POUR UNE POLITIQUE SOCIETALE DU HANDICAP, ORGANISEE ET COHERENTE

CONSEIL FEDERAL I 05 & 06 avril 2014 I Paris

POUR UNE POLITIQUE SOCIETALE DU HANDICAP,
ORGANISEE ET COHERENTE

Exposé des motifs :

La problématique du cadre institutionnel
La prise en compte du handicap dans chaque projet de loi a été actée par la constitution d’un volet diagnostic handicap devant identifier les impacts de chaque dispositif législatif pour les personnes en situation de handicap (circulaire du 4 septembre 2012 relative à l’inclusion d’un volet handicap dans chaque projet de loi); pour autant, ce principe d’inclusion du champ du handicap dans les textes législatifs reste inexistant.

Toutes les strates administratives, nationales et de proximité sont concernées par la thématique du handicap. Le cap doit être précisé : la politique du handicap doit devenir une politique d’irrigation, investissant l’ensemble des sphères de la société, et n’hésitant plus à renforcer les liens entre l’action sociale et toutes les politiques publiques afin de tendre vers l’unique objectif :
celui de la cohésion sociale par l’inclusion de tous.

2014 ne peut rester comme 2013 qui fut l’année des compromis impossibles ! 2014 doit devenir une année dynamique, riche de projets, d’ambitions et d’une indéniable volonté à garantir un parcours d’accompagnement, de soins, d’éducation et d’accès à l’emploi respectueux des attentes et des besoins des personnes. Pour autant, l’équilibre de l’organisation institutionnelle du
champ du handicap est loin d’être atteint et trop de défauts, de fractures, d’incohérences organisationnelles et budgétaires sont source de ruptures dans les parcours des personnes.

Ainsi, que ce soit les menaces exercées par l’Acte III de la décentralisation à partir du projet de loi de développement des solidarités territoriales et de la démocratie locale ou celles du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, le champ du handicap constitue indubitablement une variable d’ajustement face aux réformes de l’État, des agences nationales et des collectivités territoriales. La fracturation du champ du handicap et l’absence de doctrine claire en matière de politique de l’autonomie concourent au recentrage des politiques du handicap dans un strict cadre décentralisé en direction des conseils généraux.

Cependant, le cadre départemental ne correspond plus pour les personnes en situation de handicap à la mise en œuvre des parcours de vie, des parcours de soins et d’accompagnement, des parcours de scolarisation, d’insertion professionnelle et à la liberté d’aller et venir sur l’ensemble des territoires. Soumis à une réglementation obsolète et non cohérente avec la loi du 11 février 2005 -pilier de la politique du handicap-, le département par son périmètre ne correspondant plus aux exigences de mobilité du 21éme siècle, et par l’insuffisance de ses ressources qu’elles soient propres ou transférées par l’État, n’est plus en capacité d’assurer convenablement ses prérogatives en matière de handicap (Financement de certains établissements pour adultes handicapées, versement et paiement de la Prestation de compensation du handicap – PCH, tutelle administrative et financière des maisons départementales pour les personnes handicapées – MDPH).

La problématique des droits aux ressources

La dernière revalorisation de l’allocation pour adulte handicapé (AAH) date de septembre 2013. Cette dernière n’avait progressé qu’à hauteur de l’inflation (+ 1,75 %), soit 790,18 € à taux plein, bien en dessous du seuil de pauvreté fixé à 954 euros par mois. François Hollande avait prévenu, avant d’être élu, qu’aucune perspective allant dans le sens d’une augmentation substantielle de cette allocation ne serait avancée. Alors que le dernier quinquennat avait permis une progression de 25 % du montant de l’allocation, le montant total de la dépense publique (8,15 Md€ en 2013 –source IGF) freine une évolution pourtant indispensable. Parallèlement, les dernières réformes durcissant les conditions d’octroi (RSDAE – DTR Restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi – Déclaration trimestrielle de ressources) sont confirmées au grand dam des personnes dont le taux d’incapacité est compris entre 50 et 79 %. Les personnes en situation de handicap psychique sont elles aussi les grandes perdantes de ces réformes peu compatibles avec un parcours professionnel non linéaire en milieu ordinaire. La mise en place du Comité de pilotage AAH par le CIMAP (Comité interministériel de modernisation de l’action publique) installé en avril 2013, souhaite définir des scenarii d’évaluation de cette prestation afin de justifier la dépense
publique. A l’heure des recherches de réduction des finances publiques, la commission handicap d’EELV souhaite porter le débat politique sur l’évolution progressive de cette allocation en direction d’un revenu au moins égal, à taux plein, au seuil de pauvreté, dans le contexte actuel contraint, alors que notre programme demande au minimum la mise en place du revenu minimum d’existence, voire du revenu universel.

La problématique du droit à compensation des conséquences de son handicap

Bien qu’un projet de loi portant sur la politique de l’autonomie soit programmé, ce dernier ne concernera que les personnes âgées de plus de 60 ans. Une nouvelle fois, le principe discriminant de l’âge est réaffirmé, laissant subsister un modèle à deux vitesses en fonction de l’âge auquel survient la situation de handicap. Facteur aggravant, les lacunes de la Prestation de compensation du handicap (PCH), pourtant bien connues (absence de prise en compte de certaines aides humaines, faiblesse de la prise en charge des aides techniques…), ne sont pas pris en compte par le Gouvernement actuellement en place.

L’accessibilité, pourquoi attendre demain ?

Le projet de loi habilitant le Gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées dont le débat parlementaire devrait avoir lieu avant la fin du 1er semestre 2014 entraînerait le non-respect de l’échéance d’une
société accessible en 2015. Ce projet de loi portera la constitution d’agenda programmé d’accessibilité (Ad’AP). Cette programmation sera planifiée sur une période de 3 à 4 ans, reconductible 2 à 3 ans, renvoyant ainsi implicitement l’échéance de 2015 à 2022. Comme l’a souligné les principales organisations du champ du handicap, attendre encore 9 ans, sans
sanction ni pénalités financières, est difficilement acceptable car cela revient quasiment à accorder la même durée qu’en 2005. La commission handicap EELV rappelle fermement que 39 années qui nous séparent de la loi de 1975 fixant les premières orientations en matière d’accessibilité et que tout report reste inadmissible.
Pour EELV, la thématique de l’accessibilité à la cité et aux biens et services doit s’inscrire dans un périmètre d’intervention plus large que celui du strict champ du handicap, pour s’inclure dans la perspective d’une politique de développement et d’aménagement durable du territoire, profitable à l’ensemble des personnes rencontrant une difficulté d’autonomie (personnes âgées, personnes avec poussettes, voyageurs…) ainsi qu’à tous les types de déficience.

Motion
Le Conseil fédéral aujourd’hui réuni vote et demande :
– que les objectifs suivant visant à garantir ou améliorer les conditions de vie des personnes en situation de handicap à différents niveaux ;
– que le bureau exécutif, les parlementaires et autres élu-e-s en responsabilités, mettent en œuvre ou agissent, chacun à leurs niveaux, pour tendre vers les revendications suivantes :

Institutionnel
Transformer la politique sociale du handicap en une politique sociétale
Réguler la politique du handicap sur la strate régionale
Assurer l’effectivité du volet handicap dans chaque projet de loi
Assurer la transversalité de la politique du handicap en renforçant son interministérialité
Confirmer l’engagement de l’État en matière de solidarité nationale sur les politiques du handicap
Confirmer la région comme pilote de la mise en œuvre des politiques en faveur de l’autonomie et
de l’exercice de la citoyenneté des personnes en situation de handicap

Droit des personnes
Supprimer la barrière d’âge à 60 ans et un même droit à compensation que la perte d’autonomie soit acquise avant ou après 60 ans

Faire évoluer la prestation de compensation du handicap (PCH) vers un droit à la compensation de toutes les conséquences du handicap : du projet de vie à la compensation intégrale, y intégrant les activités domestique, familiales et parentales quel que soit l’âge du bénéficiaire.

Supprimer les réformes introduites par N. Sarkozy durcissant les conditions d’octrois de l’AAH et embolisant le fonctionnement des Maisons départementales des personnes handicapées ; il s’agit en particulier d’abroger les décrets du 1er janvier et du 1er septembre 2011 portant la mise en place de la restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi et la déclaration trimestrielle de ressources.

Accessibilité :
Exiger le maintien de l’obligation d’accessibilité au 1er janvier 2015, avec, à l’instar de l’obligation d’emploi des personnes handicapées, des pénalités de retard assujetties à des taxes financières progressives et dissuasives pour les contrevenants ;
Raccourcir le délai de mise en accessibilité des ERP de 9 ans maximum à 1 à 3 ans maximum

Unanimité pour

Remonter