
C’est à nous, collectivement, de penser la santé du 21ème siècle. L’heure est à l’action pour construire une nouvelle politique avant qu’il ne soit trop tard.
Pour : 53 ; abstentions : 2
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-> Décision CF-12-076
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Une réflexion au sujet de “Appel pour une nouvelle politique de santé”
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Une motion verbeuse, qui a du mal à aller à l’essentiel ; rien d’original et d’important n’est présenté ici.
Proposer aux médecins généralistes d’être la pierre angulaire des futures maisons de santé est bien naïf. Nos médecins
sont formés pour gérer la maladie, pas pour promouvoir la santé, Donnons leur une place, mais pas la première dans une politique de prévention primaire. Et les thérapeutiques non conventionnelles et naturelles dans tout ceci ? rien est dit à leur sujet. Réduisons drastiquement le recours aux pesticides et aux engrais chimiques, développons le bio et le local aussi sur critères santé.