Fiche thématique : Quelle méthanisation agricole durable ?

INTRODUCTION

La commission agriculture et ruralité d’EELV considérant que méthanisation agricole est de plus en plus présente sur nos territoires et engendre des questionnements au sein des collectivités entre partisans et opposés, vous propose cette fiche qui, nous espérons, pourra vous servir pour la campagne des régionales et lorsque vous serez élu(e)s, afin de guider vos choix vers une méthanisation durable.

La COMAGRI considère que la méthanisation des matières organiques issues des exploitations agricoles est un procédé intéressant et à encourager pour avancer vers la transition énergétique, mais dont on doit en connaitre les limites en terme d’emploi, de coût et de durabilité. L’introduction de la méthanisation peut aider à l’évolution de l’agriculture sous réserve qu’elle s’inscrive dans une démarche d’agro-écologie.

LA MÉTHANISATION C’EST QUOI ?

C’est une technique de fermentation qui accélère la dégradation des matières organique (animales ou végétales) par l’action de bactéries dans des digesteurs,sorte de cocotte minute maintenue à température constante. La méthanisation permet de capter environ 50% du carbone de la matière organique qu’on y introduit. Il s’agit de la partie la moins stable de cette matière organique qui sinon serait dégradée par les bactéries du sol dans les mois suivant son enfouissement.

Le résultat est la production de méthane (CH4) et de digestat pour partie solide et pour partie liquide.

– Il existe cinq modes de valorisation du méthane :

Production de chaleur, production d’électricité, production combiné d’électricité et de chaleur (co-génération) carburant pour véhicule, injection bio-gaz épuré dans le réseau gaz naturel.

– le digestat  est utilisé comme amendement pour le digestat solide et fertilisant pour le digestat liquide.

Deux types de méthaniseurs sont principalement en service :

– procédé à voie humide (<15% de matière sèche)

– procédé à voie sèche (15 à 40% de matière sèche)

ATTENTION A LA RESSOURCE EN EAU QUI SERA NÉCESSAIRE

=> POUR AUTANT UN PROJET DE MÉTHANISATION ESTAMPILLE ÉNERGIE RENOUVELABLE NE GARANTI PAS SA QUALITÉ NI SA DURABILITÉ

Les questions à se poser sont : quel modèle agricole, quelle qualité environnementale quelle gouvernance, quelle gestion des déchets ?

=> LA DIMENSION AGRICOLE ET COLLECTIVE DOIT RESTER AU CŒUR DES PRÉOCCUPATION

CRITÈRES AGRICOLES :

La méthanisation doit s’insérer dans le cycle de production de la (des) ferme(s) :

• Les installations doivent être adaptées à la taille des élevages en place,
• Les intrants extérieurs et les cultures dérobées dédiées doivent rester en de ça des effluents d’élevage,
• Engagement doit être pris d’une baisse de la quantité d’engrais chimique utilisé grâce à la facilité d’utilisation des digestats (produit homogène, plus soluble et facilement stockable)
• Ne pas concurrencer la production alimentaire ; pas de cultures principales dédiées (par exemple du blé ou du maïs cultivés spécifiquement pour la production d’énergies). La Loi de transition énergétique prévoit la limitation des cultures dédiées dans les méthaniseurs. Un décret devrait prochainement sortir. Si le projet souhaite introduire des cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE), il faut être vigilant sur les rendements annoncés.
• Ne pas être un palliatif à l’agriculture intensive ni en devenir le but premier (comme les méthaniseurs adossés à des ateliers d’engraissement industriels)
• Ne pas conforter les agrandissements des structures
• La méthanisation doit aider à aller vers de meilleurs pratiques : rotation des cultures, suppression des engrais chimiques, réduction globale des intrants diversification des assolements….

• Sur le long terme :
  • Se placer dans une perspective de la réduction de la de la production de viande donc des effluents d’élevage

AMÉLIORATION ESPERÉE PAR LA MÉTHANISATION SUR LE PLAN AGRICOLE

Meilleure gestion des effluents :

• substitution des engrais de synthèse par le digestat
• mise aux normes des exploitations

Nouvelles pratiques :

• assolement, couvert végétaux
• réduction des phytos
• amélioration des sols, lutte contre l’érosion

Nouveaux revenus (directs ou par substitution d’énergie)

Nouvelle relation de service à la collectivité (production de chaleur)

Création ou maintien d’emploi sur l’exploitation

LA VALORISATION DU DIGESTAT :

• Rester sur un rayon limité d’épandage, séparation de phase(solide/liquide amendement/fertilisant) couverture des fosses, équipement adapté.
• Les propriétés agronomiques des digestats varient selon leur nature et la composition des intrants dans le méthaniseur.

Attention le carbone transformé en méthane sera autant de carbone qui ne se transformera plus en humus ce qui peut induire une baisse de la qualité de la matière organique du sol (pas bon pour l’agriculture biologique !!!)

 MAÎTRISE DU GISEMENT

• Les substrats doivent être collectés dans un périmètre d’autant plus petit que leur potentiel méthanogène est faible ; estimation optimale 5 à 10 km (Pour la rentabilité du projet les distances de transport n’excèdent généralement pas 30 km.
• Avoir des matières sous contrat (idéal 15 ans) entre les fournisseurs de déchets méthanogènes et le gestionnaire du méthaniseur.
• Les matières hors contrats ne doivent pas mettre en danger l’équilibre du projet (analyser le projet avec perte du gisement et remplacement).
• Il faut faire une utilisation limitée des cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE) car aléatoires en fonction des conditions climatiques.

VALORISATION DU BIOGAZ

Le biogaz peut être valorisé de plusieurs manières en fonction des besoins locaux et des infrastructures locales existantes.

• Rester dans une logique de réduction des consommations et d’efficacité énergétique.
• Privilégier l’injection dans le réseau gaz et bio-méthane carburant mais pas toujours réalisable en zone rurale
• La cogénération, valorisation la plus courante (rendement 65% environ) produisant de la chaleur et de l’électricité. Ces deux formes d’énergies doivent être valorisées toute l’année.
• Valorisation de la chaleur : substituer plutôt que créer, exclure le séchage inutile  (digestat, plaquette…) exclure chauffage bâtiment hors-sol.

ÉNERGIE DE TERRITOIRE. GOUVERNANCE

Les unités de méthanisation doivent s’inscrire dans une approche territoriale et locale acceptées par les habitants concernés, d’où la nécessité d’une gouvernance ouverte.

Ces unités doivent également être en adéquation avec les caractéristiques locales de gisement et de débouché pour l’énergie et le digestat  afin de contribuer à l’autonomie énergétique de ce territoire

NÉCESSITÉ D’UN DIAGNOSTIQUE DE TERRITOIRE

Chaque installation est un cas particulier en fonction de son implantation territoriale. Cadrage des projets différents selon les régions et leurs productions agricoles.

• Privilégier les projets territoriaux et citoyens,
• Des projets ouverts au cofinancement citoyens,
• Des projets non spéculatif, d’intérêt général, ancrage local et diversifié, prise en compte de l’environnement
• des projets regroupant de petites structures agricoles et une collectivité.

CADRE RÈGLEMENTAIRE

Réglementation ICP (prescriptions générales) règlements européens (SPAN), directive nitrate. RSD et arrêtés préfectoraux.

A noter que le retour sur investissement est de 29 ans à + ou- 9 ans en fonction des aides et du prix d’achat de l’énergie.

• 29 ans : sans subvention, sans valorisation pour la chaleur
• 9 ans : 50% subvention  et valorisation pour la chaleur

Sources : France Agrimer, ADEME, FNE, ALE

Ressources utiles :

Développer une méthanisation durable, par Corinne Rufet, VP à l’agriculture au CR d’IDF : http://lafeve.fr/Developper-une-methanisation

Quel modèle pour la méthanisation agricole ? par les élus EELV du grand Ouest :

https://bretagne.eelv.fr/files/2013/09/Methanisation_IMPR.pdf

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