5 April 2013
Les écologistes ne sont pas les ennemis de l’industrie. Ils en sont même des défenseurs, décidés à valoriser une activité productive qui s’ancre durablement dans les territoires.
Le thème de la désindustrialisation fait florès dans le débat politique… mais pour ne se transformer qu’en coups de com’ plus ou moins habiles, où l’hypothétique « baisse du coût du travail » des uns répond au claironnant « made in France » des autres pour rendre plus compétitive l’industrie française…
Ces postulats sont trop simplistes. Ils tentent de masquer les réelles difficultés de l’appareil productif français : un tissu éclaté de PME/PMI1, la compétitivité intégrant de nombreuses variables allant de l’innovation à la qualité en passant par les coûts de production, la consommation d’énergie ou le coût du foncier.
C’est par ailleurs l’échec d’une stratégie qui depuis trente ans a délaissé le tissu industriel au profit des services, pariant seulement sur quelques groupes censés porter les grands contrats, mais qui ont souvent rejoint le cimetière des éléphants de l’isolationnisme français : Concorde, EPR, Rafale, motorisation diesel… Mais avec le contre-exemple tellement éclairant qu’est le modèle européen d’Airbus.
Faute d’une approche européenne, nous regarderons impuissants les restructurations brutales menées dans la sidérurgie et dans l’automobile et nous n’aurons ni les capacités d’innovation, ni les moyens d’investissement, ni les partenariats pour moderniser notre industrie sur une base durable. Des secteurs aussi importants que la rénovation du bâtiment, les transports collectifs et les énergies renouvelables sont pourtant prometteurs en termes d’emploi. La France a dans ces domaines des entreprises performantes sous-valorisées.
Si aujourd’hui le cadre principal des échanges est l’Union européenne, c’est cette perspective qu’il faut adopter sans réserve, en cohérence avec une stratégie nationale à rendre effective dans les territoires… Or nous manquons des trois : la politique industrielle européenne n’existe pas ! ; la France a retrouvé quelques couleurs de volontarisme mais sans stratégie claire ! ; et le projet de décentralisation ne permet pas aux régions de jouer clairement leurs rôles en direction des PME.
EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE, LE RETARD ACCUMULÉ EST CONSIDÉRABLE
Pour inventer une nouvelle stratégie industrielle, il faut oser une stratégie de filières compatible avec les axes du développement durable car, là aussi, le retard accumulé est impressionnant. La France est au 26e rang européen en matière de fiscalité écologique, tandis que les investissements dans la R&D stagnent à 2,2 % du PIB depuis vingt ans. Pourtant, le chantier de la transition énergétique, le développement d’une économie circulaire économe en ressources et recyclant les matières, les nouveaux besoins en matière de santé… sont des leviers extrêmement puissants pour développer une industrie sur le territoire, avec un potentiel de création de 684 000 emplois2.
Les écologistes sont porteurs d’un nouveau modèle industriel : une politique territorialisée de soutien aux entreprises, qui passe par les régions pour favoriser le renforcement des PME et la création d’ETI ! ; une fiscalité juste et écologique, au bénéfice des PME aujourd’hui défavorisées, pour impulser la reconversion écologique ! ; le soutien à l’innovation technologique, sociale, commerciale, financière ! ; le soutien à la démocratie sociale et à la responsabilité sociale des entreprises ! ; l’accompagnement des évolutions professionnelles, notamment par la formation tout au long de la vie vers les nouveaux métiers émergents, notamment dans l’économie verte ! ; l’intégration forte de l’économie circulaire dans les choix de développement ! ; la mise en cohérence des mesures fiscales et réglementaires afin de développer les débouchés pour les nouveaux produits plus sobres en énergie et moins polluants ! ; la création d’un fonds de reconversion industrielle, non pas pour réparer mais pour anticiper, en assurant clairement aux salariés une continuité et une sécurité professionnelles pendant toute la période de reconversion ! ; la régulation des échanges extra-européens sur la base de critères sociaux et environnementaux, intégrant des mécanismes de compensation ! ; le lancement d’une stratégie européenne de filières, pour dépasser les égoïsmes nationaux et investir dans l’économie de la transition.
Ce n’est pas la recherche de la croissance perdue qui va permettre de trouver des solutions pour les salariés de PSA, Renault, Goodyear, Sanofi… Les stratégies de défense et de maintien de ces emplois sont impératives à court terme, mais il faut également anticiper et donner du sens à notre économie et à notre modèle productif. Faisons-le maintenant !
1. 84% des entreprises françaises ont moins de dix salariés, contre 60,5% en Allemagne.
2. Étude menée pour le compte du WWF.
ALINE ARCHIMBAUD
SÉNATRICE EELV
FRANÇOIS DE RUGY
DÉPUTÉ EELV
YANNICK JADOT
DÉPUTÉ EUROPÉEN EELV
CHRISTOPHE PORQUIER
VICE-PRÉSIDENT EELV RÉGION PICARDIE
JEAN-PHILIPPE MAGNEN
PORTE-PAROLE NATIONAL EELV
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