Position des Verts, février 2009
Le dispositif HVE (Haute Valeur Environnementale) : une démarche de progrès seulement s’il est utilisé pour distribuer les aides (et non pour valoriser les produits à la vente)
Depuis plusieurs années, Les Verts proposent la mise en place d’une agriculture « haute performance environnementale », basée sur une valorisation des pratiques respectueuses de l’environnement au moyen d’aides PAC échelonnées.
Le projet de certification « Haute Valeur Environnementale » (HVE), basé sur 3 niveaux progressifs de respect environnemental, pourrait aller dans ce sens – à condition qu’il soit suffisamment exigeant, et qu’il ne soit pas dévoyé par une valorisation sur les produits et dans le prix, jugée dangereuse par plusieurs acteurs de la profession agricole et de l’environnement : il doit bien s’agir d’un « dispositif » et non d’une ambigüe « certification ».
C’est malheureusement le chemin qui est pris actuellement dans le cadre des lois Grenelle et les Verts le contestent vigoureusement.
Une démarche de progrès
La définition de trois niveaux distincts en termes d’impact environnemental des pratiques agricoles, tel que proposé dans le cas d’HVE, peut être une bonne « démarche de progrès », grâce à la reconnaissance des efforts réalisés par les agriculteurs. Ce dispositif pourra permettre d’évaluer les pratiques agricoles et de hiérarchiser leur impact sur l’environnement, ce qui est un outil utile pour les citoyens comme pour les agriculteurs eux-mêmes.
Pour ce faire, il est indispensable que les différents niveaux soient réellement progressifs et significatifs : en particulier, le niveau 3 doit être basé sur des indicateurs simples et indiscutables.
Les indicateurs proposés par la fédération France-Nature-Environnement pour la définition du « niveau 3 » sont les plus sérieux et doivent être retenus prioritairement. Mais ils n’ont de sens que si les deux indicateurs sont combinés (pas plus de 30 % du chiffre d’affaire consacré aux intrants ET au moins 10 % de la SAU en zones de régulation écologique), et si leur définition reste celle de FNE.
En particulier, l’indicateur « 10 % de la SAU en zones de régulation écologique » doit impérativement être calculé selon la méthode IDEA et certainement pas au sens de la PHAE (prime herbagère agro-environnementale). Selon cette dernière, une ferme de 200 ha de céréales remplirait les conditions avec 2 000 mètres de haies seulement : ce serait une imposture.
L’indicateur « pas plus de 30 % du chiffre d’affaires consacré aux intrants » permettra de réduire la part du capital dans le processus de production agricole, et par conséquent de revaloriser la main-d’œuvre. Par ailleurs, il impliquera des changements de pratiques en profondeur, pour remplacer les intrants chimiques par des pratiques préventives et mécaniques respectueuses des écosystèmes et des plantes cultivées.
Enfin, il serait impensable que le « niveau 2 » soit calibré uniquement pour bénéficier aux agriculteurs engagés en agriculture raisonnée, par l’utilisation d’indicateurs liés à ce mouvement. Les agriculteurs pratiquant l’agriculture biologique ou des systèmes d’agriculture herbagère (dite « agriculture durable ») ne doivent pas se voir imposer des enregistrements ou contraintes administratives absurdes car inutiles dans le cadre de leur système de production.
Un système d’accès à des aides progressives
Le dispositif étagé HVE n’a de sens que s’il permet aux agriculteurs d’accéder à des aides échelonnées, selon le système qui a été mis en place en Suisse dans les années 90 :
- les agriculteurs ne respectant pas au minimum le niveau 1 (conditions environnementales minimales) n’auront pas droit aux aides PAC,
- les agriculteurs respectant le niveau 1 auront accès aux aides PAC, mais avec un montant réduit,
- les agriculteurs respectant le niveau 2 bénéficieront d’aides plus importantes,
- les agriculteurs respectant le niveau 3 bénéficieront d’un montant d’aides plus élevé encore, et clairement incitatif. Par ailleurs les agriculteurs en agriculture biologique auront droit, en parallèle, aux aides ad hoc (conversion, maintien). Il est nécessaire que le dispositif HVE ne crée pas de confusion auprès des paysans et des consommateurs. Il s’agit notamment de montrer que le niveau 3 de ce dispositif n’est pas un aboutissement mais seulement une étape sur une voie d’amélioration progressive, et que l’agriculture biologique bien pratiquée peut permettre d’aller plus loin.
Aucune valorisation par les prix
Quoi qu’il en soit, il serait inadmissible et manipulateur de permettre aux agriculteurs engagés en HVE de bénéficier d’une valorisation par les prix (c’est-à-dire que leurs produits soient vendus plus chers). Une telle hypothèse reviendrait à organiser une confusion entre les signes de qualité (valorisés par les prix) et les pratiques environnementales (à valoriser par les aides et l’incitation publique) – et a fortiori entre l’agriculture HVE et l’agriculture biologique. Les produits issus des fermes engagées dans la démarche HVE ne peuvent en aucun cas bénéficier d’un affichage spécifique.
Dans le cas contraire, la certification HVE ne serait qu’une opération de communication destinée à tromper les consommateurs en laissant croire qu’une amélioration très partielle des pratiques suffit à dissimuler les enjeux environnementaux de l’agriculture. De plus, elle entretiendrait certains agriculteurs dans l’illusion d’être arrivés au terme de leur évolution environnementale – alors que le dispositif HVE doit les inciter à poursuivre leur évolution vers une meilleure prise en compte de l’environnement, et pas à s’endormir sur leurs lauriers.
Pour cette raison, il serait impensable que les agriculteurs situés au niveau 1 ou 2 de l’échelle puissent se prévaloir du terme « HVE ». Seuls les agriculteurs respectant le niveau 3 (ou certifiés en agriculture biologique) pourront être considérés comme « HVE ».
Une mesure nécessairement couplée avec une réforme des aides PAC
Non seulement le dispositif HVE implique un échelonnement des aides PAC (au minimum pour le niveau 3, le seul à être véritablement porteur d’un progrès environnemental net), mais de plus, pour avoir un sens il doit s’accompagner d’une remise à plat des modalités d’attribution de ces aides. Pour que les soutiens à l’agriculture soient cohérents en termes agronomiques et environnementaux, il est nécessaire de mettre fin au plus vite au système actuel des « références historiques individuelles » : il est inadmissible qu’un éleveur nourrissant ses vaches à l’aide de maïs et de soja bénéficie d’aides supérieures à un éleveur à l’herbe. Une mutualisation des aides PAC par le dispositif dit de « régionalisation » est nécessaire. Par ailleurs, il est nécessaire de renforcer le montant des aides PAC sur les premiers hectares, pour limiter les logiques d’agrandissement et de concentration (qui conduisent toujours à une fragilisation agronomique ou vétérinaire, et par conséquent à l’utilisation croissante de traitements chimiques).
À ces conditions, le dispositif HVE pourra devenir un outil pertinent pour tirer l’agriculture française vers une meilleure prise en compte de l’environnement.
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Communiqué de Nature & Progrès
LA CERTIFICATION HVE : HAUTE VALEUR CONTRE L’ENVIRONNEMENT
Alès, le 29 septembre 2009
Après les députés, les sénateurs s’apprêtent à instaurer avec la loi Grenelle II une nouvelle certification des exploitations agricoles. Ce label « Haute Valeur Environnementale » (HVE), pensé loin des réalités quotidiennes de terrain, ne reflètera pas la qualité des démarches véritablement respectueuses de l’environnement.
Avec trois niveaux de contraintes différents, dont les deux premiers se contentent de qualifier le respect de la réglementation générale, le nouveau label Haute Valeur Environnementale va avant tout ajouter de la confusion dans l’esprit des consommateurs. Cette confusion ne vise selon nous qu’à affaiblir l’agriculture biologique, plébiscitée par les consommateurs.
1. En n’interdisant pas explicitement le recours aux pesticides, en laissant entendre que l’utilisation de pesticides ou d’OGM peut être favorable à l’environnement, la certification HVE va rendre leur utilisation obligatoire. Par exemple, au prétexte de risques sanitaires facilement maîtrisables par des méthodes naturelles, elle interdira l’emploi des Préparations Naturelles Peu Préoccupantes (comme le purin d’ortie) qu’un récent décret condamne à se voir refuser toute Autorisation de Mise sur le Marché. L’utilisation des pesticides toxiques, seuls à disposer de cette autorisation, deviendra de fait un passage obligé.
2. En imposant, comme toute certification, un excès de bureaucratie, une charge financière directe pour son contrôle et des contraintes inaccessibles aux petites exploitations diversifiées, elle accélèrera leur marginalisation puis leur disparition. Ainsi, un petit maraîcher de montagne qui pratique l’agriculture biologique sur les seules terres de fond de vallée disponibles en bord de rivière se verra exclu au prétexte qu’il lui faut y cultiver des bandes enherbées et y conserver des friches baptisées « infrastructures écologiques ». A contrario, un gros exploitant utilisant des pesticides et des engrais polluants se verra qualifié HVE au prétexte qu’il dispose d’assez de terres pour ne pas en épandre sur les quelques mètres qui bordent la rivière, et pour louer ses bois inexploités à des sociétés de chasse.
Le respect de l’environnement ne peut pas résulter de contraintes bureaucratiques décidées dans des bureaux parisiens. Il nécessite des mesures simples comme l’interdiction des produits chimiques de synthèse et des OGM. Rappelons que définir les contraintes appropriées à chaque territoire ne peut se faire qu’avec la participation de l’ensemble des acteurs locaux. Nature & Progrès appelle les sénateurs à refuser ce détournement grotesque des aspirations de la population à plus de respect de l’environnement par les agriculteurs.
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