Cinéma: le sexe, même en fauteuil roulant dans « The Sessions »

Après "Intouchables" et ses millions de spectateurs puis le plus discret "Hasta la vista", un road-movie belge sur le périple espagnol de trois jeunes handicapés tenaillés par le sexe, "The Sessions" creuse le même sillon du handicap sans voile.

 

Après « Intouchables » et ses millions de spectateurs puis le plus discret « Hasta la vista », un road-movie belge sur le périple espagnol de trois jeunes handicapés tenaillés par le sexe, « The Sessions » creuse le même sillon du handicap sans voile.

Peut-on avoir une vie sexuelle aboutie quand on est prisonnier de son corps, cloué sur un brancard ? oui à condition d’y mettre de la persévérance et une dose d’humour, répond le film « The Sessions », apportant du grain à moudre aux associations réclamant la légalisation de l’assistance sexuelle.

Pour cette comédie dramatique, qui sort mercredi en France, le réalisateur américano-australien Ben Lewin s’est très étroitement inspiré de l’histoire véritable d’un poète et journaliste américain, lourdement handicapé, Mark O’Brien.

Une attaque de la poliomyélite l’a laissé presque entièrement paralysé à l’âge de six ans. Passant le plus clair de son temps allongé dans un « poumon d’acier », la machine qui lui permet de respirer, Mark (joué par John Hawkes) décide à 38 ans de perdre sa virginité.

Après une « approche » infructueuse et frustrante auprès d’une jeune auxiliaire de vie et de longues discussions avec son directeur de conscience, un prêtre catholique aux idées larges, Mark prend contact avec une professionnelle. Cheryl (jouée par Helen Hunt) n’est pas une prostituée mais une « assistante sexuelle », sorte de « sexe-thérapeute » pour personnes handicapées.

« Découverte de l’intimité »

A la première séance, cette femme mariée d’une quarantaine d’année le prévient que contrairement à une prostituée qui « tenterait d’établir une relation commerciale durable » son but est thérapeutique et que le nombre de sessions sera strictement limité à six.

Dans un article publié en 1990 dans le magazine littéraire américain The Sun, Mark O’Brien décrit par le détail cette expérience avec humour et réalisme. « Un sexologue travaille sur les problèmes émotionnels liés au sexe d’un client tandis qu’un(e) assistant(e) sexuel(le) travaille avec son corps » rapporte-t-il dans cet article (« On seeing a sex surrogate » ou « De la fréquentation d’une assistante sexuelle »).

Avec Cheryl, Mark fera son initiation sexuelle, sensuelle et gagnera finalement en épanouissement personnel. Les assistant(e)s sexuel(le) (« sexual surrogates » en anglais) sont autorisés aux Etats-Unis(dans certains Etats) mais strictement interdits en France.

Après « Intouchables » et ses millions de spectateurs puis le plus discret « Hasta la vista », un road-movie belge sur le périple espagnol de trois jeunes handicapés tenaillés par le sexe, « The Sessions » creuse le même sillon du handicap sans voile.

Le réalisateur Ben Lewin a lui aussi eu la polio lorsqu’il était enfant, s’est retrouvé dans un poumon d’acier avant de recouvrer progressivement l’usage du haut de son corps et partiellement celui de ses jambes (il se déplace avec des béquilles).

« Comme Mark, cela ne ma pas empêché de réussir ma carrière. Lorsque je suis tombé sur son article sur l’assistance sexuelle, je me suis dit que cela ferait une excellente idée de film », explique-t-il dans le dossier de presse.

Des associations françaises de handicapées comptent sur le film pour faire avancer la cause de ces « assistants sexuels », interdits à ce jour en France car son organisation serait assimilée à une répréhensible activité de proxénétisme.

Pascale Ribes, présidente de l’association Ch(s)ose pour la promotion de « vie affective et sexuelle » des personnes handicapées, espère que ce film « aidera à faire comprendre que l’assistance sexuelle n’est pas de la prostitution mais tout autre chose ».

« Le recours à l’assistance sexuelle ne doit pas être la seule solution à proposer, mais un choix possible. Pour certaines personnes lourdement handicapées depuis la naissance qui n’ont pas pu faire l’apprentissage de leur sexualité, l’assistance sexuelle répond à un besoin d’apprentissage et de découverte de l’intimité », explique-t-elle.

« Nous ne demandons pas la légalisation du proxénétisme mais une exception à la loi pénale pour ce type de service », indique Mme Ribes. Ch(s)ose réclame l’ouverture d’un débat public alors que l’assistance sexuelle est déjà autorisée dans plusieurs pays européens (Pays-Bas, Suisse et Royaume Uni entre autre).

Remonter