Eva Joly détaille sa politique énergétique en réponse à la CFE-CGC Energies

  1. 1. Politique énergétique européenne
    1. a. Quelles priorités défendrez-vous pour la politique énergétique européenne dans les prochaines années ? Quel modèle économique et politique vous semple le plus adapté à ces priorités ? quels seront vos engagements et vos actions concrètes à court, moyen et long terme ?

Rappelons tout d’abord que les politiques énergétiques sont des prérogatives des Etats membres à bien des égards ; nous souhaitons que cela évolue pour aller, d’une manière générale, vers des politiques plus fédéralistes.

Cependant, dès aujourd’hui, le cadre général dressé par l’Union Européenne doit être renforcé et doit évoluer pour permettre la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation énergétique. L’Union Européenne doit passer au minimum à un objectif de 30 % de réduction des émissions de GES en 2020 (ce qui est d’ailleurs un objectif cohérent avec celui de 20% d’efficacité énergétique), avec une fiscalité incitative et redistributive. Nous soutenons l’adoption d’objectifs contraignants en matière d’efficacité énergétique au sein de l’UE : l’élaboration de la nouvelle directive sur l’efficacité énergétique, ainsi que celle relative à la fiscalité de l’énergie, sont pour nous des priorités. Nous soutenons une utilisation régionalisée des fonds du FEDER, avec une orientation d’au moins 20% des fonds pour l’efficacité énergétique. Nous sommes favorables à la création d’un traité relatif aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique.

La « feuille de route Energie 2050 », adoptée par la Commission Européenne en décembre dernier et actuellement en discussion, nous semble être un progrès : ce document montre que seul un fort développement des énergies renouvelables et de l’efficacité permet d’atteindre les objectifs climatiques et énergétiques de long terme. Elle montre également que le nucléaire ou le captage et séquestration du carbone ne jouent qu’un rôle marginal, y compris au sein du système électrique, face à l’enjeu climatique. Nous regrettons cependant qu’un scénario qui associe très haute efficacité énergétique et fort développement des renouvelables n’ait pas été considéré (efficacité renforcée ou renouvelables renforcées sont étudiés séparément).

Une politique énergétique crédible en France ne peut ni attendre que les autres aient commencé ni être isolée d’une politique internationale de lutte contre les émissions de gaz à effets de serre. La relance des négociations pour prolonger et compléter le protocole de Kyoto est une impérieuse nécessité.

Nous soutenons la position de l’Union Européenne concernant l’inclusion de l’aérien dans le mécanisme de quotas, et plus largement nous souhaitons que l’UE permette l’inclusion des transports internationaux dans le système de régulation climatique. Nous proposons une convergence progressive des cadres réglementaires et tarifaires relatifs aux énergies renouvelables, afin de faciliter leur développement.

Nous proposons d’amorcer la mise en place d’un mécanisme d’ajustement aux frontières de l’Union européenne afin d’empêcher la concurrence environnementale déloyale. Les recettes seront reversées aux pays exportateurs par l’intermédiaire d’un fonds vert soutenant les investissements dans les meilleures technologies afin de réduire les émissions de GES chez nos partenaires économiques.

Face aux dysfonctionnements des marchés actuels, déresponsabilisant le Nord et favorisant la spéculation au Sud, une réduction des émissions de GES compatible avec l’objectif de réchauffement moyen inférieur à 1,5°C en 2100 est absolument indispensable et cela par le déploiement d’outils internationaux permettant de financer l’accès aux technologies et énergies propres.

 

    1. b. Quelle est votre approche de la sécurité énergétique de l’Europe ?

L’indépendance énergétique et la sécurité des approvisionnements sont des enjeux essentiels. Tout d’abord, nous faisons le constat qu’aujourd’hui nous sommes dans une situation de quasi-totale dépendance aux importations (pétrole, gaz, uranium) et de fragilité de l’approvisionnement, notamment électrique l’hiver en période de pointe ou en bout de réseau. En conséquence, le modèle que nous proposons est bien plus robuste et plus autonome.

Nous voulons une Europe qui devienne pleinement indépendante au plan énergétique, c’est-à-dire qui utilise les ressources qui sont les siennes : les énergies renouvelables. Nous voulons une Europe leader de l’efficacité énergétique, leader de l’économie verte, afin de réduire puis de supprimer toute dépendance aux importations.

 

  1. 2. Ouverture des marchés de l’énergie
    1. a. Quel bilan faites-vous de l’ouverture des marchés ?

Le bilan est bien évidemment largement mitigé ! Nous avons assisté au phénomène prévisible et annoncé de concentration des acteurs, de monopole européen, de détérioration du climat social, de réduction des dépenses d’investissement et maintenance des opérateurs, etc. Et cela, même pour ceux ayant le plus gagné dans cette séquence comme les anciens grands monopoles publics.

Nous regrettons qu’à l’époque le débat sur le service public ait été tronqué et caricaturé.

L’effort de transition énergétique représente un projet de société qui s’articule sur le long terme. En tant que tel, il devra nécessairement s’appuyer sur tous les acteurs, incluant l’Etat, les collectivités, les acteurs privés et les citoyens. En ce sens, l’organisation et la régulation des secteurs énergétiques imposent un effort de concertation et de transparence entre les parties prenantes, afin d’assurer que tous partagent les objectifs et les instruments de cette politique. A l’opposé d’une totale « dérégulation » qui, en soit, est le degré zéro de la politique publique.

    1. b. Considérez-vous que le modèle « concurrentiel » mis en œuvre jusqu’à présent dans le secteur énergétique soit adapté aux impératifs de lutte contre le réchauffement climatique, de traitement de la précarité énergétique et de sécurisation des approvisionnements énergétiques ? Considérez-vous que la loi NOME est adaptée à ces impératifs, et notamment à ceux des investissements industriels indispensables à la sécurité des approvisionnements ? Reviendrez-vous sur cette loi ? 

Tout d’abord, rappelons qu’il n’y a jamais eu, en France, de monopole sur la production d’énergie, ni dans l’électricité, ni dans les autres énergies (gaz, carburant…). Nous ne sommes pas favorables au développement de la concurrence pour la concurrence. Mais, nous ne sommes pas non plus favorables à développer un monopole public nouveau. Nous estimons nécessaire de développer un modèle énergétique transparent, équitable et dans lequel des entreprises publiques fortes jouent un rôle structurant.

Les enjeux du changement climatique ou de la précarité énergétique sont des enjeux multiformes, qui ne peuvent être résolus par la simple question de la possession des capitaux. Si tel était le cas, nous devrions en France, être protégés contre toute forme de précarité énergétique générée par les consommations d’électricité… Or, tel n’est pas le cas, à cause du chauffage électrique.

Nous estimons que la notion de service public mérite mieux que des débats caricaturaux.

Nous sommes opposés à la loi NOME et proposons de l’abroger, notamment parce que nous contestons la notion même de « rente nucléaire ».

 

 

    1. c. A partir du moment où la commission européenne considère que la loi NOME rend effective l’ouverture du marché français de l’électricité, pensez-vous que l’ouverture à la concurrence des ouvrages hydrauliques soit indispensable, cohérente avec le modèle précédent et finalement opportune au vu de la désoptimisation industrielle qui en résulte et notamment en l’absence de réciprocité avec les autres pays européens en la matière ?

L’enjeu principal des concessions hydrauliques est que la rente (l’électricité hydraulique est vraiment peu chère grâce aux investissements de nos aînés) soit utilisée pour financer le développement des nouvelles énergies renouvelables. En particulier, nous proposons que la CSPE repose sur l’ensemble des énergies renouvelables, de telle sorte que l’hydraulique participe au financement des autres énergies renouvelables. Aujourd’hui nous sommes inquiets car la seule mis en concurrence pourrait correspondre à une privatisation de la rente, sans plus d’utilité que de d’accroître les marges des actionnaires des grands énergéticiens.

 

 

  1. 3. Politique énergétique française
    1. a. Quel bouquet énergétique et quelle diversification prévonisez-vous à court, moyen et long terme pour la France ?

Europe Ecologie Les Verts porte un projet de transition énergétique. L’avenir énergétique de la France (et plus généralement de l’Europe et du monde) ne peut se résumer à l’évolution du mix de production. Par ailleurs, celui-ci ne peut se résumer à la question électrique et gazière.

La réduction des émissions de gaz à effet de serre, la dépendance aux énergies fossiles et fissiles, le risque nucléaire et la réduction de la précarité énergétique sont des enjeux étroitement liés et non hiérarchisables. Les réponses sont communes et constituent la transition énergétique dans son ensemble.

Pour 2020, nous prévoyons une diminution de la consommation d’énergie primaire de 20% et de 15% pour l’énergie finale. En 2050, notre objectif est de moins 50% de consommation d’énergie finale par rapport à 2009. Ces objectifs sont comparables aux objectifs officiels français et européens.

A horizon 2050, la production électrique et la production de chaleur avoisinent les 100% d’origine renouvelable. Notre scénario prévoit évidemment des étapes intermédiaires. Par exemple, pour l’électricité en 2020 et considérant le gain en efficacité (-16% de consommation électrique par rapport à 2009), 42% provient des renouvelables (éolien 14%, hydraulique, 16%, 6% de photovoltaïque, 6% de biogaz et biomasse), 42% d’origine nucléaire et 16% d’origine fossile.

Pour la production de chaleur, nous estimons qu’il est raisonnable de viser 20 à 21 MTep d’origine renouvelable (contre un objectif du Grenelle de 19,7 Mtep), ce qui permettrait, compte-tenu des objectifs d’efficacité d’atteindre plus de 35% de renouvelables dans la consommation globale.

Ces niveaux de production renouvelables sont compatibles avec ce que les professionnels du secteur estiment accessibles.

 

      1. b. Quelle place comptez-vous y donner au nucléaire ? quelle est votre position sur l’EPR, sur la gestion des déchets nucléaires et sur le démantèlement des centrales ? Considérez vous que l’Etat doit tenir un contrôle direct sur la gouvernance des entreprises exploitantes nucléaires ?

La production électro-nucléaire est amenée à diminuer pour atteindre zéro d’ici 2031 et aucun EPR n’est construit ou mis en service.

Ce positionnement concernant le nucléaire n’est pas doctrinaire : nous faisons simplement le constat, comme M. Lacoste1, que « personne ne peut garantir qu’il n’y aura jamais en France un accident nucléaire ». Nous faisons, comme l’IRSN2, le constat d’une usure des centrales (notamment des cuves) qui n’ont pas été conçues pour des durées de vie aussi longues. Au regard de l’expertise dont nous disposons, nous sommes réellement inquiets du risque d’accidents. Enfin, nous faisons le constat, même si cela est tabou en France, que notre système est ultra-vulnérable à toute attaque terroriste ou militaire.

Nous faisons le constat qu’un accident majeur a un cout faramineux (de 70 à 1000 milliards). Nous considérons que ce risque ne peut être pris, car les bénéfices sont très faibles voire inexistants.

Un accident majeur en France serait une catastrophe sanitaire. Mais elle serait également économique, sociale et environnementale. Le coût ne peut être couvert que par la puissance publique au travers de l’Etat. Notre économie, ainsi que l’économie européenne, serait dangereusement affectée : le Japon peut compter sur une industrie forte et dont l’économie mondiale dépend. Pouvons-nous en dire autant ? Notre économie repose, notamment, sur le tourisme, l’agriculture, les produits de qualité, ou encore sur une qualité de vie, qui seraient gravement atteints en cas d’accident majeur. Et nous n’avons pas, comme le Japon, un océan à l’est de nos frontières capable d’absorber la majeure partie des émissions radioactives portées par les vents dominants. A l’est, ce sont nos partenaires économiques.

Par ailleurs, une sortie du nucléaire consécutive à un accident, à l’image de ce qui est en train de se réaliser au Japon, aurait pour conséquence une forte augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Ceci n’est pas la conséquence de la sortie du nucléaire en tant que telle, mais celle d’une sortie précipitée et non programmée. Sans développer chacun d’eux, bien d’autres arguments militent en faveur d’une sortie progressive et programmée du nucléaire (déchets, limitation des ressources, dépendance à l’importation d’uranium, conséquences démocratiques, captation des ressources publiques…).

D’ici à ce que le dernier réacteur soit mis à l’arrêt, nous estimons indispensable de renforcer la sûreté, au-delà des recommandations de l’ASN suite aux Evaluations Complémentaires de Sureté (protection de toutes les piscines, considération du risque terroriste…).

De plus, le fait que les moyens de production nucléaires soient publics est indispensable ; mais cela ne saurait être suffisant. Les moyens de l’IRSN doivent être renforcés ainsi que son autonomie. Concernant l’ASN, nous avions pointé lors de sa création quelques éléments inacceptables (rôle d’inspection du travail, irrévocabilité, responsabilité légale…) qu’il conviendra de modifier. Enfin, nous considérons que des services spécialisés doivent impérativement être recréés dans l’administration centrale pour permettre un véritable dialogue avec l’ASN.

Enfin, il est indispensable que cesse le monopole de l’attention de la puissance publique (au travers de la recherche ou des entreprises publiques) consacrée au nucléaire : les autres filières (efficacité, renouvelables) doivent devenir prioritaires afin de permettre la transition énergétique dans son ensemble.

Mais notez bien que notre volonté de sortir du nucléaire ne signifie pas la destruction de la filière nucléaire, bien au contraire.

Il faut réorienter l’activité d’AREVA vers le démantèlement et la gestion des déchets. Ce sont deux marchés qui sont certains, contrairement à la construction d’éventuels réacteurs ou la promotion d’un combustible dont plus personne ne veut… L’excellence française dans le nucléaire doit perdurer et se développer (nous en avons besoin) ; elle doit être correctement orientée. Nous rappelons qu’AREVA était déjà en déficit en 2010, que Fukushima n’explique pas seul le déficit abyssal de 2011 et que les réductions d’emplois ne sont pas la conséquence d’un gouvernement écolo : il s’agit d’un problème de stratégie industrielle qui est déjà existant. Outre AREVA, nous sommes inquiets de la stratégie choisie par EDF : la situation financière de l’entreprise publique est préoccupante et ce en conséquence d’une stratégie industrielle hasardeuse qui ne voit comme seule perspective que l’exportation du nucléaire.

Concernant les déchets, nous voulons qu’ils soient stockés à sec en subsurface, afin de garantir l’accessibilité, le contrôle et la réversibilité du stockage. Le financement doit être assuré par la filière nucléaire, ce qui aujourd’hui n’est pas le cas (financement très partiel). Les déchets considérés dans le projet de l’ANDRA à Bure ne représentent qu’une faible part des déchets de la filière : tous doivent être gérés par la filière. Enfin, la sécurité des combustibles usés doit être garantie, d’ici à leur stockage (enjeu des piscines).

 

Concernant le démantèlement, outre que nous souhaitons en faire une orientation industrielle stratégique, il convient d’’organiser le financement de nos installations dès à présent. En effet, les modalités de « provisionnement » pour le démantèlement futur ne sont absolument pas satisfaisantes : outre la sous-évaluation drastique des coûts futurs (cpmme l’a confirmé la Cour des comptes), l’obligation de provisionnement conduit actuellement à des manipulations comptables très éloignées des besoins réels. Ces manipulations comptables (comme l’affectation de 50% du capital de RTE au titre du démantèlement) hypothèquent à la fois la capacité de réaliser le démantèlement t et l’avenir industriel d’EDF.

 

      1. Quel avenir voyez-vous au gaz dans le mix énergétique français ? Que préconisez-vous pour assurer la sécurité et la compétitivité des approvisionnements gaziers du pays dans un univers énergétique mondial instable ?

L’indépendance énergétique nationale et la sécurité des approvisionnements sont des enjeux importants, comme précédemment évoqué. Notre dépendance aux importations est grande pour le gaz, mais également pour le pétrole et l’uranium. Face à ce constat, le modèle que nous proposons est plus robuste et plus autonome, en réglant le problème à sa racine.

Maîtrise des consommations et énergies renouvelables nous paraissent les clés centrales pour préserver notre pays, c’est à dire les ménages et les entreprises françaises, des aléas des approvisionnements internationaux, des prix internationaux mais aussi des appels de pointe pour le cas de l’électricité. Maintenir le caractère public des réseaux de transport et distribution, les sécuriser, mobiliser les investissements aujourd’hui « bloqués » sous forme de provisions dans les concessions participent aussi de cette « sécurité ».

Enfin, le développement des énergies renouvelables permet de fournir une énergie décentralisée et disponible localement, réduisant ainsi la dépendance énergétique vis-à-vis de l’étranger tout en améliorant la sécurité des approvisionnements. Concernant le cas particulier du gaz, les solutions sont à chercher, dans le développement de la ressource biomasse avec le biogaz – dont le potentiel est extrêmement important comme le montrent plusieurs études – et du gaz de synthèse. En combinant l’ensemble de ces mesures (efficacité, biomasse, gaz de synthèse) nous estimons possible de réduire drastiquement nos besoins d’importation avant 2050.

 

      1. c. Quel développement voyez-vous pour les énergies renouvelables en France ? Quel modèle économique comptez-vous favoriser pour assurer à ces filières un développement qui soit davantage industriel que fiscal et qui favorise l’autoconsommation ?

Comme décrit précédemment, notre programme propose un développement ambitieux –mais réaliste – de la production d’énergie renouvelable. Il faut pour cela que nous développions les filières nécessaires, en menant une politique industrielle à l’inverse de ce qui a été réalisé jusqu’à présent : stabilité, prévisibilité et adaptabilité du cadre tarifaire, fiscal et réglementaire, soutien aux implantations industrielles, soutien massif à la R&D.

Tout d’abord, à l’échelle européenne, nous proposons une convergence progressive des cadres réglementaires et tarifaires relatifs aux énergies renouvelables, afin de faciliter leur développement.

Pour développer ces filières, nous œuvrerons à la structuration de la demande d’une part (soutiens financiers, stabilité de la réglementation et des tarifs pour les énergies renouvelables, tarifs d’autoconommation…) et au développement de l’offre d’autre part (formation, fonds de garantie, recherche et développement, engagement des grandes entreprises publiques…). Par exemple, pour la production de chaleur renouvelable, à court terme, nous multiplierons par trois la dotation du fonds chaleur ; à moyen terme, nous proposons de passer par un système de tarif d’achat garanti, assez comparable au système de rémunération de l’injection du biogaz, afin de palier les problèmes engendrés par le système d’appels à projets. Le système de tarifs d’achat pour l’électricité devra être réformé, en concertation étroite avec les acteurs de la filière, afin de garantir stabilité et prévisibilité, et dans l’objectif de chercher une convergence européenne. La participation citoyenne à l’investissement dans les énergies renouvelables sera également promue à travers l’orientation de l’épargne (par un Livret Vert), le droit à des prises de participation au capital de projets d’énergie renouvelable et locale, ou via des coopératives. Certains projets devront obligatoirement ouvrir leur capital à des investissements citoyens locaux et, à défaut, à des investissements citoyens à une échelle nationale.

 

L’Etat stratège devra investir dans la recherche et développement. Rappelons que, d’après l’Agence Internationale de l’Energie, la R&D publique relative à l’énergie a été consacrée (ensemble des pays de l’AIE de 1974 à 2002) à 58% pour le nucléaire, 13% pour les fossiles, 8% pour les renouvelables, 8% pour l’efficacité. En France, le bilan est encore plus caricatural puisque les crédits publics ont été consacrés à plus de 90% pour le nucléaire et à moins de 2% pour les renouvelables (1985-2002), que les crédits publics de recherche pour le programme électro nucléaire se sont élevés à 38 milliards d’euros (d’après la cours des comptes). Et ce, alors que le nucléaire ne satisfait que 17% des besoins énergétiques finaux en France !… Il faut donc revoir complètement les priorités afin de consacrer en toute cohérence les moyens nécessaires à la transition énergétique.

 

 

    1. a. Quelle sera votre politique tarifaire en matière d’électricité, tant en structure qu’en niveau ? Comment comptez-vous permettre cette politique tarifaire d’assurer le financement des importants investissements industriels auquel le secteur énergétique français est confronté ?
      b. et c. Compte tenu de l’évolution du gaz, quelle politique tarifaire gaz comptez vous mettre en œuvre ?

Concernant le niveau de tarification de l’électricité, nous faisons le constat, partagé par tous les acteurs du secteur, de sa sous-évaluation actuelle. En effet, aujourd’hui le tarif payé ne couvre pas les coûts réels (c’est particulièrement vrai pour le nucléaire, mais cela s’applique également pour les réseaux ou les énergies renouvelables).

Par ailleurs, nous soulignons que la question du coût de l’énergie dépasse celle de l’électricité : toutes les consommations dans le système actuel sont amenées à se renchérir. Le prix du gaz et du pétrole nous échappe largement. Pour les ménages, les entreprises, les collectivités, quel que soit le scénario, les prix du kWh électrique (+30% rapidement d’après EDF et la CRE) ou du litre de carburant augmenteront de toute façon. Ces renchérissements tendanciels s’expliquent de multiples manières : raréfaction des ressources (peak oil passé), mais aussi nouveaux investissements nécessaires (réseaux) ou le paiement de coûts jusque-là ignorés (c’est particulièrement le cas pour le nucléaire).

Selon les différentes évaluations disponibles, il n’y a pas de différence majeure entre notre scénario et le « business as usual » en termes d’investissement. Les coûts de production sont similaires dès lors que l’on considère l’ensemble des coûts complets de chaque énergie (en incluant les « externalités négatives ») et que l’on regarde le prix final pour l’usager (c’est-à-dire considérant les coûts de transports et de distribution). C’est ce que confirme d’ailleurs la « Feuille de route Energie 2050 » de la Commission Européenne.

EELV assume une fiscalité climat énergie (fiscalité avec une assiette énergie-CO2-uranium) qui tendra à renchérir l’énergie par rapport au « laisser-faire ». Cette fiscalité permet à la société d’anticiper les prix futurs et de disposer de recettes pour financer l’efficacité énergétique (l’intégralité de la fiscalité environnementale est redistribuée aux ménages et entreprises pour leur permettre de financer l’efficacité énergétique).

Mais la facture de chaque ménage étant le produit de la consommation et du prix unitaire, elle sera bien mieux maîtrisée dans le scénario EELV, qu’avec la politique actuelle. En effet, les économies d’énergie pourront compenser la hausse du prix de l’énergie.

Par ailleurs, les économies d’énergie sont d’ores et déjà rentables (par exemple une rénovation d’un bâtiment au niveau BBC rénov, soit une division par 3 à 6 des factures énergétiques, se rentabilise entre 12 et 25 ans selon les cas) et elles le seront de plus en plus à l’avenir.

La meilleure manière de réduire l’impact sur les ménages et les professionnels reste un effort rigoureux de maîtrise de la consommation.

D’après nos calculs, avec des hypothèses identiques en termes d’inflation du prix de l’énergie, en incluant une fiscalité climat énergie supplémentaire dans le cas d’EELV, nous arrivons à stabiliser puis à faire diminuer les factures d’énergie payées par les ménages pour leur logement, alors qu’elles explosent dans le cas du « laisser-faire », du fait de la conjonction de la croissance de la demande et de l’inflation du prix. Le financement public du soutien à l’efficacité énergétique est lui-même plus que compensé par les économies réalisées par ailleurs (réduction des factures énergétiques du secteur tertiaire public, réduction du chômage, accroissement des recettes TVA par l’activité engendrée…).

Une des mesures que nous portons à la fois pour satisfaire un besoin social et un enjeu environnemental est la mise en place de la tarification progressive de l’eau, du gaz et de l’électricité. Contrairement à la situation actuelle qui pénalise les petits consommateurs et encourage les surconsommations, la tarification progressive garantit l’accès aux usages essentiels tandis que les gaspillages sont découragés.

Concernant les carburants, nous pensons que le « pic pétrolier » étant passé ou sur le point de l’être, le prix du pétrole ne peut que croître et ce à des niveaux impensables jusqu’à présent. Là encore, la solution doit passer par l’efficacité, la sobriété et par les alternatives renouvelables. Nous proposons pour cela de multiples politiques structurelles.

 

    1. d. Quelle politique d’efficacité et de sobriété énergétiques envisagez-vous de déployer ? Comment envisagez-vous de financer la mise en œuvre de cette politique ?

L’efficacité et la sobriété sont essentielles à la transition que nous portons. De multiples moyens seront déployés, qui apporteront des co-bénéfices importants : amélioration de la qualité de vie, réduction du chômage, réduction du déficit commercial, plus grande robustesse économique…

Pour 2020, nous prévoyons une diminution de la consommation d’énergie primaire de 20% et de 15% pour l’énergie finale. En 2050, notre objectif est de moins 50% de consommation d’énergie finale par rapport à 2009.

Les gains potentiels en ce qui concerne l’efficacité énergétique sont recherchés dans tous les secteurs. Dans le secteur des bâtiments, nous prévoyons un grand programme de réhabilitation énergétique, afin de viser la rénovation au niveau « BBC rénov » de tous les bâtiments existants d’ici 2050. Cela passera par une montée en puissance du marché de la rénovation (avec la création d’emplois afférente et la formation adéquat) d’ici 2020, afin d’atteindre un rythme régulier de rénovation d’environ 925 000 logements et 28 millions de m² tertiaire par an, et qui se prolonge jusqu’en 2050. Pour cela de nombreux dispositifs seront mis en place (réforme de l’Eco PTZ et du CIDD, fonds de garantie, Sociétés publiques de Tiers Financement, formation professionnelle…). Nous avons chiffré l’ensemble de ces enjeux techniques et budgétaires.

Dans le secteur de l’industrie, sur la base d’une étude extérieure, nous estimons possible d’atteindre 18% de réduction de consommation énergétique finale dans l’industrie en 2020 par rapport à 2008 (-20% dans la chaleur et -12% dans l’électricité) et 42% à l’horizon 2050. Ces réductions doivent être recherchées à la fois dans les activités support en général (généralisation des moteurs à vitesse variable, récupération de chaleur…), dans les procédés industriels du futur (ciment, aciérie…), mais aussi dans de nouveaux fonctionnements industriels. Il s’agit de développer la réutilisation (verre) et le recyclage (aluminium) et de développer l’éco-conception. Pour cela, il faudra à la fois déployer une fiscalité (fiscalité climat-énergie) et une réglementation (norme IE4…) adaptées, soutenir l’investissement dans les nouveaux outils de production (aides à la reconversion et à l’investissement), investir dans la recherche et développement.

Pour les transports, développement des transports en commun (infrastructures existantes ou nouvelles), soutien aux nouveaux usages (auto partage, covoiturage), investissement (recherche et production) dans les nouvelles technologies (véhicule à 1L/100km, hybrides, électrique…), aménagement du territoire adapté (urbanisme densifié), nouvelles pratiques (bureaux partagés, télétravail)…

D’une manière transversale, l’efficacité énergétique sera encouragée par un renforcement de la réglementation, de la fiscalité, des outils de type bonus-malus, des Certificats d’Economie d’Energie (renforcés et réformés), mais aussi par le développement d’outils novateurs (fonds de garantie) et de services publics adaptés (sociétés de tiers financement, services publics locaux de la maîtrise de l’énergie).

    1. e. Quelle sera votre politique de lutte contre la précarité énergétique ?

Du fait du renchérissement généralisé de l’énergie, nous savons que la précarité augmentera si aucune politique ambitieuse et durable ne permet aux bâtiments d’être plus économes. Mais le sujet est complexe puisque la précarité énergétique est souvent une précarité parmi d’autres ; l’enjeu concerne donc aussi la politique à avoir vis-à-vis du prix de l’énergie, de l’encadrement des loyers, de l’accompagnement des populations sensibles et plus généralement de la répartition des richesses.

Les situations de précarité énergétique sont multiformes : nous devons dépasser les critères uniques comme celui du taux d’effort supérieur à 10% ou le froid « ressenti ». L’observatoire de la précarité devra définir les moyens et les outils adaptables à chaque cas, en fonction de la situation sociale et patrimoniale des ménages.

Les montants versés via les dispositifs actuels (tarifs sociaux, FSL, ANAH…) sont actuellement symboliques par rapport à l’ampleur du problème, et leur distribution est assez peu équitable. De plus, il s’agit d’une action palliative : elle ne résout pas le problème à sa racine.

Concernant les ménages propriétaires de leurs biens -notamment les personnes âgées- nous sommes convaincus que l’on peut intensifier les actions qui génèreront l’efficacité énergétique nécessaire en les aidant à entreprendre les travaux pour une meilleure isolation de leurs biens. Il faut pour cela les soutenir financièrement à un niveau supérieur à ce qui est fait actuellement et proposer un accompagnement personnel.

Pour les ménages locataires, nous devons agir auprès de leurs bailleurs mais aussi inclure l’état thermique des logements dans les conditions de confort minimum d’un logement, de décence et d’indignité, afin que les marchands de sommeil ne puissent prospérer sur le terrain de la misère.

C’est pourquoi nous souhaitons un changement d’échelle dans les moyens accordés par la puissance publique en faveur de la sortie de la précarité énergétique. Nos estimations conduisent à considérer comme nécessaire de dédier entre 1,4 et 2 milliards d’euros annuellement (contre environ 200 à 300 millions d’euros aujourd’hui). Ces financements permettront d’une part une réduction du « reste à charge » pour les ménages lors de réalisation de travaux dans leur logement et d’autre part le déploiement d’un accompagnement social et technique d’ampleur. Les subventions seront attribuées sous conditions de ressources, en complément des autres dispositifs, de telle sorte qu’elles couvrent à elles seules jusqu’à 60% des besoins d’investissements de rénovation des ménages en précarité énergétique du premier décile. Les 40% restants seront couverts par les dispositifs de droit commun de type crédit d’impôts, prêts à taux zéro, certificats d’économie d’énergie et par l’intervention de Sociétés de Tiers Financements. D’autre part, le renforcement des moyens humains dédiés au repérage et à l’accompagnement de ces ménages nous paraît essentiel.

Par ailleurs, au-delà de la précarité énergétique existante, face à l’inévitable accroissement du prix de l’énergie, notre politique structurelle de transition énergétique permettra de stabiliser les factures des ménages et entreprises avant 2020, grâce aux économies d’énergie et au développement des énergies renouvelables. La continuation de la politique actuelle conduirait à l’inverse à une inflation des factures sans maîtrise possible. Enfin, comme précisé précédemment, nous plaidons pour l’instauration d’une tarification progressive du gaz, de l’électricité et de l’eau afin de garantir à tous un accès facile pour les consommations les plus essentielles tout en décourageant les consommations superflues. La mise en place de la tarification progressive devra se faire conjointement avec le déploiement du programme de lutte contre la précarité énergétique, afin que les ménages en précarité ne soient pas impactés négativement. Pour la réussite du déploiement de la tarification progressive en considérant les situations particulières, nous pourrons compter sur l’exemple de la Californie qui a mis en place des programmes spécifiques pour les ménages vulnérables.

 

    1. f. Quel modèle d’organisation défendez vous pour le service public de distribution ? Défendez vous le modèle national actuel qui garantit à la fois le meilleur rapport qualité/prix d’Europe et la péréquation tarifaire ?

Nous voulons sanctuariser le service public du transport et de la distribution : les entreprises de transport et distribution d’énergie (RTE, GRT, ERDF, GRDF…) doivent devenir indépendantes des entreprises de production d’énergie (EDF, GDF Suez, Total…) et leurs capitaux être entièrement publics. Actuellement, la consanguinité conduit à des dérives très dangereuses pour le service public (par exemple, avec le provisionnement de 50% du capital de RTE au titre du démantèlement futur des centrales, ce qui présage de la privatisation de RTE pour pouvoir payer le démantèlement).

En ce qui concerne la distribution d’électricité, la réglementation assurera la transparence et l’équité des négociations de concession des activités de distribution des énergies de réseau par les autorités concédantes.

 

    1. g. Quel rôle voulez-vous voire jouer par les Régions aux côtés de l’Etat dans la mise en œuvre de la politique énergétique du pays.

L’action publique en matière d’énergie nécessite une gestion planifiée et décentralisée. Les écologistes soutiennent ainsi une compétence énergie pour les régions et communautés d’agglomération ou urbaines, avec un appui des services déconcentrés de l’État et les agences (ADEME). Elle inclura des missions de promotion et de financement, aux moyens d’Agences locales, constituant ainsi un véritable Service Public Local. Les schémas Régionaux Climat Air Énergie seront renforcés et dotés de moyens financiers adaptés. Aux communautés urbaines et d’agglomération sera attribuée la compétence d’autorité concédante des réseaux de distribution (gaz, électricité, chaleur).

 

Afin de pouvoir déployer les moyens humains nécessaires, les collectivités recevront une dotation de fonctionnement « climat énergie » financée par une partie des recettes récupérées grâce à la mise aux enchères des quotas européens.

En articulation avec cette volonté de décentralisation, l’Etat apportera la cohérence et la stratégie nécessaires (cadre réglementaire, fiscalité, objectifs…) et mobilisera les entreprises publiques en ce sens.

    1. h. Comment voyez-vous le rôle et les missions des organismes « indépendants » comme la Commission de Régulation de l’Energie et l’Autorité de Sureté Nucléaires ?

Concernant l’ASN, comme indiqué précédemment, certaines réformes seront nécessaires. Mais principalement, nous attachons une grande importance à ce que l’administration d’Etat soit également dotée de moyens afin de permettre un dialogue entre ASN et gouvernement. En effet, l’ASN a le mérite d’être indépendante du pouvoir politique… Mais en conséquence, actuellement, qui porte la responsabilité des décisions ? Comment un gouvernement peut-il prendre les décisions correctes sans disposer de sa propre expertise, distincte de l’autorité indépendante ? Le système actuel est bien moins vertueux qu’on veut nous le faire croire : l’indépendance vis-à-vis du politique s’apparente à une irresponsabilité généralisée, qui est particulièrement dangereuse pour la sureté.

En ce qui concerne la Commission de Régulation de l’Energie, l’analyse est relativement similaire. La CRE est utile, mais l’indépendance ne doit pas rimer avec irresponsabilité. Des réformes devront être menées, à la fois pour renforcer les prérogatives de la CRE, mais également pour clarifier la répartition des responsabilités.

 

    1. i. Quelle sera votre politique en matière des transports ? A l’instar des liens étrois entre le mix électrique et le développement des transports électriques, comment comptez-vous assurer la cohérence entre la politique énergétique que vous défendez pour le pays et celle en matière de transports ?

Les transports représentent effectivement un secteur essentiel du système énergétique. Cependant, ne réfléchir qu’en termes de mode de propulsion ne permet pas de résoudre le défi auquel nous devons faire face : il faut questionner autant les besoins, les modalités de déplacement que les technologies de propulsion.

Dans notre scénario de transition énergétique, nous visons pour 2020 une réduction des GES de 17% par rapport à 2009, soit un retour au niveau de 1990. A l’horizon 2050, il s’agit d’atteindre 86% de réductions par rapport à 1990. Il faut pour cela travailler tant sur les modes de déplacements que sur les besoins.

Nous portons depuis toujours l’objectif de rationaliser la politique transport, notamment par l’abandon des projets autoroutiers et aéroportuaires. Par exemple, comme vous le savez, nous nous mobilisons activement contre le projet d’aéroport de Notre Dame des Landes. Pour nous, la remise à plat du Schéma National des Infrastructures de Transports est une évidence. L’AFITF doit effectivement être dotée de moyens suffisants et la taxe poids-lourd doit être mise en place et renforcée. Dans notre chiffrage budgétaire, nous prévoyons de consacrer 4 milliards d’euros chaque année à la mutation écologique du secteur des transports.

Cette opposition est à mettre face à une volonté de développer les alternatives. Nous sommes en particulier opposés à une politique du « tout TGV » qui se fait au détriment des lignes ferroviaires locales, notamment sur la base du réseau Intercité. Nous devons effectivement améliorer la qualité et l’usage des infrastructures existantes. Outre le réseau ferroviaire, nous estimons nécessaire de développer de nouveaux types de transports en commun sur la base d’infrastructures existantes : des cars et bus à haut niveau de service, taxis collectifs, autopartage et covoiturage, etc.

Le fret français doit effectivement être sauvé. Il est incroyable de constater qu’il s’agit d’une activité économique profitable chez nos voisins européens, mais pas en France. Le Plan Fret de la SNCF ne porte pas suffisamment une perspective de développement : l’activité wagon isolé doit être protégée, améliorée et fiabilisée et le réseau renforcé.

L’intermodalité est une solution nécessaire à développer afin de faciliter les déplacements en minimisant l’impact : elle doit être systématisée. Un moyen sera de revoir le Plan Vélo et de le doter de moyens adaptés.

Nous portons la mise en place d’une fiscalité environnementale effective et d’ampleur. Nous prévoyons en particulier la mise en place d’une Contribution Climat Energie (CCE), avec une triple assiette : énergie, gaz à effet de serre, uranium (cf. précédemment). L’assiette énergie permettra de supprimer les distorsions entre secteurs ou types de consommation. Au-delà de la fiscalité énergie, les transports devront payer progressivement leur véritable coût global : assurance (sécurité, congestion…), infrastructures (l’entretien des routes est évalué à 42 milliards d’euros annuellement tandis que les recettes la TIPP ne couvrent que 28 milliards…), impacts sanitaires (pollutions locales dont l’impact sanitaire est chiffré à 30 milliards d’euros…), pollution sonore (59% des nuisances sonores en France) etc.

Au-delà de vos propositions, nous souhaitons également qu’un travail important soit fait en matière R&D afin de permettre l’émergence de nouveaux véhicules individuels, sobres et efficaces, avec de nouvelles motorisations (biogaz, électricité sous conditions etc.). Nous prévoyons d’autres mesures telles que le renforcement du bonus-malus, la réduction des vitesses maximales autorisées sur routes et autoroutes…

 

Enfin, il nous faut travailler sur la réduction des besoins de mobilité. Le déplacement moyen en France est de 8 km et 71% des déplacements de personnes sont des déplacements locaux. En conséquence, nous devons agir sur ces déplacements du quotidien, grâce à l’aménagement du territoire (cf. infra), mais également par de nouvelles organisations sociales (bureaux partagés, télétravail, etc.).

Concernant le développement des véhicules électriques –que vous semblez désigner dans votre question-, il ne peut avoir un intérêt uniquement s’il est pensé à la fois dans le cadre de la mutation des déplacements (réduction des besoins, petits véhicules urbains ultra-économes) et en étroite articulation avec le système électrique en lui-même. Le véhicule électrique doit être un moyen décentralisé de stockage de l’électricité, un soutien au réseau électrique pour faciliter l’intégration des énergies renouvelables.

 

 

j. En quoi la politique énergétique que vous envisagez prépare-t-elle « l’Après Pétrole » ?

Les développements précédents doivent permettre de répondre : le projet en lui-même est de préparer l’après pétrole et l’après nucléaire.

 

  1. 4. Avenir et gouvernance des entreprises du secteur énergétique français
    1. a. Quel rôle comptez-vous donner à la puissance publique dans le secteur énergétique français ? Dans ce cadre, quel rôle comptez-vous confier aux entreprises du secteur public dans la mise en œuvre de votre politique énergétique et comment définissez-vous le rôle de l’Etat actionnaire ? Quel bilan faites-vous pour l’intérêt général, les consommateurs français et les salariés de la privatisation de Gaz de France ?

La transition énergétique n’arrivera pas par le miracle du marché. Pas plus que les précédentes révolutions énergétiques ou développements technologiques majeurs (par exemple le parc électro nucléaire) n’auraient pu se développer sans des investissements publics massifs.

En conséquence, nous devons disposer d’un Etat stratège, avec une véritable vision cohérente et de long terme afin de donner les lignes directrices adaptées (réglementations, planification des objectifs, fiscalité etc.).

Cependant, en France, l’Etat a été parfois stratège et souvent étouffant. L’Etat est indispensable mais il n’est pas suffisant. Nous devons laisser aux territoires, à différentes échelles, les moyens du développement de leurs projets, afin de créer des dynamiques concrètes. L’efficacité énergétique et les énergies renouvelables se développeront dans ces conditions.

Les entreprises publiques devront jouer un rôle central. Elles sont un des moyens de la concrétisation de la transition énergétique. Nous nous opposons aux privatisations, à la fois parce que cela correspond à une dilapidation de la richesse nationale commune et parce que nous avons besoin des entreprises publiques pour impulser les politiques que nous devons mener. Cependant, nous devons veiller à ce que l’Etat régulateur soit bien distinct de l’Etat actionnaire : nous connaissons trop de passe-droits réglementaires qui ont été accordés par l’Etat-régulateur à l’Etat-actionnaire…

Mais surtout, la transition énergétique est un moyen pour les entreprises publiques de retrouver un sens, de redécouvrir une perspective axée autour du bien commun. Pour notre part, nous considérons que les choix stratégiques effectués, par exemple, par AREVA et EDF à l’étranger sont l’antithèse de ce que doit être le service public. A l’étranger, ces deux entreprises ont des comportements dignes des pires entreprises capitalistes… Et, de plus, avec un résultat catastrophique : malgré tout le soutien et toute la promotion dont a bénéficié AREVA, sa situation financière est très inquiétante.

A la place de cette erreur industrielle, nous proposons que les entreprises publiques participent des inventions de nouveaux modèles économiques. Par exemple, EDF ne doit plus être un producteur d’énergie, mais il doit devenir un producteur de « services énergétiques ». EDF devra développer l’efficacité énergétique et à répondre aux réels besoins des consommateurs, sans les pousser à la consommation. Quant à AREVA, l’Etat actionnaire devra revoir totalement la stratégie afin de positionner l’entreprise sur le seul marché nucléaire certain : celui du démantèlement et de la gestion des déchets.

La transition énergétique que nous proposons est un nouveau souffle pour les entreprises publiques.

 

    1. b. Comment voyez-vous l’évolution du modèle des Entreprises Locales de Distribution ?

Les entreprises locales de distribution vont dans le sens d’une décentralisation et d’une appropriation des enjeux énergétiques par les territoires. Nous sommes donc favorables à leur maintien et à leur développement. Mais cela doit se faire en bonne articulation avec le service public de distribution.

 

    1. c. Considérez-vous que la cotation en bourse des entreprises du secteur énergétique soit adapté aux enjeux du secteur énergétique, et notamment ceux relatifs au financement des investissements industriels massifs des prochaines années ? Quel modèle de gouvernance préconisez-vous pour les entreprises du secteur ?

La cotation en bourse, comme vous le soulignez, tend à réduire l’horizon temporel de la réflexion d’une entreprise. Comme expliqué précédemment, nous jugeons indispensables que les entreprises publiques restent publiques, et qu’elles ne soient pas cotées.

Cependant, nous ne pensons pas nécessaire ni utile de nationaliser toute l’économie… En conséquence, il persistera des entreprises privées, cotées ou non, dont les intérêts ne seront pas forcément ceux du long terme et de l’intérêt général. Si les conditions sont réunies, les investisseurs privés sont capables de penser à long terme. Il faut que l’Etat-régulateur joue pleinement son rôle et régule avec force tous les secteurs, dont celui de l’énergie, par des outils classiques d’intervention publique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  1. 5. Modèle social
    1. a. Comment envisagez-vous l’évolution du régime spécial des retraites des Industires Electriques et Gazières ?
      b. Considérez-vous que le statut des Industries Electriques et Gazières doit rester la référence pour toutes les entreprises du secteur énergétique intervenant en France ? Etendrez-vous ce statut aux entreprises intervenant dans le domaine de la commercialisation, des énergies renouvelables et de la sous-traitance y compris nucléaire ?

Toute évolution nécessiterait évidemment une large négociation.

Mais il nous apparaît surtout que l’urgence est d’assurer la pérennité des droits acquis des IEG et d’améliorer la situation de tous les autres acteurs : salariés des sous-traitants, des distributeurs de carburants, des PME des énergies renouvelables ou de l’efficacité énergétique (dont le bâtiment).

La transition énergétique ne se fera pas contre les acteurs de l’énergie, contre les gens qui, concrètement, organisent le système énergétique.

D’une manière plus générale, la transition écologique, contrairement à ce que nos adversaires assènent perpétuellement, n’est pas antinomique de progrès social : c’est même l’inverse. Elle ne se fera pas sans progrès social et le progrès social ne pourra pas être pérenne sans transition écologique.

La transition énergétique permettra de créer de l’ordre de 490 000 emplois nets d’ici 2020, principalement dans la rénovation, et plus marginalement dans les énergies renouvelables.

Dans notre programme, au-delà de la transition énergétique, nous affirmons l’impératif d’une redistribution des richesses bien plus élevée. Nous affirmons la nécessité de réduire le temps de travail (heures de travail, mais aussi nombre d’années travaillées), comme un des moyens de réduire le chômage.

 

  1. 6. Compte tenu des défis énergétiques auxquels la France et l’Europe sont confrontées, quel rôle souhaiteriez-vous voir jouer à l’encadrement des entreprises de ce secteur ? Quelle innovation souhaiteriez-vous proposer pour renforcer le cas échéant leur implication ?

Comme explicité précédemment, la transition énergétique requiert à la fois une régulation forte, de la part de l’Etat et de l’Union Européenne, et une participation active à la vie des entreprises publiques afin d’en faire des acteurs du changement.

 

1Audition parlementaire du 30 mars 2011

 

2Avis DSR_2010-153

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