Yannick Jadot était l’invité du journal de 13h de France Inter ce jeudi 2 octobre 2014

« Le pacte entre les sociaux-démocrates et les conservateurs concerne le vote que les députés feront à la fois sur Pierre Moscovici et le candidat espagnol convaincu de conflits d’intérêts, mais dans les auditions il n’y a pas de pacte de non agression. Pendant deux heures, Pierre Moscovici a été surtout sur la défensive, assez superficiel dans ses réponses mais prônant l’orthodoxie budgétaires. Et puis il a commencé à dire deux ou trois choses dans la dernière heure, notamment sur une partie essentielle de son portefeuille qui est la question de la fiscalité. On sait à quel point la concurrence fiscale en Europe tue à la fois les recettes publiques et la construction d’une politique économique commune.

Il a dit souhaiter que la taxe sur les transactions financières aboutisse vite. J’espère qu’il sera comme commissaire européen un responsable un peu plus courageux vis-à-vis des banques, car on sait que la France, du fait du jeu de la Société Générale et de la BNP sur les produits dérivés, a réduit fortement la taxe sur les transactions financières. On a vu à quel point ces dernières semaines ces deux banque étaient capables de donner beaucoup de dividendes à leurs actionnaires, donc il faut agir vite et fort sur la fiscalité, c’est en enjeu essentiel.

Mais il va falloir surtout que dans les jours qui viennent être vigilants sur les menaces lancées par des gens pourtant habituellement raisonnables comme Alain Lamassour pour défendre un candidat espagnol qui depuis 25 ans profite de ses responsabilités politiques pour favoriser sa famille et ses affaires. Sous la pressions il a rapidement vendu ces derniers jours ses parts dans des sociétés pétrolières mais on sait que c’est son beau-frère qui a récupéré toute le business ! Monsieur Cañete considère que puisque ce ne sont pas sa femmes ou son fils, qui eux aussi ont été très impliqués, ce n’est pas sa famille. On a besoin d’un commissaire au climat et à la transition énergétique qui ne soit pas impliqué dans des conflits d’intérêts, qui porte haut et fort ces sujets car il y a la grande conférence climatique l’année prochaine, et puis on sait que c’est quelqu’un qui a dit publiquement que les femmes étaient inférieures aux hommes.

Le niveau de défiance vis-à-vis des responsables politiques est très important, l’Europe a besoin d’éthique et je trouve que ce marchandage, venant y compris de gens pourtant raisonnables comme Lamasour, disant « si vous touchez un cheveu de Cañete on vous bousille Moscovici » est indigne de la démocratie européenne. Ces auditions sont une bonne chose pour la démocratie, elles ne doivent pas devenir un compromis foireux entre les conservateurs et les socialistes. L’Europe a besoin de bons commissaires, l’Europe a besoin de démocratie, d’éthique, et ce serait pitoyable si cela tournait simplement à un petit deal entre des groupes politiques.

Jonathan Hill n’a pas vraiment convaincu non plus. Il y a un mauvais choix de certains pays pour leurs commissaires, et aussi une certaine perversité de Juncker qui met quelqu’un de la City pour réguler les services financiers, qui met quelqu’un du pétrole pour lutter contre les changements climatiques, ou qui met pour la citoyenneté européenne un hongrois qui a fait du recul de la démocratie dans son pays. Il y a une certaine perversité dans tout cela mais le Parlement européen doit utiliser son pouvoir de rejeter de mauvais commissaires. Nous allons voter, il faut que les sociaux démocrates et les conservateurs européens défendent l’intérêt général européen et l’éthique et pas leurs petites affaires entre eux »

 

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