Bruno Lemaire a annoncé le montant de l’aide qui sera apportée par l’État au groupe Air France-KLM : 7 milliards d’euros selon deux modalités, d’une part, 4 milliards d’euros de prêts bancaires garantis par l’État à 90 %, d’autre part, une avance d’actionnaire par l’État de 3 milliards.
Problème, cette aide très conséquente n’est assortie d’aucune conditionnalité environnementale, ni sociale. Les engagements de façade pris par Air France – compensation carbone de ses vols intérieurs et présentation d’un « plan écologique » – ne constituent en aucun cas un engagement formel . Preuve une fois de plus que ce gouvernement qui n’a pas su nous préparer à cette crise sanitaire, ne saura pas mieux prévenir la prochaine : la crise climatique.
Il aurait pourtant fallu préparer Air France-KLM aux nécessaires adaptations à la crise climatique et exiger notamment des contreparties environnementales et sociales à ce plan de sauvetage :
- La présentation d’un plan climat du groupe comportant une trajectoire carbone conforme à l’Accord de Paris. Le PDG d’Air France-KLM, Ben Smith, annonce « l’ambition de réduire de 50 % ses émissions de CO2 à l’horizon 2030 ». Cet engagement doit être formalisé et suivi. Ce sont bien les émissions du groupe et non par vol qui doivent être réduites dans ces proportions, et constituer une conditionnalité stricte de l’aide apportée.
- La fermeture des lignes aériennes intérieures sur lesquelles une alternative en train existe en moins de 4 heures. Rappelons que l’avion émet 45 fois plus de CO2 par kilomètre et par voyageur, que le TGV.
- L’abandon des projets d’extension d’aéroports induisant une croissance du trafic et le plafonnement du trafic aérien au départ de la France au niveau de 2019.
- L’instauration d’un couvre-feu pour les aéroports insérés dans un tissu urbain, à l’instar de celui existant pour la plateforme d’Orly.
- L’arrêt de la privatisation d’ADP, pour assurer la maîtrise publique de la trajectoire de décarbonation.
- L’abandon du CDG Express, et la réallocation des financements prévus à la réduction des émissions de carbone et à la sécurisation des parcours professionnels des salariés d’Air France, et de toute la filière aérienne en France.
- La renégociation de l’accord de GPEC (Gestion Prévisionnelle des Emplois et Compétences) de l’entreprise, instaurant des moyens supplémentaires, abondés par l’État, pour financer une sécurisation des parcours professionnels, essentielle dans ce secteur.
L’État doit par ailleurs engager :
- La négociation d’une charte écologique et sociale engageant les principaux acteurs des transports, incluant la SNCF et impliquant les fédérations syndicales concernées doit être engagée, permettant une action coordonnée sur un secteur dont les émissions de gaz à effet de serre continuent à croître, et qui appelle un report modal qui doit s’accompagner de transitions professionnelles.
- La révision des règles organisant le trafic aérien au niveau européen et international, incluant la révision de la Convention de Chicago qui empêche, jusqu’à présent, la taxation du kérosène, contrairement aux autres carburants de transport.