Lettre ouverte suite à l’agression
dont a été victime André Ollivro
À Delphine Batho, Ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
À Stéphane Le Foll, Ministre de l’agriculture et de l’agroalimentaire
Rennes, le 11 janvier 2013
Madame la Ministre,
Monsieur le Ministre,
Le 29 décembre dernier, à l’appel de la FDSEA et des JA des Côtes d’Armor, une centaine d’agriculteurs a manifesté au domicile du Président de « l’association de Sauvegarde du Penthièvre » au motif que ce dernier, André Ollivro, aurait construit un « cabanon de jardin » sans permis de construire. Cette accusation a été immédiatement démentie par Mme Doré, maire de la commune d’Hillion.
Face à la faiblesse de l’Union Européenne de faire appliquer ses directives à tous les États membres, notamment la directive Nitrate, ce sont à nouveau d’intolérables méthodes les plus musclées d’intimidations qui voient le jour, avec toujours le même objectif : défendre les intérêts privilégiés d’une petite partie d’une corporation, quelles qu’en soient les conséquences pour la société tout entière, y compris au niveau économique, dans une région fortement marquée par l’agroalimentaire et forte consommatrice d’eau de qualité.
Or, la loi du 3 janvier 1992 pose comme principe que « l’eau fait partie du patrimoine commun de la nation ». En vertu de quel principe une corporation se permet de semer la terreur à l’égard de responsables associatifs à un moment où l’effort de tous sera nécessaire pour atteindre les objectifs de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE) quant au rétablissement de la qualité des masses d’eau sur l’ensemble du territoire ?
La baie de Saint-Brieuc fait partie d’une des huit baies bretonnes inscrites au plan gouvernemental de lutte contre les marées vertes. Tous les experts les plus reconnus portent la responsabilité actuelle de la dégradation de la qualité de l’eau sur les méfaits de l’agriculture industrielle.
Malgré les réserves du comité scientifique d’état, certains objectifs, sont validés dans le domaine de la reconquête de la qualité de l’eau, des millions d’euros sont ainsi octroyés pour atteindre un objectif de résultat ambitieux, néanmoins déjà très aléatoire, à savoir :
– A l’horizon 10 ans, une réduction d’au minimum de 30% des flux globaux annuels
– A l’horizon 2027, une réduction d’au moins 60% des flux globaux annuels
– L’évolution des systèmes agricoles et la reconquête des « zones humides », soit 15 à 20% des surfaces agricoles du territoire de la baie.
Parallèlement, la stratégie du SAGE de ce bassin versant a défini plusieurs objectifs complémentaires comme la réduction des contaminations bactériologiques au niveau littoral, la réduction des concentrations en phosphore et/ou phénomènes d’eutrophisation sur les bassins versants du Gouessant et du Gouet.
Pourtant, tandis que le nombre de communes du bassin Loire-Bretagne classées « zones vulnérables » a grossi de 10 %, soit « 430 de plus », et que la Cour de justice européenne se prononcera sur le contenu du programme d’actions pour que agriculteurs et éleveurs respectent les seuils, FNSEA-JA-Coop de France et APCA ont considéré dans une récente communication : « que l’agro-écologie allait dans le bon sens, pas la directive Nitrate».
Ceux-ci demandent : « un moratoire sur les projets de délimitation des zones vulnérables dans l’attente de travaux scientifiques et juridiques cohérents ». Et de préciser que, pour l’élevage, « les durées minimales de stockage prennent en compte les capacités agronomiques des sols, la diversité des effluents et les mises aux normes coûteuses déjà réalisées ; pour les cultures, il est essentiel que les conditions d’épandage, notamment de pente, ne conduisent pas à supprimer de la production agricole dans de grandes parties de nos territoires ruraux ».
Ces successions d’expressions et d’actions, d’une violence extrême pour certaines à l’égard de responsables associatifs, anéantissent les efforts entrepris concernant la reconquête de la qualité de l’eau de ces dernières années, dont les résultats sont pourtant en deçà des attentes espérées. Déjà des dizaines de millions ont été accordés, sans véritable succès, pour la reconquête de la qualité de l’eau en Bretagne. Le contentieux à l’égard de Bruxelles qui pourrait coûter près de 20 millions d’euros aux citoyens contribuables français, nous oblige cette fois à un objectif de résultat.
Madame la Ministre, Monsieur le Ministre, le développement de l’agriculture – donc de notre alimentation et notre environnement – sont l’affaire de tous. Ceci relève de la préoccupation de tous les responsables politiques, associatifs, syndicaux, mais aussi des citoyens contribuables. Le respect des différents partenaires à l’échelon des territoires est donc plus que jamais nécessaire. Ceux et celles qui agissent pour le respect du droit de l’environnement, pour que soit reconsidérés les engagements financiers de l’État et des collectivités territoriales qui vont contre la défense du bien commun qu’est l’eau, doivent être respectés. C’est le sens de notre interpellation.
Recevez Madame, Monsieur les Ministres nos plus respectueuses considération.
René Louail et Guy Hascoët, conseillers régionaux en Bretagne
Michèle Le Tallec et Jean-Pierre Trillet, co-secrétaires régionaux Europe Ecologie Les Verts Bretagne