Les conclusions de la 12ème Convention mondiale pour la biodiversité

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Alors que le déclin de la biodiversité se poursuit – illustré par la diminution de moitié du nombre d’animaux sauvages en l’espace de 40 ans d’après un récent rapport WWF – la Convention mondiale pour la biodiversité, 12ème du nom, se déroulait la semaine dernière à Pyeongchang en Corée du Sud. Alain Chabrolle, Vice-Président du Conseil Régional de Rhône-Alpes, délégué à la Santé et à l’Environnement, s’y est rendu et nous livre les conclusions de cette convention, ainsi qu’un regard plus personnel sur l’évènement. 

 

L’érosion mondiale de la biodiversité se poursuit mais à Pyeongchang les Etats confirment leurs mobilisations pour agir.

La Convention Mondiale pour la Diversité Biologique s’est terminée vendredi soir dernier, à Pyeongchang, en Corée du Sud. Cette 12ème Conférence des Nations-Unies (COP12) sur la Biodiversité (l’équivalent pour la biodiversité de la Conférence Mondiale pour le Climat) s’est tenue du 7 au 17 octobre 2014.

Elle est plus connue pour sa 10ème Conférence, tenue à Nagoya en 2010, qui a adopté un Plan Stratégique 2011- 2020 pour la diversité biologique, comportant 20 objectifs connus sous le nom d’objectifs d’Aichi. Cette convention a trois buts : la conservation, l’utilisation durable des composantes de la diversité biologique (valorisation, et non marchandisation…), l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages liés à leur utilisation (APA), avec le débat récurrent sur les peuples autochtones.

A l’heure où l’on parle beaucoup de la Transition Energétique et des enjeux climatiques, particulièrement en vue de la COP21 à Paris en 2015, il est très important de ne pas oublier l’érosion mondiale de la biodiversité (moins 52% du nombre d’animaux sauvages en 40 ans selon le WWF), et que l’avenir de l’Homme passe aussi par la protection des ressources naturelles et de nos biens communs. A cet égard, et pour la première fois dans ce cadre, a été affirmé fortement que la nature et la biodiversité pouvaient être une des grandes solutions face au défi climatique mais aussi au défi alimentaire.

Quatre ans après l’adoption des 20 objectifs d’Aichi, cette Conférence a été l’occasion d’évaluer à mi parcours les résultats obtenus dans le cadre de la mise en œuvre du Plan Stratégique pour la diversité biologique 2011-2020. Devant l’insuffisance des progrès réalisés un appel général à la mobilisation des pays a été lancé afin que chacun d’entre eux renforcent ces politiques, ces actions, et la mise en œuvre concrète et rapide de celles-ci.

Face à ce constat, on peut noter deux résultats importants. Le premier et le principal est l’entrée en vigueur le 12 octobre 2014 du Protocole de Nagoya sur les APA. L’Union Européenne et 53 autres pays l’ont déjà ratifié. Les instruments de mise en œuvre de protocole ont été créés ; il ne reste plus qu’à la France de voter rapidement sa future Loi Cadre sur la biodiversité, qui s’engage sur le Protocole de Nagoya, au premier semestre 2015 afin que notre pays puisse enfin ratifier celui-ci.

Le deuxième résultat, qui n’était pas du tout acquis à l’ouverture de la Conférence, est la confirmation du doublement des financements internationaux alloués à la biodiversité pour les pays en développement, d’ici à 2015, et leur maintien jusqu’en 2020. Cet accord avait été pris il y a 2 ans à Hyderabad en Inde (COP11). Un appel important a également été lancé dans la Déclaration Ministérielle de Gangwon (Province de Pyeongchang) afin que le programme de développement post 2015 des Nations-Unies puisse intégrer dans ses objectifs de Développement Durable ceux de la protection de la biodiversité, à travers les engagements d’Aichi.

Plus que les Conventions précédentes, les différentes parties ont soulignées l’impérieuse nécessité de politiques intégrées. Ainsi, apparaît pour la première fois un engagement sur l’enjeu Santé et Biodiversité, que nous avons vivement porté au niveau national, ainsi que sur la biodiversité et les changements climatiques. La Délégation Française s’est bien impliquée dans ces enjeux.

De nombreux engagements importants ont été pris sur le biocarburant, la restauration des écosystèmes, les espèces exotiques envahissantes, la réduction des risques naturels, etc. Après des débats très vifs entre certains pays (Espagne, Angleterre, …) un accord a été trouvé pour reconnaître 148 aires marines d’importances écologiques ou biologiques sur 150 proposées.

La biologie synthétique, tout nouveau sujet, a également fais l’objet de débats très animés (le Brésil veut vendre son eucalyptus OGM, …) : l’approche de précaution a été retenue, et les débats se poursuivront lors de la prochaine Conférence.
L’Education à l’Environnement et au Développement Durable au profit de la biodiversité a fait l’objet de nombreuses sessions, suites aux propositions portées par la France il y a 2 ans à travers les Régions, les ONG, et la Ministre de l’époque. A cet égard, Nrg4SD a eu l’occasion de représenter son travail « Nature & Culture ». Des débats forts intéressants ont porté sur l’analyse et l’impact de l’empreinte écologique des territoires (travaux de la Catalogne, de la Suisse, …), ce qui donne envie de multiplier ce type d’études très pertinentes.

En parallèle se sont tenus deux évènements importants concernant l’implication des Collectivités Territoriales et celle des entreprises. D’une part, le Sommet de la Biodiversité pour les Villes et les Gouvernements infranationaux s’est déroulé les 13 et 14 octobre. Il a souligné la mobilisation des autorités locales et des gouvernements sub-nationaux pour la protection concrète de la biodiversité ; ainsi la Résolution de Gangwon / Pyeongchang pour les villes et les gouvernements infranationaux, salue la Déclaration commune des associations françaises d’élus et de collectivités territoriales pour la biodiversité, présentée à Hyderabad en octobre 2012. D’autre part, une Conférence dédiée au secteur privé avait pour objectif de mobiliser les entreprises pour une utilisation durable de la biodiversité ; ainsi l’association française Orée a présenté un travail original sur économie et biodiversité, et une plateforme innovante française dédiée à ces enjeux.
Cette Convention s’inscrit toutefois dans une forte contestation des associations environnementales locales, notamment l’organisation de Gangwon pour le Mont Gariwang qui dénonce les coupes à blanc des forêts, y compris dans des secteurs de forêts protégés, pour tracer les infrastructures des futurs Jeux Olympiques d’Hiver de 2018, dont le déficit prévisionnel se chiffrerait d’ores et déjà en milliard de dollars.

Pendant cette Convention, après 3 ans et demi de silence, les deux Corée ont renoué des échanges, pour une éventuelle future « réunification »… A cet égard, la large zone démilitarisée que nous avons pu visiter constitue d’Est en Ouest l’un des plus vastes et des plus riches corridors biologiques d’Asie.

Le Président de la Convention pour la Diversité Biologique a conclu par ce message : « Protéger la vie est une tâche urgente qui ne peut pas attendre ». Maintenant, il ne reste plus qu’à toutes les parties à se mettre au travail de manière encore plus déterminées.

 

Alain Chabrolle.

 

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