Engagements et désengagements

Clermont Université, établissement public de coopération scientifique créé en 2008, s’est engagé à porter « une politique culturelle authentiquement universitaire, mise en œuvre par des personnels compétents dans les secteurs culturels et artistiques, disposant des moyens humains, techniques et logistiques indispensables » (conseil d’administration, juin 2012). La convention Université, lieu de culture signée à son tour en juillet 2013 par la Ministre de la Culture et de la Communication, la Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche et le Président de la Conférence des Présidents d’Université entend donner un nouvel élan aux politiques culturelles, favoriser les pratiques culturelles et artistiques des étudiants de toute la communauté universitaire, renforcer la rencontre entre l’université et la création artistique et dynamiser les liens avec la Cité. Définie en partenariat avec le réseau national Art + Université + Culture, et avec une contribution notable du SUC, cette politique culturelle est, déjà, en passe d’être enterrée.

L’université est aujourd’hui confrontée à des difficultés financières sans précédent, justifiées par un désengagement financier inacceptable de l’Etat, après l’adoption de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (loi LRU) et à l’autonomisation de son fonctionnement. Par des répercussions prévisibles qui atteignent de nombreuses universités en France, des réductions budgétaires sont appliquées brutalement aux composantes, aux étudiants, aux personnels et aux services, et remettent très dangereusement en cause les missions de service public. À l’université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand, la suppression actuelle de plus de 50 postes de contractuels administratifs et techniques, de postes d’enseignants-chercheurs, le non-renouvellement de 30% des contrats doctoraux, la réduction de respectivement 15% et 20% des dotations de fonctionnement des composantes et des laboratoires, la diminution de près de 10% du nombre d’heures d’enseignement proposées aux étudiants et le gel du plan pluriannuel de renouvellement du matériel pédagogique sont insupportables.

À Clermont Université, la culture paie un tribut encore plus lourd à cette politique d’austérité qui ne peut plus taire son nom. Déjà amputé de 30% entre 2010 et 2013, le budget du SUC subit une nouvelle réduction de 30% en 2014. L’équipe actuelle est amputée d’un poste technique, indispensable à son fonctionnement. Des artistes intervenant dans les ateliers et stage ne peuvent plus être rémunérés. La direction du SUC n’a d’autre choix que celui de présenter sa démission collective pour dénoncer cette situation insoutenable. Aujourd’hui, l’accueil des étudiants au sein des ateliers à la prochaine rentrée paraît impossible, menaçant directement la validation des pratiques artistiques obligatoires dans certains cursus (Département des Métiers de la Culture) ; des partenariats privilégiés noués et entretenus depuis de nombreuses années avec les acteurs de la culture dans la Cité et en région ne pourront plus être honorés ; certains projets artistiques et culturels universitaires locaux, nationaux et internationaux devront être abandonnés.

À un moment où les pratiques culturelles et artistiques se développent au sein du réseau Clermont Université (43 ateliers ouverts aux étudiants et au public, 12 stages encadrés par des professionnels à la réputation incontestée, plus de 50 événements/représentations sur la seule année universitaire écoulée), cette réduction des moyens matériels et humains promet un coup d’arrêt violent aux ambitions et aux actions culturelles des universités clermontoises.

Un projet de société

Comment imaginer que l’université puisse se priver sciemment des forces et de l’énergie créatrices portées par son service culturel ? Les acteurs de la culture à l’université se refusent aujourd’hui à renoncer au rêve de la médiation artistique et culturelle imaginée par le Front populaire, portée en particulier par Jean Zay. Ils se refusent à dissoudre les liens tissés entre enseignement supérieur, recherche fondamentale et pratiques artistiques depuis les années 1960 – et qui donnèrent corps au projet d’éducation populaire, de démocratisation et d’accès à une culture de qualité pour tous imaginé par Laurent, Vilar, Malraux ou Nordey. Ils se refusent à renoncer au projet culturel élaboré par Jack Lang dans les années 1980 et que les nouveaux animateurs universitaires de la culture ont su porter à Clermont-Ferrand et ailleurs depuis. Cet élan historique en faveur de la culture universitaire doit-il être coupé au nom d’une austérité financière ? Comment accepter que la culture universitaire soit à ce point sacrifiée au cœur d’une université clermontoise précurseuse, l’année même où s’est tenue la première Journée nationale des arts et de la culture dans l’enseignement supérieur, le 10 avril dernier ?

Comme l’enseignement et la recherche, actuellement affectés par les mêmes régressions, l’art et la culture doivent être ardemment défendus, pensés par et pour les étudiants. L’Université se doit d’investir le champ culturel à la mesure de ses ambitions réelles si elle ne veut pas reculer. Sacrifier la culture à l’université au nom d’une austérité économique de court terme revient à renoncer au projet d’une culture créatrice et émancipatrice pour les étudiants. Il est temps que l’université tisse de nouveaux liens entre création et éducation populaire. Inspirons-nous du Petit Manifeste de Suresnes de Jean Vilar et ayons à notre tour l’ambition de réunir l’étudiant-créateur et l’artiste confirmé, le jeune citoyen et les acteurs culturels des territoires, l’étudiant fils d’ouvrier et le professeur agrégé. Rappelons et faisons nôtres les mots de Jacques Lassalle : « L’art, ce n’est pas la survie pour soi, c’est peut-être la survie pour les hommes après soi. Aujourd’hui le service public, ce serait tout de même cette préoccupation-là qui devrait l’habiter ».

Pour tous les acteurs impliqués dans le Service Université Culture, il est indispensable de faire de la culture une priorité et de réenchanter l’université par la culture ; pour la formation des étudiants, pour l’avenir de la Cité.

Le Service Université Culture (SUC) de Clermont Université

Rejoignez les promoteurs et les défenseurs d’une culture de qualité, pour tous, à l’université : signez le Manifeste !

Premiers signataires :

Cyril Triolaire, maître de conférences aux départements Métiers de la Culture et Histoire de l’université Blaise Pascal, responsable d’atelier « théâtre » au SUC

Catherine Milkovitch-Rioux, maîtresse de conférences au département de français de l’université Blaise Pascal, directrice du SUC

Stéphanie Urdician, maîtresse de conférences au département d’études hispaniques de l’université Blaise Pascal, directrice adjointe et responsable du secteur théâtre/arts de la scène du SUC

Évelyne Ducrot, coprésidente du réseau national Art + Université + Culture, chargée de l’action culturelle et fondatrice du SUC

Myriam Lépron, professeur agrégée de lettres modernes, responsable du secteur Lire/écrire du SUC, chargée de mission études et vie universitaire de Clermont Université

Caroline Lardy, maîtresse de conférences en études cinématographiques au département Métiers de la Culture de l’université Blaise Pascal, responsable du secteur cinéma du SUC

Jean-Louis Jam, professeur au département Métiers de la Culture de l’université Blaise Pascal, chef de l’Orchestre universitaire, directeur fondateur du SUC

Nicolas Duquerroy, professeur des écoles, responsable des secteurs danse-cirque/arts de la scène du SUC

Lionel Balard, professeur d’arts plastiques à l’Espé Clermont-Auvergne, responsable du secteur arts plastiques du SUC

Philippe Bourdin, professeur d'histoire moderne au département d'histoire de l'Université Blaise Pascal, ancien directeur adjoint du SUC

Ils ont signé le manifeste :

Jack Lang (Président de l'Institut du Monde Arabe, Ministre de la Culture et de la Communication, Ministre de l'Education nationale),

Danielle Auroi (Députée du Puy-de-Dôme, Paris, Assemblé nationale, Présidente de la Commission des Affaires européennes),

André Chassaigne (Député du Puy-de-Dôme, Paris, Assembleé nationale, Membre de la Commission des affaires économiques),

Nicole Rouaire (Vice-présidente Culture, Patrimoine et Développement des usages numériques, Conseil régional d'Auvergne),

Jean-Marc Grangier (Directeur, Scène nationale, Clermont-Ferrand),

Pierre Thirion-Vallet (Directeur artistique, Centre lyrique d’Auvergne, Clermont-Ferrand),

Gilles Chaideyrou (Ingénieur en informatique, Président de l’Orchestre Universitaire, Clermont-Ferrand)

Claude Patriat (Co-fondateur du réseau Art + Université + Culture), Rachel Dufour (Directrice, metteuse en scène, comédienne, Cie Les guêpes rouges théâtre), Dominique Touzé (Directeur, metteur en scène, comédien, Cie Wakan Théâtre), Pierre Mauchien (Directeur des équipements de spectacle, Ville de Clermont-Ferrand), Marie Falchero-Lavest (Chargée de communication, Théâtre du Pélican), Bruno Marchand (Directeur, metteur en scène, comédie, Cyclique Théâtre), Pierre-François Pommier (Comédien, Cie Midi-Minuit), Sandrine Sauron (Directrice, Cie Poplité), Mic Guillaumes (Danseur, chorégraphe, formateur et expert national Danse à l’école pour le Ministère de la Culture, personne ressources interministérielle MC/MEN), Marielle Coubaillon (Directrice, Cie Show devant), Michel Coste (Vidéaste), Hugues Chabalier (Comédien, Cie Mégaphone United), Jean-Luc Guitton (Comédie, metteur en scène), Till Leprêtre (Vidéaste), Jérémy Mazeron (Assistant directeur, Festival Bach en Combrailles), Cécile Coulon (Ecrivaine), Valérie Vivier (Comédienne, Fracas), Fatou Dicko (Metteuse en scène, comédienne, Cie Gare à l’art collectif !), Cédric Jonchière (Directeur, metteur en scène, Cie La Transversale), Chrystel Pellerin (Directrice, metteuse en scène, comédienne, Cie Gangmouraï), Jean-François Bertin (Directeur de la Poste, Vichy, Orchestre universitaire), Odile Clément (Orchestre universitaire), Jean-Marie Besnard (Professeur de piano, Conservatoire Emmanuel Chabrier, Clermont-Ferrand), Nicolas Merlin (Ingénieur INSEE, Orchestre universitaire), Pierre-Alain Bégou (Ingénieur Michelin, Orchestre universitaire), Geneviève Bégou (Professeur de violoncelle, Conservatoire Ambert, Puy-de-Dôme), Alexandre Ouzounoff (Bassoniste concertiste, Orchestre universitaire), Laure Bécamel (Contre-bassiste, Orchestre régional d’Auvergne), Claude Villevieille (Hautboïste concertiste, Orchestre universitaire), Cécile Molinaro (Violoniste, Orchestre universitaire), Claudette Friess (Professeur de basson, Conservatoire Thiers, Puy-de-Dôme), Monique Jouvancy (Comédienne, auteur, Cie Lectures à la carte), Sigrid Carré Lecointre (Dramaturge, assistante mise en scène, Cie Lyncéus Théâtre), Baudim Jam (Directeur artistique, altiste, Quatuor Prima Vista, compositeur, musicographe), Ulla Menneteau (Clarinettiste, Orchestre universitaire), Laurent Gonnet (Altiste, Orchestre universitaire), Anne-Sophie Emard (Vidéaste plasticienne), Sophie Barsi (Festival Traces de vie), Georges Bollon (Sauve qui peut le court-métrage, Clermont-Ferrand), Didier Decombat (Président, Bal o centre), Camille Henner (Danseuse, Cie Daruma), Delphine Canac (Violoniste, Orchestre universitaire), Hélène Hibou (Artiste plasticienne), Denis Humbert (Ecrivain), Lionel Balard (Plasticien graveur, Chargé de l’action culturelle, ESPE Auvergne), Elise Sémelin (Chargée de cours, Université Blaise Pascal, Danseuse Cie Jeux d’acteur), Marie Cosnay (Ecrivaine), Marie-Hélène Giot-Bordot (Professeur de violon, Conservatoire Emmanuel Chabrier, Clermont-Ferrand), Renaud Taupinard (Corniste, Opéra de Marseille), Pierre Dieu (Ingénieur chimiste, Orchestre universitaire), Nelly Girardeau (Vidéaste plasticienne), Anne-Marie Couderc (Violoniste, Orchestre universitaire, Association AM'A Les amis des musées de Clermont-Ferrand), Daniel Grimonprez (Professeur de contrebasse, Conservatoire de Vichy), Michelle Carlesso (Violoncelliste, Orchestre universitaire), Christophe Bianco (Professeur de violon, Conservatoire de musique, Orléans), Anne-Marie Couderc (Violoniste, Orchestre universitaire), Elisabth Besnard (Professeur de solfège, Conservatoire Emmanuel Chabrier, Clermont-Ferrand), Laura Pardonnet (Comédienne, Théâtre des Optimistes ; chargée de l'action culturelle, Paris 3-Sorbonne nouvelle), David-Olivier Lartigaud (Professeur à l'Ecole Supérieur d'Art et de Design, Saint-Etienne ; co-responsable du Random(lab), Agnès Timmers (Directrice, Festival Musiques démesurées), Jean-Paul Marchand (Musicien, professeur, Conservatoire), Martine Contensou (Chargée des manuscrits, Maison Victor Hugo), Nadine Aubrun (Ancien pupitre, Orchestre universitaire, Clermont-Ferrand), Agnès Loudes (Secrétaire générale du Théâtre Antoine Vitez, Aix-Marseille Université),...