Aujourd’hui, ce sont plus de deux cent avocats qui sont venus protester devant le Tribunal de Grande Instance de Lille contre le projet de réforme de l’aide juridictionnelle présenté par la Garde des Sceaux. Cette manifestation contre le passage en catimini d’un article sur l’augmentation de la contribution des avocats au service d’aide juridictionnelle, met en lumière un dysfonctionnement de notre système judiciaire qui perdure depuis trop longtemps.
Il faut sortir de cette image d’Épinal que nous avons de l’avocat : aujourd’hui, la moitié d’entre eux gagnent l’équivalent du SMIC. Et les avocats vivant de l’aide juridictionnelle, essentiellement de jeunes avocats, doivent faire face à des tarifs ridiculement bas et des retards toujours plus longs dans les versements.
L’aide juridictionnelle est un droit inaliénable : chacun a le droit d’être défendu. Le relèvement du plafond de revenus devrait permettre à 100 000 personnes supplémentaires de bénéficier de l’aide légale, c’est une bonne nouvelle. Mais cette avancée ne doit pas occulter la question du financement de l’extension.
La réforme de Christiane Taubira propose de faire participer d’avantage les avocats au financement d’une aide juridictionnelle pour laquelle ils donnent déjà énormément. Alors que les unités de valeurs n’ont pas été revalorisées depuis des années et que les délais de paiement de l’aide ne cessent de s’allonger, c’est un vent de colère qui souffle dans tous les barreaux de notre pays.
En ne sécurisant pas le paiement de l’aide juridictionnelle, ce sont les libertés des plus pauvres que le gouvernement menace. En effet, il est impossible pour les avocats de réaliser le même travail, en quantité et en qualité, pour un usager bénéficiant de l’aide juridictionnelle que pour un usager « payant ». Et cela se retrouve dans nombre de domaines : divorces, gardes d’enfants, droits des étrangers, etc. Ce sont encore une fois les gens en positions de faiblesse qui se retrouvent écrasés par un système qui devrait pourtant les protéger.
La situation est aujourd’hui arrivée à un point de rupture. « Il est urgent que la Garde des Sceaux offre une réponse appropriée au désarroi des avocats comme des usagers, en assurant un financement pérenne de l’aide juridictionnelle qui ne mette pas en péril la vie de milliers personnes » déclare Sandrine Rousseau, tête de liste du Rassemblement en Nord Pas de Calais – Picardie.