Et si la réindustrialisation passait par l’écologie ? Venez participer au colloque organisé le jeudi 25 Avril 2013 à l’Assemblée nationale. Débats et tables rondes, vous trouverez le programme de cette journée sur le site des ecolodepute-e-s. En attendant, le vice-président du Conseil régional en charge de l’écodéveloppement et délégué industrie de la commission Economie d’EELV, Christophe Porquier, répond à cinq questions sur l’avenir de l’industrie en France.
Quelles sont les raisons de la désindustrialisation en France ?
Les causes sont nombreuses. On pourrait citer l’éclatement du tissu industriel français, composé de nombreuses PMI et PME, un fable taux d’investissement, un taux de financement de la recherche qui plafonne à 2,2% du PIB malgré toutes les aides consenties, un euro fort qui pénalise les exportations pour les pays du sud de l’Europe.
Il n’y a eu aucune stratégie industrielle dans le pays pendant 30 ans car les services étaient supposés prendre le relais en termes d’emplois, et parce que les fleurons industriels français semblaient échapper à la crise et alimenter naturellement le « réseau industriel » qui l’accompagnait. En quelques décennies, cette situation a été bouleversée parce que les groupes ont essuyé des échecs ou parce qu’ils ont se sont internationalisé. Le déficit de la balance commerciale de l’automobile, autrefois excédentaire, témoigne de cette évolution. L’appareil productif français a été laissé à son sort pendant des années, sans cap et sans stratégie. L’industrie ne représente plus que 10% de la valeur ajoutée produite en France. En dix ans, elle a perdu le tiers de ses salariés en France Au-delà des plans sociaux qui font la Une, c’est un traumatisme sourd qui blesse notre pays en profondeur.
Les plans sociaux chez Arcelor-Mittal, Goodyear, Sanofi, PSA… ont fait la une de l’actualité. Est-ce que les écologistes ont des réponses pour les salariés qui risquent de perdre leur emploi dans l’industrie ?
Tout d’abord, nous sommes solidaires avec les mouvements de défense de l’emploi dans ces entreprises. Il faut ensuite étudier la possibilité d’une reprise d’activité totale ou partielle sur le site. C’est le cas chez Goodyear où l’activité agraire est viable. Mais le problème de fond est l’impréparation face à ces restructurations qui sont engagées sans concertation et sans information. A Aulnay, les investissements ont cessé sur le site. Des équipes ont été déplacées. La fermeture a été préparée en amont avant d’être annoncée publiquement. Idem à Amiens où le site de Goodyear n’a pas reçu d’investissements depuis bien longtemps. L’activité a lentement décliné et finalement la fermeture est présentée comme inéluctable. C’est une tendance qu’il faudrait inverser, et c’est pourquoi nous portons l’idée d’un fonds de reconversion industrielle.
Quel est ce projet de fonds de reconversion ?
Aujourd’hui une entreprise décide seule de sa stratégie et de sa restructuration. Si elle décide de fermer un site, une indemnisation est fixée et les pouvoirs publics sont mis devant le fait accompli. Ils doivent gérer en situation de crise l’avenir des hommes et des femmes qui se trouvent sur le carreau, et parfois les conséquences sanitaires ou environnementales liées à l’activité. Il faut renverser cette logique. Notre modèle économique – surconsommateur de ressources – est aujourd’hui en crise. Des restructurations sont inévitables mais il faut les accompagner avec des dispositifs de reconversion. C’est un processus qui doit s’engager en amont avec les pouvoirs publics pour étudier les solutions et les lisser dans le temps. Il faut pour cela que les industriels et les pouvoirs publics abondent un fonds qui pourrait financer des besoins concrets de formation, de R&D, d’innovation commerciale, de requalification de site… La transition écologique, c’est la création d’activités et d’emplois. C’est l’investissement pour créer des emplois.
Quelle politique en direction des PMI ?
C’est un point essentiel Le tissu industriel français est très éclaté et diffus. 84% des entreprises françaises ont moins de 10 salariés. Nous manquons de PME/PMI de bonne taille et des ETI (Entreprises de taille intermédiaires) qui aient suffisamment de moyens financiers et humains pour innover, s’adapter, trouver de nouveaux marchés. Nous pensons qu’il revient aux Régions de disposer clairement d’une compétence économique décentralisée pour aider ces entreprises sur les territoires. La Banque publique d’investissement est également un outil intéressant pour avancer en ce sens.
A quoi ressemble l’industrie de demain pour les écologistes ?
Elle est adaptée à un monde où les ressources sont rares et chères. Elle est économe en énergie et recycle ses flux. Elle dispose de représentants salariés dans ses instances. Elle est innovante au plan technologique mais aussi social, financier, commercial.. pour anticiper les évolutions de la société. Elle fonctionne en réseau sur son territoire. L’économie circulaire, l’économie de fonctionnalité, l’éco-conception sont des voies de rénovation cruciales pour l’industrie.
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2 réflexions au sujet de “Avenir de l’industrie : cinq questions à Christophe Porquier”
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Je suis plus particulièrement intéressé par la politique de filières et le soutien à l’innovation.
Un domaine encore à investir est celui de « l’environnement industriel ». Trop abandonné aux Grands corps d’Etat, qui ont le vrai pouvoir en France et en particulier dans l’impasse du nucléaire, civil et militaire, qu’ils nous imposent, le mouvement écologiste n’aura pas réussi à suffisamment intégrer et travailler ce domaine. C’est toute la législation de 1976 ICPE en France et Directives IPPC/Séveso3 qui en fonde ce domaine potentiellement créateur d’activités.
Deux sujets :
-Pétroplus, par exemple, dont il s’agit de savoir qui va prendre la dépollution du site que Shell, comme à Berre l’Etang, a laissé dans un état lamentable. Rien que 160 millions € d’estimation de travaux et qui va payer maintenant ?
-eau de procédé et la pollution = obtenir législativement et localement sur tout site d’activité polluante le recyclage intégral des eaux, en général après épuration (STEP). Car au moindre accident c’est le rejet au milieu et la destruction des valeurs économiques de l’écosystème. Exemple papèterie Kappa SMURFIT à Bizanos 33 l’été dernier, éclatement d’une cuve vétuste de « liqueur noire » et direct dans les ruisseaux vers le Bassin d’Arcachon avec son lot de ravages.
L’EI est un vaste champ à investir avec en priorité la lutte absolue contre les pollutions de la production. Ce qui ne doit surtout pas obéré la notion de production écologiquement et socialement utile.
Cela ne fait que quelques dizaines d’années que nous travaillons et proposons cette approche.
J’ai vécu la reconversion des Forges de l’Adour 1965 et le démarrage du gigantesque aménagement industriel de Fos sur Mer / Etang de Berre 1970. Quelques années d’expérience dans l’industrie lourde comme opérateur de production, délégué du personnel / CHSCT et écologiste dont « quelques » collègues partout en France avec qui nous avons produit les « Dégâts du progrès » ou « Face à un produit toxique que faire » ou « sommeil à vendre » du travailleur / euse posté… avec la CFDT et beaucoup de propositions qualitatives et avancées gagnantes pour les travailleurs dans l’industrie. Il n’est pas impossible de pouvoir faire réémerger cette capacité collective de propositions à partir du terrain. Michel Botella 64100 Bayonne.18 04 2013